Application Missing

Jouer dans sa série !

Zandel Media a officiellement lancé hier une nouvelle application mobile à mi-chemin entre le jeu vidéo et la série télé. Missing, décrit par son créateur comme un « suspense interactif », met en vedette Roy Dupuis et Patrick Hivon. La Presse a rencontré les artisans de ce projet.

Le premier chapitre de Missing s’ouvre sur un plan rapproché de Patrick Hivon, chaînes aux poignets, enfermé dans un cagibi dont la porte est cadenassée. Une photo de famille, avec ses filles, est collée à la porte ; on peut y lire ces trois mots : « Play With Me. » Le prisonnier se met à hurler. En vain.

Après deux minutes, tout s’arrête. Pour que le récit se poursuive, il faut résoudre des énigmes, prêter main-forte aux personnages.

Une petite clé apparaît. C’est à nous de jouer. La clé se balance, dans les airs, Patrick Hivon l’attrape avec ses dents et parvient à se libérer les poignets. La série peut se poursuivre. Prochaine étape : sortir de la pièce, mais il faut auparavant trouver la combinaison du cadenas…

Il ne s’agit pas d’un scénario où le joueur/spectateur détermine la tournure des événements. Le concepteur, qui a confié la réalisation du projet à Tristan Dubois, a opté pour une approche de « résolution de problèmes ».

« Il faut trouver une bonne histoire pour donner envie de jouer, mais, en même temps, il ne faut pas que les énigmes soient trop compliquées, sinon on reste bloqué, même si on ne meurt jamais », explique le producteur et concepteur Simon Tremblay, qui a fondé Zandel Media en 2011.

Un épisode peut ainsi durer de 45 minutes à une heure et demie, selon les habiletés du joueur/spectateur. Pour l’instant, aucun indice n’est donné, mais les concepteurs pourraient ajouter cette option dans les prochains épisodes.

Le premier épisode, offert depuis le 17 novembre, met donc en vedette Patrick Hivon dans le rôle du prisonnier et Roy Dupuis dans celui du détective Samuel Lambert, chargé de faire la lumière sur son rapt et de mettre la main au collet du ravisseur, qui a fait d’autres victimes… On passe de l’un à l’autre dans les cinq chapitres.

« Nous avons vraiment cherché à créer un modèle de convergence à mi-chemin entre le jeu et la série web ou la série télé », indique Simon Tremblay, qui a travaillé pendant 15 ans pour Ubisoft et Electronic Arts.

Le comédien Roy Dupuis, lui, a tout de suite eu envie de participer à l’aventure. « Ça fait longtemps que je me dis que ce genre de produit devrait exister. »

« Je suis amateur de séries et de jeux d’intrigues comme Myst, et je me dis que ce serait intéressant de mélanger les deux pour que le spectateur devienne un personnage et fasse avancer l’histoire. 

— Roy Dupuis

Le joueur/spectateur est partie prenante de l’histoire. Simon Tremblay voulait qu’il vive l’expérience de la série en temps réel. « Parfois, il prend la place du personnage ; parfois, le spectateur est comme un ange qui l’aide », détaille Roy Dupuis. C’est un projet unique au monde. Je suis content d’être là-dedans ! »

QUATRE ANS DE TRAVAIL

Il aura fallu près de quatre ans à Zandel Média, fondée en janvier 2011, pour livrer cet épisode. Ancien producteur chez Ubisoft pour des jeux comme Assassin’s Creed, Prince of Persia et Splinter Cell – « toujours les premiers de la série ; c’est ce que j’aime faire, créer quelque chose de nouveau » –, Simon Tremblay est ensuite passé chez Electronic Arts, où une restructuration l’a incité à lancer sa propre entreprise.

Sa conjointe Flavie, ancienne gestionnaire des ressources humaines chez Sensio et Ubisoft, s’est jointe à lui un an plus tard pour s’occuper principalement du financement. De là, ils ont bien malgré eux dû se résigner à résoudre leur propre problème de type « l’œuf ou la poule ? »

« Les investisseurs sont plus rassurés d’investir dans une technologie que dans un projet, a observé Flavie Tremblay. Nous avons donc commencé par développer la technologie, mais elle était difficile à vendre sans un produit pour en faire la démonstration. Alors nous sommes revenus à l’idée originale. »

Missing doit donc servir à la fois à générer des revenus et à faire la démonstration de la technologie qui lui a permis d’exister. De la même façon, Zandel espère être capable de créer ses propres productions, à commencer par les quatre prochains épisodes de Missing, tout en pouvant en créer d’autres pour le compte de séries télé bien connues – américaines, par exemple.

« Toutes les grandes séries d’aventures ou policières américaines ont un jeu vidéo qui y est lié, mais c’est toujours avec des personnages virtuels, rappelle M. Tremblay. La production pourrait prévoir quelques jours de tournage supplémentaires avec le même décor et les mêmes acteurs pour en faire un jeu. Il y a des économies d’échelle et les amateurs restent plongés dans le même univers. »

SE METTRE EN DANGER

L’expérience de tournage est semblable à celle de n’importe quelle série télé, confie Patrick Hivon, mais, comme utilisateur, le comédien qui interprète le rôle d’Olivier dans Nouvelle adresse avoue avoir adoré son expérience de « jeu ». 

« J’en aurai pris plus ; tout est de bon goût, c’est vraiment un projet de qualité. »

— Patrick Hivon

Roy Dupuis, qui a narré le documentaire L’empreinte et qui a joué dans deux longs métrages d’Onur Karaman, affirme participer à ces premières œuvres pour la qualité des scénarios proposés.

« C’est le projet lui-même qui m’intéresse. Ce n’est pas parce que c’est un premier long métrage. C’est sûr que de travailler sur des petites productions, c’est le fun. C’est plus dangereux. Souvent, dans le danger, il y a quelque chose qui me réveille, qui fait que je me sens plus vivant. »

À mesure que les gens joueront à Missing et le visionneront, Simon Tremblay s’ajustera.

« On peut savoir combien de temps les gens restent coincés, combien d’entre eux se rendent jusqu’à la fin ; ce sont des données qui vont nous permettre de faire des changements, précise-t-il. Mais pour ça, il faut que les gens jouent. Le tournage des quatre autres épisodes en 2015 en dépendra. »

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