Septimus Neverson

ALIAS : DAVID MUNROE

En 1987, Omer Gauthier est chez lui avec son fils Jean-Guy, dans sa maison du nord de Montréal, devant le boisé Saint-Sulpice, près du Centre Claude-Robillard. Deux hommes masqués entrent de force dans la maison, encagoulés et armés.

Les assaillants exigent argent et bijoux.

Un proche des Gauthier, Daniel Métivier, arrive par hasard. Une bagarre éclate, des coups de feu sont tirés. Jean Guy Gauthier, 35 ans, est tué, Daniel Métivier est blessé. Les deux agresseurs s’échappent.

Deux jours plus tard, la police arrête Septimus Neverson, 24 ans, de Pointe-Saint-Charles. Dans sa Cadillac 1978, on retrouve une arme volée. Il est accusé de meurtre. Son complice présumé, Adolphus Vincent Maule, 24 ans, est alors introuvable.

Neverson est jugé coupable de meurtre. La Cour d’appel, citant des irrégularités dans son procès, en ordonne un nouveau, au terme duquel il est déclaré coupable de meurtre non prémédité. Il fait encore appel, en citant les conseils du juge John Gomery au jury qui estimait être dans une impasse, et gagne. Un nouveau procès est ordonné, mais Neverson décide de plaider coupable en 1998 à une accusation réduite d’homicide involontaire.

En 2000, à sa sortie de prison, Septimus Neverson – qui était entré au Canada en 1985 à titre de visiteur – est expulsé du Canada. La Commission de l’immigration cite son long dossier criminel pour justifier son expulsion vers son pays d’origine, Trinité-et-Tobago.

Les liens unissant Septimus Neverson et Montréal auraient dû se rompre pour de bon en décembre 2000, quand son expulsion du Canada a été ordonnée.

Mais Neverson est rusé, explique la source qui, en novembre 2013, s’est présentée à la police pour dénoncer le Trinidadien. Il s’est procuré un passeport sous un pseudonyme, « David Munroe », et il revient périodiquement au pays.

Ce « David Munroe », explique la source en possession de la 626e information, c’est Septimus Neverson.

Et Septimus Nerverson, c’est l’homme que vous cherchez dans les vagues de violations de domicile avec braquage de 2006 et de 2009. Il fait des allers-retours entre son archipel et le Canada.

Les policiers du GECS font alors des vérifications. La photo de ce David Munroe correspond à celle de l’homme qui a acheté l’échelle dans la quincaillerie, celle-là même qui a servi à l’attaque de la rue de Nancy.

D’autres vérifications montrent que « Munroe » était au Canada quand les violations de domicile étaient commises. Et quand il en sortait, les violations de domicile cessaient.

De cet informateur, les policiers apprennent que Septimus Neverson a une fille et une petite-fille à Montréal. C’est sans doute pour cette raison qu’il revient ici. Les enquêteurs s’organisent pour obtenir un échantillon de l’ADN de la fille de Neverson : les analyses montrent que cette femme est fort probablement reliée au suspect dont l’ADN a été retrouvé à Laval, en 2006.

Les policiers en sont désormais convaincus : « David Munroe » est Septimus Neverson, et Septimus Neverson, ressortissant trinidadien de 51 ans, est l’homme qui a commis une douzaine de violations de domicile souvent violentes en 2006 et 2009, tirant quatre fois sur ses victimes et en tuant une.

Par un mandat d’arrêt d’Interpol, Septimus Neverson est appréhendé chez lui par la police, à Port of Spain, la capitale de Trinité-et-Tobago, le 27 février.

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Hier, quand le Service de police de la Ville de Montréal a annoncé la capture de Neverson, le commandant Patrice Carrier du SPVM a expliqué que certaines des victimes se remettent encore péniblement du traumatisme de leur rencontre avec cet assaillant que la police croit être Septimus Neverson. « Il était clairement très violent », a résumé le commandant Carrier.

Un lien unissait-il les cibles de l’auteur de ces violations de domicile, en 2006 et en 2009 ?

« Aucun fil conducteur ne relie les 13 attaques », a affirmé le commandant Carrier, hier.

Un jour, d’ici quelques mois, Septimus Neverson reviendra donc au Canada sous son vrai nom, pour faire face à une série d’accusations, dont meurtre et tentatives de meurtre, sans oublier vol et séquestration.

Septimus Neverson fera donc face, un jour prochain, à 39 personnes que la police considère comme les victimes directes du Trinidadien. Ces personnes ont été informées ces derniers jours de l’arrestation de cet homme diaboliquement efficace.

« J’ai eu une arme pointée sur moi pendant 55 minutes. C’est long », dit Yolaine Carroll, qui est la dernière victime présumée de Septimus Nerverson : sa maison de Dorval fut la dernière ciblée par la vague de violations avec braquage de 2009.

« Je n’ai que des louanges pour la police de Montréal. J’ai même dit à l’enquêteur qui m’a rendu visite : “Vous êtes comme des chiens après un os, pas pour vous insulter, mais vous ne lâchez pas…” »

— Yolaine Carroll, dernière victime présumée de Septimus Neverson

La procédure d’extradition de Septimus Neverson s’enclenchera fin mars, à Port of Spain.

« Je n’ai aucune raison de croire que vous agirez maintenant différemment de la façon dont vous avez déjà agi », a dit la juge Suzanne Lajeunesse de la Commission de l’Immigration à Septimus Neverson, avant de l’expulser en 2000.

Les policiers de Montréal seraient d’accord avec elle.

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