ÉDITORIAL ÉDUCATION

Les leçons du Lab-École

Et si on respirait par le nez ?

La grogne manifestée à l’égard du projet de Lab-École financé par le ministère de l’Éducation du Québec n’est-elle pas à la fois injuste et prématurée ?

Dès avant l’annonce de ce projet novateur, en mars dernier, on a assisté à une levée de boucliers au sein du milieu de l’éducation. Tout particulièrement de la part des syndicats des enseignants, qui ont eu l’impression que des « vedettes » allaient leur « faire la leçon ». C’est ce que le président de la Fédération autonome de l’enseignement avait alors déclaré au Devoir.

L’annonce officielle du projet et le passage récent de ses fondateurs à l’émission Tout le monde en parle a ravivé la colère.

Mais l’idée n’est absolument pas de faire la leçon à qui que ce soit. À la base, l’architecte Pierre Thibault souhaitait se servir de son expertise pour « changer le modèle » de l’école au Québec. Noble mission.

Il a fait équipe avec Pierre Lavoie et Ricardo Larrivée. Le ministère de l’Éducation leur a par la suite alloué un budget de 1,5 million par année, sur deux ans. Ça semble substantiel, mais ça l’est moins si on se rappelle que Québec consacre plus de 17 milliards chaque année à l’éducation.

Et les trois hommes – bénévoles, soulignons-le – ne travaillent pas en vase clos. Quelques dizaines de personnes font déjà partie de leur « lab » et près de la moitié d’entre elles sont issues du milieu de l’éducation. Notons aussi qu’on y retrouve bon nombre de femmes, y compris la directrice générale, Hélène Cyr. Ce n’est pas un boys club, comme ont pu le craindre certains.

On sait que les écoles du Québec ont un urgent besoin d’être repensées. On sait aussi que le gouvernement est en train d’investir des sommes colossales dans la rénovation et la construction de nouveaux établissements scolaires.

L’initiative tombe donc à point nommé. Elle devrait permettre à Québec de mieux investir cet argent.

Et elle servira vraisemblablement de catalyseur : de nombreuses très bonnes idées circulent déjà à travers le réseau, c’est indéniable. D’ailleurs, les trois fondateurs du Lab-École le visitent. Ils prévoient avoir fait le tour d’une cinquantaine d’écoles d’ici les Fêtes.

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C’est vrai qu’on a du mal à mettre de côté le cynisme en pensant aux restrictions budgétaires imposées au secteur de l’éducation ces dernières années. Ou en pensant à quel point on a laissé un problème fondamental du réseau prendre de l’ampleur : l’enseignement à trois vitesses, privé, public et public enrichi.

Mais les fondateurs du Lab-École ne sont pas assez prétentieux pour soutenir qu’ils vont remanier le système scolaire de fond en comble. Ils veulent transformer les écoles pour en faire des milieux de vie exceptionnels.

Leur projet, inspirant, vise à repenser l’environnement physique des établissements scolaires pour favoriser l’apprentissage, mais aussi de saines habitudes de vie, incluant l’alimentation. Leur travail se veut complémentaire à celui des enseignants.

Ils auront à faire leurs preuves, bien sûr. Mais on aurait tout avantage à les épauler plutôt qu’à leur mettre des bâtons dans les roues. Et à reconnaître que leur notoriété et leur capacité de mobilisation risquent fort de les aider à atteindre leur objectif.

C’est vrai, les divers acteurs du milieu de l’éducation ne sont pas assez valorisés. Mais le problème est plus vaste. Le Québec en tant que société n’accorde pas assez d’importance à l’éducation.

L’implication de personnalités publiques dans ce milieu ne devrait surtout pas être considérée comme une insulte faite aux enseignants et autres acteurs du système. 

Au contraire. Ça démontre vraisemblablement que de plus en plus de Québécois, tous secteurs confondus, font de l’éducation une priorité. Et ça, c’est incontestablement une bonne nouvelle.

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Les trois chantiers du Lab-École

1. Aménagement physique

Directeur de chantier : Pierre Thibault

2. Alimentation

Directeur de chantier : Ricardo Larrivée

3. Saines habitudes de vie

Directeur de chantier : Pierre Lavoie

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