Vie de proprio

L’hypothèque, un tremplin pour investir en immobilier

Que l’on possède un condo, un petit plex ou de nombreux logements, la vie de propriétaire immobilier est pleine d’occasions et de préoccupations.

Vous remboursez une hypothèque sur votre résidence depuis quelques années déjà ? Vous avez peut-être les ressources nécessaires pour investir en immobilier sans sortir un seul sou de votre poche.

Les hypothèques sur des biens immobiliers sont des outils beaucoup plus flexibles qu’on le croit. Du moment qu’on a amorcé un remboursement au-delà de 20 % de la valeur de la propriété lors de l’achat, les institutions prêteuses sont ouvertes à bien des scénarios. Les gens qui ont eu à consolider des dettes en savent quelque chose. Les investisseurs immobiliers futés aussi.

Condo sans comptant

Nicolas Leclerc est devenu propriétaire de sa maison à Saint-Jérôme à 19 ans. « Je travaillais, je m’occupais de la maison la fin de semaine, je roulais dans une vieille Honda Civic rouillée. » Cinq ans plus tard, il s’est acheté un condo à Repentigny sans allonger d’argent comptant pour la mise de fonds.

« J’avais remboursé un peu de capital et la maison avait pris de la valeur. On a augmenté le solde de l’hypothèque de 16 000 $ et ça m’a donné ce qu’il fallait pour la mise de fonds d’un condo de 80 000 $ », raconte Nicolas Leclerc, qui travaille 14 jours par mois dans une mine du Grand Nord québécois.

Cinq ans après ce deuxième condo, notre jeune investisseur immobilier s’apprête à répéter le même stratagème : il refinancera ce condo pour acheter une troisième propriété.

Refinancement avec ou sans nouvel acte notarié, garantie hypothécaire collatérale, marge de crédit hypothécaire. Voilà autant de moyens pour dégager des fonds qui peuvent servir à investir judicieusement en immobilier. Mais attention : ces outils sont les mêmes qu’on utilise pour consolider des dettes. Et ils peuvent se retourner contre un propriétaire qui s’en sert de manière irréfléchie.

« Les gens mettent leurs soldes de carte de crédit sur la marge hypothécaire, ils refinancent la maison pour payer et le roulement se fait sans qu’ils n’arrivent à réduire leur endettement. Ça devient un cercle vicieux. »

— Serge Morvan, courtier hypothécaire Hypotheca

Refinancer

Il est possible d’acheter une propriété avec moins de 20 % de mise de fonds. Cependant, lorsqu’on refinance, c’est toujours sur un maximum de 80 % de la valeur d’une propriété.

Un exemple : votre maison valait 300 000 $ à l’achat et vous avez contracté une hypothèque de 240 000 $. Quelques années plus tard, le solde de votre hypothèque est à 200 000 $. Vous pourriez refinancer et mettre la main sur les 40 000 $ que vous avez remboursés à ce jour pour les investir en immobilier ou ailleurs.

Depuis plusieurs années, certaines grandes institutions prêteuses font notarier les hypothèques à 120 % de la valeur de la propriété lors de l’achat.

Si votre propriété vaut maintenant plus cher qu’au moment de l’achat, vous pourriez emprunter jusqu’à 80 % de cette valeur augmentée, sans devoir repasser chez le notaire et payer les frais pour enregistrer une nouvelle hypothèque.

Si votre propriété a été rénovée, que sa valeur a beaucoup augmenté et que vous souhaitez obtenir un maximum de fonds pour un nouveau projet, vous devrez notarier une nouvelle hypothèque. Par exemple, en réhypothéquant une maison achetée à 200 000 $ et qui en vaut 400 000 $ aujourd’hui, vous pourriez disposer de plus de 160 000 $ pour un projet d’investissement.

« À 500 $ ou moins pour l’évaluation de la valeur de la propriété et environ 1000 $ pour l’acte notarié, ces frais liés à un refinancement sont somme toute relativement minimes », souligne Michel Lizotte, directeur principal, Solutions de financement, chez Banque Nationale-Gestion privée 1859.

Dans tous les cas de refinancement, la capacité du client à payer ses emprunts est évaluée. Et un refinancement peut se traduire par des paiements mensuels plus élevés sur l’hypothèque personnelle.

Garantie hypothécaire collatérale

Quand on ne possède pas l’argent comptant pour une mise de fonds pour un achat immobilier, on peut mettre en garantie un autre bien immobilier. Ce peut être notre propre maison, ou celle de parents qui se portent garants. Cette garantie hypothécaire collatérale sera notariée. Elle permet de financer un achat sans comptant.

Le principal avantage d’une garantie hypothécaire collatérale est qu’on évite un refinancement avec frais de notaire sur la propriété qui sert de levier. Cet avantage, qu’on peut chiffrer autour de 1000 $, n’en vaut pas la chandelle, croit Serge Morvan, courtier immobilier hypothécaire agréé. « Le principal problème avec la collatérale, c’est que le jour où vous voulez vous en libérer, c’est le prêteur qui décidera si c’est possible. »

Pour se défaire d’une collatérale, l’hypothèque de la deuxième propriété doit avoir un solde qui correspond à moins de 80 % de la valeur de l’immeuble. Le propriétaire peut estimer que sa propriété a pris suffisamment de valeur pour que ce soit le cas, mais l’évaluateur mandaté par le prêteur pourrait être d’un autre avis, prévient Serge Morvan.

Marge de crédit hypothécaire

Lorsqu’il a appris que sa mère allait devoir se trouver un nouveau logement, François Laferrière a eu une idée : acheter un condo et le lui louer.

Propriétaire d’un condo à L’Épiphanie depuis 2012, François Laferrière a décidé d’extraire de sa marge de crédit hypothécaire les fonds nécessaires pour la mise de fonds sur un condo à Saint-Roch-de-l’Achigan, qu’il a aussitôt loué à sa mère et à son conjoint.

« Je rends service à ma mère et elle me rend service en étant ma locataire. Je le vois comme un investissement sûr. »

— François Laferrière

À 4,55 %, le taux d’intérêt de la marge de crédit hypothécaire de François Laferrière est plus élevé que celui d’une hypothèque à taux fixe ou variable. Ce policier et nouvel investisseur immobilier a l’intention de rembourser sa marge de crédit rapidement. Comme le condo a été acheté largement en dessous de sa valeur marchande, il compte le refinancer prochainement pour s’acheter un triplex.

Une marge de crédit hypothécaire peut être utilisée pour des rénovations ou l’agrandissement d’une propriété locative. Elle peut aussi servir à acheter ou construire un chalet, ou pour un projet d’autoconstruction qui exige des dépenses à plusieurs étapes, illustre Michelle Lizotte.

« Avec la marge de crédit, on paie des intérêts, mais on n’a pas l’obligation de rembourser le capital, souligne Michel Lizotte. Une fois un projet terminé, on peut le refinancer, ou on peut transférer le solde de la marge de crédit dans une nouvelle tranche de notre hypothèque résidentielle, à taux fixe ou variable. »

La marge de crédit hypothécaire est offerte avec les hypothèques dites « parapluies ». On l’appelle aussi « crédit rotatif ». De l’argent devient disponible dès que le capital versé à l’achat ou remboursé au prêteur atteint 20 % du prix payé pour la propriété.

Que ce soit avec une marge de crédit ou un refinancement, il est très important de ne faire qu’un seul usage (personnel ou investissement) pour chaque prêt ou tranche de prêt. Dans la déclaration d’impôt, les intérêts seront traités différemment s’ils sont générés par un prêt personnel, un prêt pour investir ou un prêt pour l’entretien d’un immeuble. Un spécialiste hypothécaire peut offrir quelques conseils, mais il est préférable de consulter un comptable ou un fiscaliste. Mieux vaut être bien informé avant de se lancer dans ce genre de projets. Et il faut bien faire ses calculs pour éviter de se retrouver dans une situation pour le moins fâcheuse.

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