Budget provincial Éditorial

À la santé des aînés

La santé, qui se taillait déjà la part du lion du budget québécois, voit son importance encore renforcée dans le premier budget Legault.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux est en effet celui qui bénéficie de la plus importante augmentation de dépenses, en dollars comme en pourcentage. Ce réinvestissement, aussi substantiel soit-il, ne pourra évidemment pas colmater toutes les fissures du système. Certains seront déçus de ne pas y trouver réponse à leurs demandes, mais pour espérer avoir un impact sur ce gigantesque réseau, il faut savoir éviter la tentation du saupoudrage et choisir ses batailles. Prioriser les soins aux aînés, trop longtemps négligés, est un choix plus que défendable.

« Prendre soin des aînés » : tel est le premier objectif énoncé en santé par le ministre des Finances, Eric Girard, dans son premier plan budgétaire dévoilé hier à Québec. La formule rappelle celle employée à l’égard des immigrants ; mais pour les aînés, la CAQ ne peut pas promettre d’en « prendre moins, mais en prendre soin ».

Le Québec étant la province où le vieillissement de la population est le plus marqué, le nombre d’aînés et leurs besoins augmenteront de façon importante au cours des prochaines années.

Et même si une fraction de ceux-ci iront en CHSLD, un gouvernement qui nage dans les surplus ne peut pas décemment fermer les yeux sur les conditions déplorables dans lesquelles trop d’entre eux sont actuellement hébergés. Des 860 millions prévus sur quatre ans afin d’ajouter des heures de personnel soignant dans le réseau, une partie servira à donner un peu d’oxygène aux CHSLD. Un apport bienvenu… à condition que les établissements arrivent à recruter. Les conventions collectives étant toujours en vigueur, aucun investissement n’a encore été annoncé pour bonifier les conditions de certains postes difficiles à pourvoir, comme ceux de préposés aux bénéficiaires. Le sujet s’imposera de lui-même lors des prochaines négociations.

Les soins et services à domicile ont toujours été sous-financés. Les 280 millions additionnels annoncés pour chacune des quatre prochaines années suffiront-ils à répondre aux besoins ? Il faudra voir. Mais on ne pourra pas accuser la CAQ de lésiner sur ses engagements : son cadre financier présenté en campagne électorale promettait seulement 200 millions par an.

Si l’augmentation du nombre de places, de lits et d’heures de soins aux aînés s’annonce relativement facile à suivre, l’impact des sommes supplémentaires allouées à l’amélioration des services directs, l’autre priorité de ce budget en santé, est loin d’être aussi clair.

Hormis les ajouts de personnel soignant, dont une partie ira aux hôpitaux, les sommes sont réparties entre une grande variété de missions : accès à la première ligne, cliniques d’hiver, infirmières praticiennes spécialisées (IPS), organismes communautaires, services aux jeunes, etc. Ces marges de manœuvre seront certainement appréciées des gestionnaires, mais l’impact sur l’ensemble de la population ne sera pas instantané, loin de là.

Le budget de la Santé et des Services sociaux bénéficiera d’une augmentation exceptionnelle de 5,4 % au cours de la prochaine année, mais sa progression reviendra à un rythme plus modéré de 4,1 % dès l’année suivante. Ce n’est pas négligeable, mais sachant que les coûts de système nécessitent, à eux seuls, une augmentation des ressources de 3,8 % par an en moyenne, mieux vaut modérer ses attentes. Les effets bénéfiques, à l’image des réinvestissements, risquent de se faire sentir de façon plutôt cumulative qu’immédiate.

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