Sécurité routière

Des milliers d’accidents causés par un TDAH mal traité

Des milliers d’accidents automobiles surviennent chaque année aux États-Unis parce que des adultes ayant un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ne prennent pas de médicaments, selon une nouvelle étude suédo-américaine. Transposés aux Québec, ces résultats signifient que de 300 à 400 personnes sont blessées et que quelques-unes meurent sur les routes chaque année pour cette raison.

« Plusieurs études ont montré que le risque d’accident de la route était beaucoup plus élevé chez les conducteurs ayant un TDAH », explique Zhen Chang, épidémiologiste psychiatrique de l’Institut Karolinska de Stockholm et à l’Université de Chicago, qui est l’auteur principal de l’étude publiée à la mi-mai dans la revue JAMA Psychiatry

« Mais une seule a testé si la prise de médicaments réduisait le risque d’accident, à partir de données suédoises, et il subsistait des zones d’ombre. Nous apportons une preuve assez solide de ce lien avec des données américaines. »

En comparant les dossiers de conduite entre 2005 et 2014 de 2,3 millions d’Américains ayant un diagnostic de TDAH avec ceux d’un nombre comparable d’Américains sans TDAH, l’équipe du Dr Zhang a calculé que le risque d’accident est supérieur de 45 % chez les conducteurs avec TDAH. Or, l’augmentation n’était que de 35 % pour les conducteurs avec TDAH qui prennent des médicaments. Cela signifie qu’aux États-Unis, de 20 000 à 30 000 blessés de la route sont dus à un TDAH non traité par médicaments.

Ces chiffres sous-estiment probablement l’effet bénéfique des médicaments, estime M. Chang. C’est que l’autre étude sur le traitement pharmaceutique du TDAH et les accidents avait observé que ces derniers augmentent tard le soir, moment où s’estompe l’effet des médicaments. « Cet effet rebond dilue probablement l’association entre absence de traitement pharmaceutique du TDAH et accidents routiers. »

Des bénéfices indéniables

D’autres études sur le sujet avaient aussi trouvé un risque encore plus élevé d’accidents routiers, et des bénéfices encore plus marqués de la prise de médicaments. La première étude sur le sujet, publiée en 1993, estimait que le TDAH triplait, voire quadruplait le risque d’accident.

« C’est une étude magistrale qui établit clairement les bénéfices de la médication TDAH sur le bilan routier », estime Truls Vaa, économiste de l’Institut d’économie des transports de Norvège qui a publié en 2014 dans la revue Accident Analysis and Prevention une étude sur les accidents de la route liés au TDAH. L’opinion de M. Vaa est importante parce que son étude est celle qui met au jour la hausse la plus faible du risque d’accident de la route chez les conducteurs avec TDAH, soit seulement 23 %.

M. Zhang veut maintenant examiner s’il y a une différence chez les conducteurs ayant un diagnostic de TDAH seulement à l’âge adulte et si un changement de médication augmente ou diminue le risque. M. Vaa ajoute qu’il faut aussi mieux comprendre le mécanisme de la réduction du risque par les médicaments, l’impact des autres diagnostics psychiatriques souvent associés au TDAH, comme les troubles de comportement ou d’opposition, ainsi que la tendance – inexpliquée – des patients TDAH à conduire davantage que la moyenne de la population.

« On sait notamment que l’hyperactivité associée au trouble du déficit de l’attention a tendance à diminuer à l’âge adulte, dit M. Vaa, joint à Oslo. Est-ce que les médicaments aident davantage les adultes qui ont encore de l’hyperactivité ? »

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