CHRONIQUE

La crise du cône orange

On appelle ça l’instantanéité du web. Après seulement quelques minutes en ondes mardi soir, les commentaires acides ont commencé à corroder la mouture flambant neuve du TVA Nouvelles de 22 h. La désagrégation a été ensuite fulgurante.

Four monumental ! Cacophonie catastrophique ! C’est la mort de « l’information crédible » dans les bulletins de fin de soirée !

La cour des réseaux sociaux venait de rendre son verdict, sans appel : c’était pourri. Il fallait non plus se porter au secours de Béatrice, mais bien de Sophie Thibault, qui se noyait dans une mer de bébelles (cône orange, ruban à mesurer, boîte de sardines). Même Colette Provencher avait été sacrifiée, tout comme les – interminables – numéros du Banco.

Effectivement, la première diffusion de ce Salut, bonsoir ! a été pénible à regarder avec sa ribambelle d’accessoires de plateau. Le lendemain, c’était déjà franchement meilleur. Le jour et la nuit, en fait. Les panélistes avaient rangé leurs chapeaux de clown, cessé de s’interrompre et traitaient de sujets d’actualité autrement pertinents que les déboires de Justin Bieber.

En 24 heures seulement, Sophie Thibault maîtrisait déjà mieux l’art du tutoiement, qui semblait l’agacer profondément au départ. La météo a été réinstallée en fin d’émission. Les combinaisons du loto aussi. Et TVA procédera inévitablement à d’autres ajustements dans les prochaines éditions, c’est clair comme une balle de tennis jaune fluo.

Car ce type de talk-show d’information, qui n’existe sur aucune autre chaîne, se construit par essais et erreurs. Personne n’en connaît la recette. TVA a voulu concocter une première version très populiste, ouvrant la porte à ses nombreux détracteurs naturels.

Bien sûr, c’était bourré de gadgets inutiles et de complicité feinte. Il ne faut jamais forcer la camaraderie sur un plateau.

Rien ne sonne plus « faux » que deux chroniqueurs qui font semblant de trouver rigolo le propos du camarade assis à côté. La convivialité s’installera graduellement, au fil des semaines.

TVA a bien fait de délaisser l’approche 110 % pour se rapprocher du ton plus posé du 24 heures en 60 minutes d’Anne-Marie Dussault à RDI, avec quelques opinions en garniture. Mario Langlois et Michel Girard, respectivement chroniqueurs sportif et économique à ce TVA 22 h, ont rapidement trouvé la bonne façon de livrer un message crédible et solide assaisonné d’une pincée d’humour. Le dosage était parfait.

Le problème, c’est que l’édition très showbiz du TVA 22 h de mardi a rallié près de 500 000 téléspectateurs. Le mercredi, en mode moins clinquant et plus classique, les cotes d’écoute du bulletin nouveau genre ont dégringolé à 383 000 curieux. Difficile de déterminer alors ce qui hameçonne le public. L’opinion ou les faits bruts ? Les bonzes de TVA doivent se poser des tonnes de questions.

Il est extrêmement facile de taper sur le « buzz du jour » proposé par Maxime Landry ou sur la présentation « plus dynamique que jamais », dixit Sophie Thibault. Il est autrement compliqué de dénicher des solutions pour freiner l’érosion des cotes d’écoute de ces journaux télévisés de fin de soirée. Faudrait-il reprendre la cadence plus rapide du 18 h de Pierre Bruneau ?

Sophie Thibault devrait-elle livrer elle-même davantage de nouvelles plutôt que de céder constamment l’antenne à Maxime Landry ? Faudrait-il mettre plus en valeur les reporters de TVA qui fouillent les histoires sur le terrain ? Je pense que oui.

Le statu quo n’est plus possible. Les chaînes spécialisées grugent l’auditoire à 22 h et Éric Salvail en récupère une bonne partie avec son talk-show chez V. Il faut bouger.

Radio-Canada avait aussi annoncé une grande refonte de son Téléjournal de 22 h. En excluant quelques changements cosmétiques, personne n’est tombé en bas de son sofa en regardant Céline Galipeau dans son nouveau décor cette semaine. Si TVA s’est payé un lifting total à 22 h, la SRC n’a tâté que du Botox.

On sait maintenant que le TVA 22 h rempli de rires complices ne fonctionne pas. On sait que le TVA 22 h en format plus RDI ne marche pas non plus. On sait par contre que Sophie Thibault n’a pas passé une semaine reposante.

JE LÉVITE

Avec le film Snowpiercer

Vous cherchez une superproduction de samedi soir, dans la lignée de District 9 et World War Z ? Alors louez Snowpiercer du réalisateur coréen Bong Joon-ho. La distribution est formidable, particulièrement Tilda Swinton dans le rôle de la vilaine. Nous sommes en 2031 dans un train qui contient la totalité des survivants d’une nouvelle ère glaciaire. Les plus démunis, qui vivent dans la queue du train, fomentent une révolte pour accéder aux wagons de luxe à l’avant. Et ça brasse.

JE L’ÉVITE

Le slogan de Downy

Sans ironie, sans deuxième degré, le rehausseur de parfum pour lessive Downy Unstopables nous conseille ceci : « Downy-lui de la magie. » Comme dans : donnez-lui de la magie. La jeune femme dans la publicité, dont les vêtements sentent sûrement le « rêve » ou l’« éclat », a l’air hyper convaincue de l’efficacité du produit et du slogan. Pas moi. Downy-moi plutôt de l’oxygène.

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