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L’offensive à contre-courant de Structube

Mener une entreprise, c'est avant tout une affaire de stratégie. Chaque vendredi, des dirigeants révèlent quelques éléments de leur plan d'action et de leur vision.

Un peu partout les magasins rapetissent, les magasins ferment… Et pendant ce temps, Structube prépare l’inauguration d’un nouveau concept de magasin cinq fois plus vaste que ses autres, en plus d’avoir 20 projets dans ses cartons qui devraient se concrétiser d’ici deux ans. Qu’est-ce qui motive cette direction hyperactive et à contre-courant ?

Pendant les 40 premières années de son existence, la croissance de Structube fut modeste. La chaîne de magasins de meubles faisait assez peu parler d’elle, se démarquait plus ou moins des concurrents. Le propriétaire, Marcel Knafo, ouvrait en moyenne un magasin par année.

Depuis deux ou trois ans, c’est tout le contraire. Les affaires de l’entreprise établie dans l’arrondissement de Saint-Laurent explosent. M. Knafo calcule que ses ventes augmenteront de 30 % cette année.

Ce bond énorme s’explique notamment par la multiplication du nombre de magasins d’un bout à l’autre du Canada, des efforts marketing décuplés, un virage omnicanal grâce à l’implantation d’un nouveau système informatique et le lancement d’un site web transactionnel pour le marché américain en 2016. Le nombre de produits est par ailleurs passé de 1200 à 4000.

Initiative audacieuse

Mais l’initiative la plus étonnante et audacieuse est sans nul doute la réduction des prix, d’un seul coup, de 20 à 30 % (en 2016). N’était-il pas imprudent de mettre une telle pression sur les marges ? « C’est vrai que c’était assez risqué, admet Marcel Knafo. Mais on l’a fait de façon contrôlée. »

« Si on baisse le prix d’un produit pour lequel il n’y a pas de demande, il ne se vendra pas. Nous on avait une belle sélection, le problème qu’on avait, c’était le prix. »

— Marcel Knafo, propriétaire et président de Structube

Les résultats ne se sont pas fait attendre. Certains magasins ont vu leurs ventes doubler du jour au lendemain. « Avant ça, les gens regardaient. Après [les baisses de prix], ils achetaient », rapporte le directeur du marketing Tony Trew, précisant que le taux de conversion des visiteurs en acheteurs a triplé.

Résultat, deux entrepôts supplémentaires ont dû être loués (en 2016 et 2017) pour soutenir la hausse de volume car tous les stocks sont achetés d’avance par le détaillant. Mais ce n’est pas encore assez. Comme nous l’avons annoncé à la fin du mois d’octobre, Structube a acquis un immense terrain à Laval pour y construire un immeuble qui abritera (dès 2018) un entrepôt, le siège social et un vaste magasin. Le projet est évalué à 80 millions de dollars.

L’importance d’agir

Marcel Knafo ne va pas jusqu’à dire que le statu quo mettait son entreprise en péril. Mais il convient que l’internet, ce « nouveau joueur qui a perturbé tout le marché » lui a fait réaliser que « c’était important d’agir ». Qu’il a « dû prendre des décisions ».

Cela dit, il veut continuer de bâtir des magasins de briques et mortier « proches des clients ». « Je crois vraiment que la formule gagnante aujourd’hui et la combinaison de magasins physiques et en ligne », dit l’homme d’affaires de 67 ans, tout juste de retour d’un voyage en Asie pour y faire des achats. Les « pure players » comme Mayfair « ne sont pas profitables malgré de gros volumes d’affaires », rappelle-t-il.

Non seulement les nouveaux Structube ouvrent-ils à la vitesse grand V, mais les consommateurs découvriront aussi début décembre un nouveau concept pratiquement cinq fois plus vaste que les autres, le seul de la chaîne pouvant contenir 100 % de la collection.

Ce nouveau magasin est en construction sur le boulevard Métropolitain, près du boulevard Lacordaire. Il s’agit d’un investissement de 9 millions. « C’est l’aboutissement du rêve que j’avais au début de l’entreprise qui est d’offrir une belle gamme de produits abordables », se réjouit M. Knafo qui veut en construire des similaires dans plusieurs villes canadiennes, en plus de traverser aux États-Unis.

« Le H & M du meuble »

La personnalité de Structube est claire. « On est les Zara et H & M du meuble », résume la directrice de la création Émilie Tardif, rencontrée sur le chantier de construction.

« On veut offrir des nouveautés plus rapidement que les autres, renchérit Tony Trew, estimant qu’IKEA a le beau jeu. Il manque d’options au Canada dans le meuble. Les gens sont un peu prisonniers d’IKEA. Et chez IKEA, il manque de diversité. Leurs gammes changent lentement ; ils ont encore les mêmes lits et les mêmes sofas que lorsque j’étais jeune ! »

D’ailleurs, Structube ne s’en cache pas, avec son magasin du boulevard Métropolitain, il se rapproche de son concurrent IKEA qui ne lui fait pas peur. « C’est important d’avoir cette ambition pour arriver quelque part, croit M. Knafo. Il faut se donner des objectifs difficiles. »

Et il s’en donne : l’entrepreneur ambitionne d’exploiter 100 magasins au Canada et de 50 à 70 aux États-Unis d’ici cinq ans. Des locaux potentiels en Nouvelle-Angleterre ont déjà été repérés.

Structube en bref

Fondation : 1974

Ventes : 85 millions en 2015 (Donnée plus récente confidentielle)

Près de 900 employés

Magasins : 60 d’un bout à l’autre du Canada

Entrepôts : 3

Forces

• Prix concurrentiels, vaste sélection de marchandise

• Magasins en milieu urbain

• Plateforme de commerce électronique performante qui génère 20 % des ventes

Faiblesses

• Un réseau de distribution causant parfois des temps d’attente plus longs pour les consommateurs et les magasins établis dans l’ouest du Canada et les États-Unis

• Gamme de produits trop vaste pour être exposée au complet dans les magasins en raison de leur étroitesse

• Pas de présence encore dans tous les marchés au Canada

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