73 000 DÉPLACEMENTS MOTORISÉS PAR JOUR

L’aéroport de Montréal génère 73 000 déplacements motorisés chaque jour dans les périodes de pointe, un chiffre qui devrait augmenter à 105 000 d’ici 2030, affirme ADM dans un mémoire récent. Selon l’autorité aéroportuaire, cette augmentation prévue du trafic routier – alors que le réseau montréalais est déjà congestionné – milite en faveur de la mise en service d’un lien ferroviaire, qui doit aussi rejoindre l’Ouest-de-l’Île. ADM s’attend à ce qu’un train entre l’aéroport et le centre-ville attire environ 10 000 passagers par jour, contre 4000 aujourd’hui pour le service d’autobus 747, qui n’est « pas express, ni fiable ». ADM penche en faveur d’un train électrique de même nature que celui qui a été mis en service à Vancouver en 2009.

AÉROPORT MONTRÉAL-TRUDEAU

Une gare… mais pas de train

Avec son plafond cathédrale d’une hauteur de 13 mètres, ses colonnes imposantes et sa facture de 25 millions, le stationnement situé sous l’hôtel Marriott de l’aéroport Montréal-Trudeau est l’un des plus monumentaux jamais construits dans la métropole. Et pour cause : sa vocation première est de servir… de gare de train.

Aéroports de Montréal (ADM) a profité de travaux en 2008 pour construire la coquille de la gare du train qui doit relier l’aéroport au centre-ville. D’ici à ce qu’un projet soit lancé, ce qui est loin d’être garanti, les lieux servent à garer une centaine de voitures. Une façon de rentabiliser cet investissement en attendant le grand jour.

« C’était le seul endroit central près du cœur de l’aéroport où nous aurions pu installer une gare, explique James Cherry, grand patron d’ADM, pendant une visite des lieux. Nous avons prévu le coup en achetant une option à 25 millions ! »

Cet investissement s’inscrit dans le vaste plan de modernisation de 2 milliards entamé par ADM au tournant des années 2000. Construction d’une jetée américaine, d’un nouveau hall des douanes, multiplication des bornes libre-service : l’aéroport, longtemps conspué par les voyageurs, a subi une véritable métamorphose depuis 15 ans. Mais un écueil de taille demeure, et il n’est pas près d’être réglé : la difficulté d’accès.

« Depuis les améliorations que nous avons faites, le problème le plus important qu’on nous mentionne, et de loin, c’est l’accès. Le problème du rond-point, le temps que ça prend entre le centre-ville et l’aéroport, les sorties… »

— James Cherry, PDG d’Aéroports de Montréal

PATIENCE, PATIENCE

Les travaux de reconstruction de l’échangeur Dorval – ce spaghetti de routes et de ponts d’étagement à moitié achevé à l’entrée de l’aéroport – ont débuté en 2005. L’échéancier a été repoussé à plusieurs reprises et les coûts ont explosé à plus de 500 millions. Depuis cinq ans, plus rien ne bouge, ou presque.

La pièce maîtresse de cet ouvrage kafkaïen est un pont à moitié construit que James Cherry appelle en souriant le « bridge to nowhere ». Après de nombreux retards, celui-ci devrait enfin être achevé d’ici la fin de 2017, avance Sarah Bensadoun, porte-parole du ministère des Transports. Un appel d’offres se déroulera sous peu pour trouver un entrepreneur.

Le PDG de l’aéroport se dit soulagé. Mais ce déblocage prévu des travaux ne réglera pas les problèmes de congestion chronique du réseau routier montréalais, qui compliquent chaque année davantage l’accès à l’aéroport Trudeau. D’où la nécessité absolue de se doter d’un train vers le centre-ville, insiste James Cherry.

PAS AVANT 2021

Après des décennies de tergiversations, la possibilité de voir un lien ferroviaire voir le jour semble plus concrète qu’elle ne l’a jamais été. La Caisse de dépôt et placement du Québec s’est engagée en janvier 2015 à mettre en place un modèle d’affaires « novateur » pour financer de grands projets d’infrastructures, dont un train léger entre l’aéroport et le centre-ville de Montréal, et un autre vers la Rive-Sud. La facture totale est estimée à 5 milliards.

Or, même si le projet devait être lancé cette année, il mettra au moins cinq ans à se réaliser. On ne peut donc espérer un train vers Montréal-Trudeau avant 2021 au plus tôt, dit M. Cherry. « On attend leur décision finale. C’est un projet complexe, ce n’est pas simple. Nous attendons depuis déjà quelques décennies ; attendre encore quelques mois, ce n’est pas la fin du monde. »

À la Caisse de dépôt, on indique que tous les scénarios sont étudiés à l’heure actuelle. Mais rien ne garantit qu’un projet ira de l’avant si l’organisme n’entrevoit pas un rendement suffisant.

« Les études d’achalandage et d’ingénierie sont en cours de réalisation, dit le porte-parole Maxime Chagnon. D’ici environ 12 mois, on va être en mesure de faire nos recommandations au gouvernement, après voir évalué un paquet d’éléments, entre autres la faisabilité et la rentabilité des projets. »

Chose certaine, ADM sera prêt à bouger rapidement si l’État donne son feu vert. Pendant notre visite, James Cherry nous montre le mince mur qui sépare la future gare de train du terminal principal de l’aéroport. Il semble convaincu que cette fois-ci sera la bonne. « Ce n’est jamais fini avant qu’ils ne commencent à creuser, mais ils dépensent de l’argent, ils regardent toutes les options. Je n’ai rien entendu à ce jour qui laisse croire qu’ils n’ont pas l’intention d’aller de l’avant. »

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