Analyse

Les jambes de Disco Dan étaient « vachement bonnes » !

Ça fait changement de Peter Sagan ou Fernando Gaviria. Après le règne sans partage des sprinteurs slovaque et colombien, Dan Martin a insufflé un peu de variété et de spectacle dans le Tour de France en gagnant la sixième étape, hier.

Dans le plus dur de Mûr-de-Bretagne, à 1200 mètres de la ligne, l’Irlandais de la formation des Émirats s’est extirpé d’un groupe sélect et a su résister au retour du Français Pierre Latour (AG2R).

Beau retour du balancier pour Martin, deuxième sur la même arrivée en 2015, derrière Alexis Vuillermoz, un autre AG2R (28e hier).

« J’ai pensé à ça toute la journée, a avoué le vainqueur en français. Ça m’avait fait plaisir d’être deuxième en 2015. Mais quand on est si proche de la victoire, c’est dur. Je savais la tactique, mais j’avais peur d’attaquer seul avec un vent de face… »

Grand coureur de classiques, avec deux monuments à son palmarès (Liège-Bastogne-Liège 2013, Tour de Lombardie 2014), le coureur de 31 ans brille aussi dans les courses par étapes, à l’image de son oncle Stephen Roche, champion mondial et vainqueur du Tour et du Giro en 1987.

L’an dernier, sous les couleurs de Quick-Step, Martin a terminé sixième du Tour après avoir été la victime collatérale de la chute dramatique de Richie Porte dans la descente du mont du Chat.

Ironiquement, le même Porte (BMC) tirait le groupe quand Martin a bondi : « Je me suis dit : pourquoi ne pas essayer ? Quand j’ai attaqué, j’avais du jus. Les jambes étaient vachement bonnes, quoi ! »

Manifestement en jambes, Porte a poursuivi son effort sans que personne daigne (puisse ?) le relayer. Libéré de ses obligations envers son coéquipier Romain Bardet, ralenti sur bris mécanique, un très bon Latour a tenté sa chance à droite de la route, mais il a échoué par une seconde, tapant sur son guidon en traversant le fil.

Trop patients, l’Espagnol Alejandro Valverde (Movistar) et le Français Julian Alaphilippe (Quick-Step), les deux principaux favoris, ont fini respectivement troisième et quatrième à trois secondes. Ils faisaient partie d’un groupe de 14 comprenant la plupart des prétendants au général, en plus de Sagan (8e) et de Greg van Avermaet (12e), qui a gardé son maillot jaune en dépit des grandes manœuvres de Quick-Step (voir plus bas).

Si l’acte de bravoure de Dan Martin, surnommé Disco Dan, a mis un peu de suspense dans le final, l’action à l’arrière avait autant, sinon plus, d’intérêt.

D’abord, le Néerlandais Tom Dumoulin a subi un bris de roue avant les 5 km au moment où le peloton roulait à plein régime. Il a perdu 50 secondes sur les favoris… avant d’écoper une pénalité de 20 secondes pour abri prolongé derrière sa voiture d’équipe. Le vainqueur du Giro 2017 est donc passé du 7e au 19e rang au général.

Bardet a vécu une malchance similaire (roue arrière cassée) peu avant la montée. Sur le vélo (trop bas) de son coéquipier, le Français s’est démené pour revenir avant de céder une trentaine de secondes dans le mur. « Ce sont les aléas de la course », a philosophé, tête basse, l’homme aux deux podiums qui pointe désormais 23e à 1 min 45 s du maillot jaune. En gros, Dumoulin et lui ont perdu tous leurs acquis des trois premiers jours.

Chris Froome ? Il n’aura échappé à personne qu’il a été décroché dans les derniers hectomètres, contrairement à son coéquipier Geraint Thomas, désormais deuxième grâce à une bonification de deux secondes. Le quadruple vainqueur n’a perdu qu’une poignée de secondes (comme Rigoberto Urán, du reste), mais ce genre de faille sur un effort pur n’est vraiment pas dans ses habitudes. À suivre avec attention.

Avant l’étape de Roubaix, celle que tout le monde attend dimanche, deux journées pour les sprinteurs, à commencer par un très long parcours de 231 km entre Fougères et Chartres, aujourd’hui, où Dylan Groenewegen s’imposera, parions une caisse de Heineken là-dessus.

Roglič dans la bordure

Avec une chance de gagner l’étape et de prendre le maillot jaune, les Quick-Step ont provoqué un coup de bordure par un vent de côté à un peu plus de 100 kilomètres de l’arrivée. La manœuvre a fonctionné et mis à mal quelques leaders, dont Nairo Quintana, Dan Martin et Jakob Fuglsang, qui ont eu chaud pendant une dizaine de kilomètres. Primož Roglič a mis le double de la distance avant de revenir dans le peloton principal grâce à ses coéquipiers de LottoNL-Jumbo. À peine de retour, le Slovène a chuté en tentant de passer par-dessus un terre-plein. Rien de trop glorieux pour un ancien champion de saut à ski… qui a quand même pris la 10e place de l’étape.

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