Exclusif Étude

Aider les futures mères à mieux se nourrir est rentable, conclut une étude

Donner des œufs, du lait et du jus d’orange aux femmes enceintes dans le besoin, comme le fait la Fondation OLO, c’est efficace. Une étude réalisée par Catherine Haeck et Pierre Lefebvre, de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, vient de le prouver.

« Assurément, c’est un programme rentable », dit Mme Haeck, qui a publié ses résultats dans la revue scientifique Labour Economics. Les deux chercheurs ont comparé les bébés ayant bénéficié d’un suivi OLO (aliments, multivitamines et conseils donnés aux femmes enceintes en situation financière précaire) à ceux qui n’ont pas eu cette chance, même si leur mère était aussi sous le seuil de faible revenu, entre 1986 et 2008.

Résultat ? « On a détecté un impact important sur le poids à la naissance, qui était en moyenne supérieur de 70 g chez les bébés OLO », indique Mme Haeck. Une initiative américaine au coût comparable, nommée WIC, n’entraîne que des gains de poids de 30 à 50 g par bébé. « WIC est considéré comme un bon programme, mais OLO a un impact presque deux fois plus important », observe la professeure.

Économie de 91 $ par bébé

La probabilité que les bébés soient de faible poids – c’est-à-dire moins de 2500 g à la naissance – baisse aussi quand les mères ont droit à OLO. « Il y a 3,6 bébés de petits poids de moins sur 100 parmi les enfants OLO », dit Mme Haeck.

« Le bénéfice vient de là, puisque les coûts néonatals sont importants pour les bébés de petit poids. »

— Catherine Haeck, professeure à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM

Les coûts néonatals étaient d’environ 600 $ par bébé de faible poids en 2005, alors que le suivi OLO valait 509 $, ont calculé les chercheurs. « Ça donne 91 $ d’économie par enfant, en moyenne », souligne Mme Haeck. La somme épargnée est sans doute plus importante, puisque les bébés de petit poids peuvent avoir besoin d’un suivi médical après leur sortie de l’hôpital. D’autres études ont, par ailleurs, lié le faible poids à la naissance à un parcours scolaire plus difficile.

L’effet d’OLO sur la durée des grossesses a aussi été mesuré, démontrant un gain de 1,5 jour, qui n’a pas été jugé significatif.

C’est grâce aux statistiques disponibles sur 1,5 million de nouveau-nés québécois que cette recherche a pu voir le jour. « L’accès aux données pour les chercheurs permet de répondre à des questions importantes pour le bien-être collectif », plaide Mme Haeck.

Toutes les futures mères pauvres n’y ont pas droit

« Cette étude, c’est un cadeau, commente Élise Boyer, directrice générale de la Fondation OLO. On a beau y croire, avoir des résultats validés, indépendants, qui montrent que ça fonctionne et que c’est rentable rapidement, c’est sûr que c’est puissant. Parce qu’on doit toujours convaincre les gens. »

Plus de 200 000 bébés ont bénéficié de l’appui d’OLO au Québec, depuis 25 ans. Mais certaines mères dans le besoin n’y ont toujours pas droit. « Il y a des territoires, particulièrement dans l’île de Montréal et un peu en périphérie, où il y a tellement de pauvreté que ce ne sont pas toutes les mamans qui sont sous le seuil de faible revenu qui réussissent à avoir le suivi, déplore Mme Boyer. D’autres critères sont pris en compte. Dans un monde idéal, les ressources financières et humaines devraient suffire pour que ce ne soit pas le cas. »

« OLO, c’est un programme ciblé qui fonctionne, dans lequel il vaut la peine d’investir », résume Mme Haeck. Pour la petite histoire, c’est un article de La Presse portant sur OLO qui a piqué la curiosité des chercheurs, les poussant à enquêter sur sa rentabilité. La boucle est bouclée, comme un œuf bien rond.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.