Musique

L’univers Nevsky

Alex Nevsky a connu son été le plus occupé, sur le plan professionnel. L’auteur-compositeur-interprète a donné une quarantaine de spectacles partout au Québec. Il nous présente une dizaine de photos prises lors de cette tournée. Bienvenue dans son univers. 

— Véronique Lauzon, La Presse

ÉDITORIAL LA FORCE DE L’IMAGE

Voir peut faire mal

La photo raconte, témoigne, dénonce. Par sa puissance, elle peut ébranler, déstabiliser, choquer, au point où certains vont jusqu’à remettre en question sa publication. Même dérangeante, la photo est pourtant nécessaire.

Ce n’est pas tant l’image qui est choquante que tout ce qu’elle représente et qu’on préfère nier. Car la réalité peut faire mal.

Le regard que nous posons sur une photo est relatif. Il diffère selon nos valeurs, notre culture et la distance qui nous sépare de l’événement. On peut se demander si une photo qui a heurté les sensibilités à l’époque aurait le même effet aujourd’hui.

Nick Ut a ainsi frappé l’imaginaire avec cette photo montrant une fillette (Kim Phuc) brûlée par des bombes au napalm. Certains ont même affirmé qu’elle a contribué à la fin de la guerre au Viêtnam. C’est un raccourci, mais il est indéniable que cette image immortalisant l’horreur et la détresse a joué un rôle.

Pourtant, elle a failli n’être jamais publiée. La direction du New York Times a tergiversé quatre jours, craignant que la nudité de l’enfant ne suscite un tollé.

Avec sa photo prise au Soudan, en 1993, Kevin Carter a obtenu un Pulitzer, mais a aussi été vilipendé. N’aurait-il pas dû secourir l’enfant décharné, guetté par un vautour ? Cette image a pourtant contribué à sensibiliser l’opinion publique à la guerre civile et à la famine qui frappait cette région du monde. Des années plus tard, l’histoire nous apprendra qu’au moment de la photo, l’enfant était pris en charge avec sa famille par un organisme d’aide humanitaire. Ce n’est pas la famine, mais une violente fièvre qui l’a tué, 14 ans plus tard. Kevin Carter, lui, n’a pas survécu. Il s’est suicidé en 1994, hanté par les souvenirs de ses reportages.

Notre regard change quand la tragédie frappe chez nous. Dans les heures qui ont suivi la tuerie de Polytechnique, Allan McInnis a saisi, à travers la fenêtre de la cafétéria, une image montrant une victime affaissée tandis qu’un homme décroche des décorations de Noël. La photo publiée dans The Gazette a déclenché une polémique, au point où, encore aujourd'hui, son auteur refuse qu'elle soit reproduite. Peut-être parce qu’elle se butait à l’incompréhension et à la stupeur qu’une telle horreur se soit produite chez nous ? On peut se demander si la réaction aurait été la même à l’extérieur du Québec.

Les images du 11 septembre 2001 restent aussi gravées dans les mémoires : l’avion heurtant l’une des tours, le métal tordu, des sauveteurs couverts de poussière.

Censure ou retenue des médias américains, toujours est-il que les images publiées de morts sont quasi inexistantes, comme si les attentats avaient suscité un effroi tel que le public ne pouvait en absorber davantage.

D’ailleurs, cette photo de Richard Drew représentant « l’homme qui tombe » a été publiée au lendemain de la tragédie, mais a vite été retirée. Elle n’a été montrée de nouveau que des années plus tard. La réalité, celle d’un homme qui a choisi de plonger vers la mort plutôt que de l’attendre, était trop saisissante.

Doit-on publier ou pas ? Réfléchir à la question est nécessaire. Il ne faut pas choisir l’image la plus choquante dans le seul but de cultiver l’indignation, souligne avec justesse Vincent Lavoie, professeur au département de l’histoire de l’art de l’UQAM.

Il est toutefois essentiel de montrer les photos, tout en les mettant en contexte. Refuser de le faire équivaut à fermer les yeux sur l’horreur et nier la réalité. Au lecteur ensuite de choisir s’il veut voir ou pas.

La force de l’image

Témoignage

Il nous a fallu cette photo-choc pour nous rendre compte des dommages collatéraux de cette guerre. Encore aujourd’hui, nous sommes notamment confrontés aux atrocités des guerres par des images choquantes : État islamique, décapitation en direct ; Ukraine, avion civil abattu par un missile ; Israël et bande de Gaza, civils tués par milliers.

Or, sommes-nous devenus trop insensibles à tout cela ? L’abondance d’images vient-elle nous anesthésier au point d’être davantage préoccupés par les suspenses des télé-réalités que la réalité invivable de millions d’humains innocents ?

— Serge Rémillard

La force de l’image

Témoignage

La photo de la petite fille vietnamienne courant nue sur une route est celle qui m’a le plus marqué. C’était la photo qui illustre le mieux comment cette guerre pouvait être insensée et cruelle.

— Renald Mailhot, Gatineau

La force de l’image

Témoignage

En 1972, une image avait contribué à changer l’opinion publique au sujet de la guerre du Viêtnam. Quelle image pourrait ouvrir nos yeux aux horreurs de la guerre à venir ? En 2010, une vidéo de WikiLeaks montrait le raid d’un hélicoptère Apache américain, pendant lequel le journaliste Namir Noor-Eldeen et son chauffeur Saeed Chmagh ont été tués en 2007, alors qu’ils déambulaient dans une rue de Bagdad. Le manque de respect envers ces vies humaines avait de quoi glacer le sang. La guerre contre le terrorisme a déjà fait des centaines de milliers de morts.

À quand l’image qui nous évitera mille maux ?

— Maryse Azzaria, Sainte-Julienne

La force de l’image

Témoignage

Voici la photo qui a changé ma vie. J’ai alors compris où je vivais et qui étaient les humains.

— Huguette Corbo

La force de l’image

Témoignage

Je l’ai vue au bulletin de nouvelles en compagnie de mon père. J’avais neuf ans. Le même âge que la petite fille. C’est là que je me suis rendu compte qu’il se passait autre chose ailleurs sur la planète. C’est à ce moment que j’ai eu envie de découvrir le monde. Je suis allée au Viêtnam. Je n’avais jamais su ce que la petite fille était devenue. C’est seulement lors de ce voyage que j’ai appris qu’elle avait survécu, subi des interventions chirurgicales, habitait à Toronto, était mariée et avait des enfants. J’en ai éprouvé une grande joie et poussé un soupir de soulagement, les larmes aux yeux.

— Josée Fournier

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