Opinion

LES PETITS CHANTEURS DU MONT-ROYAL
Une subvention dont le maintien est discutable

Mon passage chez les Petits Chanteurs du Mont-Royal (PCMR) a été marquant à plus d’un titre dans ma vie.

Je serai éternellement redevable à notre directeur musical de l’époque, Charles-O. Dupuis, mais aussi à cette formidable équipe d’enseignantes qu’ont été Lise Ouellette et Suzanne Paquette, ainsi que plusieurs autres collaborateurs présents à l’époque. Lorsqu’un jeune de 9 ans amorce une partie de sa vie dans une telle institution, il ne le réalise pas sur le coup, mais cette vie vient de changer du tout au tout.

Quelques faits historiques

Fondée par le père Léandre Brault en 1956, la Maîtrise des PCMR s’est établie sur les terrains de l’oratoire Saint-Joseph, puisque sa raison d’être a toujours été d’y chanter les œuvres liturgiques pendant les célébrations religieuses.

Il est important de noter que, ce faisant, les pères de Sainte-Croix prenaient la décision de fonder une œuvre. Selon Larousse, une œuvre est une « organisation à but religieux, moral, social, philanthropique ». Dans ses lettres patentes, la corporation des PCMR affirme que sa mission est de « procurer à des enfants, particulièrement des garçons pauvres, une culture musicale soignée tout en les pourvoyant de la formation physique, intellectuelle, morale et religieuse ». 

En créant la Maîtrise des PCMR, les pères de Sainte-Croix voulaient se doter d’un chœur à la hauteur de l’institution qu’est l’oratoire Saint-Joseph tout en faisant une œuvre sociale utile auprès d’enfants de milieux modestes.

La congrégation reconnaissait par le fait même qu’elle devait y consacrer des sous. Ici, nous touchons une partie importante du problème.

À cette époque, le ministère de l’Éducation n’existe pas encore et le réseau d’écoles publiques non plus. Puisque les premiers PCMR sont recrutés dans des orphelinats et dans des milieux modestes, il est essentiel de leur trouver une école secondaire pouvant les héberger, car ils sont alors tous pensionnaires. Le collège Notre-Dame, par sa proximité, offre un avantage indéniable à cet égard. Les PCMR d’âge primaire ont en effet été pensionnaires jusqu’en 1969, ce qui leur permettait notamment de répéter tous les soirs. Les deux institutions relèvent à l’époque de deux communautés religieuses distinctes, soit les frères de Sainte-Croix pour le collège Notre-Dame et des pères de Sainte-Croix pour les PCMR, mais un lien officieux les unit tout de même.

Il a fallu une certaine période de temps pour que le réseau des écoles publiques soit entièrement constitué, donc le lien entre les PCMR et le collège Notre-Dame conservait alors sa pertinence. Je n’oserais dire pourquoi cette entente a été maintenue jusqu’à ce jour, mais il semble que les dirigeants administratifs et politiques aient fini par tenir pour acquis qu’elle devait « faire partie des meubles ».

Depuis de nombreuses années, les PCMR font leur promotion sur le terrain en soulignant que les études au collège Notre-Dame sont gratuites. Mais le recrutement se fait de moins en moins dans les quartiers modestes.

Par conséquent, la pertinence de maintenir cette subvention m’apparaît hautement discutable. La mission sociale exprimée dans les lettres patentes des PCMR ne s’applique plus que très partiellement, les garçons pauvres n’y étant nettement plus en majorité.

Alors quelle solution peut-on proposer ? Les deux congrégations des Sainte-Croix (oratoire et collège Notre-Dame) étant désormais unifiées au Québec, elles ont largement les moyens de financer des bourses d’études aux PCMR issus de milieux modestes.

Je trouve particulièrement odieux que la Commission scolaire de Montréal soit l’institution mise en cause quant à la survie des PCMR. 

Je ne vois pas au nom de quelle logique ou de quelle justice les impôts des contribuables québécois devraient subventionner à 100 % l’éducation d’élèves fréquentant un collège privé, alors que c’est la CSDM qui voit à « procurer à des enfants, particulièrement des garçons pauvres, une culture musicale soignée tout en les pourvoyant de la formation physique, intellectuelle, morale et religieuse ». La CSDM offre une série de programmes d’études particuliers dans laquelle les élèves pourraient parfaitement s’intégrer tout en s’épanouissant au sein des PCMR.

En tant qu’enseignant, j’ajouterais que toutes les écoles désirent avoir une clientèle d’enfants doués et inspirés par une culture musicale. Je ne puis imaginer que l’école de la CSDM choisie pour accueillir cette clientèle ne mettrait pas tout en œuvre pour que ces enfants y soient heureux.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.