Monsieur l’inspecteur

Une thermographie avec ça ?

L’usage de caméras thermiques en inspection préachat ne fait pas l’unanimité. Certains inspecteurs en font un moyen de se démarquer et d’en offrir plus au client, alors que d’autres y voient plutôt un piège à éviter.

Les caméras thermiques servent à mesurer la température des surfaces. En pointant sur un mur, par exemple, on voit apparaître à l’écran une gamme de couleurs reflétant les différences de température. Les variations reflètent des problèmes d’isolation, d’humidité ou d’autres sources inhabituelles de chaleur ou de froid.

C’est ainsi que mon collègue André Côté, inspecteur dans la région de Québec, a récemment découvert un nid de fourmis charpentières. « Il y avait un picotement de chaleur inhabituel sur l’écran de ma caméra, raconte-t-il. J’ai recommandé que soit ouvert le mur. Tout le monde était bien content que j’aie trouvé ce problème, même le vendeur. Sinon, ça aurait été un cas de vice caché. »

D’emblée, mettons une chose au clair : la thermographie ne permet pas de voir derrière les murs ! Dans ce cas, l’activité des fourmis générait une chaleur détectable.

« Ce n’est pas comme dans les films ! La caméra mesure seulement les températures de surface, en captant les rayons infrarouges. » 

– Manny Alsaid, directeur des ventes chez le fabricant Flir

USAGES D’IMAGERIE THERMIQUE EN BÂTIMENT RÉSIDENTIEL

– Repérer les infiltrations d’air et d’eau

– Détecter des défauts ou l’absence d’isolation

– Trouver des matériaux mouillés

– Visualiser les ponts thermiques

– Identifier des points de surchauffe électrique

Dans mes propres inspections préachat, j’utilise à l’occasion une caméra thermique en complément à mon détecteur d’humidité. Lorsque je repère des signes d’humidité sur un mur, par exemple, la caméra m’aide à déterminer si l’infiltration d’eau est active. Les matériaux secs et mouillés n’affichent pas la même température.

Par contre, je n’irai pas jusqu’à balayer l’ensemble des murs des vieux triplex de Montréal pour trouver leurs faiblesses d’isolation et d’étanchéité. L’exercice inquiéterait sûrement les acheteurs, puisque ces murs ne sont tout simplement pas isolés ! Je préfère leur conseiller d’obtenir les factures de chauffage des dernières années.

Plusieurs autres inspecteurs sont réticents à offrir le service de thermographie en contexte préachat. En deux à trois heures, il y a déjà tellement de choses à vérifier. Comment peut-on en plus faire une lecture complète des températures des murs et des plafonds ? Et si le client découvre par la suite un problème d’isolation qui n’a pas été repéré en inspection, voudra-t-il poursuivre l’inspecteur ?

BIEN EXPLIQUER

André Côté ne s’arrête pas à ces considérations. Il confie certaines tâches à un assistant, ce qui lui dégage de précieuses minutes pour balayer de sa caméra thermique les plafonds et les murs intérieurs qui donnent sur l’extérieur.

« J’explique à mes clients que ce n’est qu’un outil de travail, qui me permet d’en voir plus pour eux. Lorsque je trouve une anomalie, je prends une photo de l’écran de ma caméra. » 

– André Côté, président d’Inspections AP & associés

Il s’assure que ses clients comprennent bien qu’ils n’ont pas droit à une thermographie complète. Cela correspondrait à une expertise, qui exige qu’on prépare la maison et que l’expert se concentre sur une seule tâche. Notons que les problèmes d’étanchéité et d’isolation ne se détectent aisément que lorsqu’il y une différence de température d’au moins 5º entre l’intérieur et l’extérieur.

Avant de monter dans les combles, André Côté balaye les plafonds. Il note l’emplacement des anomalies détectées et une fois dans les combles, il repère l’isolant manquant ou déplacé, ou le pare-vapeur brisé. Il arrive aussi à détecter d’autres points faibles de l’isolation, par exemple sur la solive de rive, cette pièce de bois entre deux étages.

André Côté a une formation de niveau 1 de l’Infrared Training Center. Attention ! Plusieurs inspecteurs en bâtiment n’ont pas suivi cette formation de base, qui permet de bien comprendre les possibilités et les limites de cet outil. Les rayons infrarouges réfléchis par les carreaux de céramique, ou émis par une plinthe chauffante, par exemple, peuvent mener à des diagnostics erronés.

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