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Comment ne pas se retrouver à l’envers dans un kayak de mer

La scène se joue au quai de location d’embarcations au parc des Îles-de-Boucherville. Deux copains, des hommes d’âge mûr, embarquent pour la première fois dans des kayaks de mer. Le premier fait une fausse manœuvre avec sa pagaie et, zip ! sploutch ! se retrouve la tête en bas dans la flotte. Il émerge de l’eau sous les moqueries de son ami, l’orgueil un peu mal en point.

« Que ce soit en canot ou en kayak, 90 % des gens qui dessalent [chavirent] le font à l’embarquement ou au débarquement, indique Bernard Hugonnier, directeur technique de la Fédération québécoise du canot et du kayak (FQCK). On passe de quelque chose de stable à quelque chose qui ne l’est pas. Dans la transition, il y a quelque chose à faire avec la pagaie pour faire un lien pour stabiliser l’embarcation. Il s’agit d’une des techniques les plus intéressantes à apprendre et à contrôler pour rester plus au sec. »

Les dessalages sont toutefois peu fréquents en kayak de mer, et la technique de propulsion est plutôt facile à apprendre. Rien n’oblige les novices à suivre des cours. Et pourtant, une telle formation est bien utile.

« Tous les gens qui viennent suivre un cours, même ceux qui disent qu’ils ne le font que pour accompagner leur blonde ou leur chum, ressortent de là en disant qu’ils ne pensaient pas en apprendre autant. »

— Bernard Hugonnier, directeur technique de la FQCK

La Fédération offre une formation de base pour tous les sports à pagaie, soit le canot, le kayak et la planche à pagaie, intitulée « Pagaie pour tous ». La base, c’est notamment de savoir comment hisser son embarcation sur la voiture et comment la descendre et la transporter jusqu’à la berge sans se faire un tour de reins. La base, c’est aussi de connaître les éléments qu’il faut obligatoirement avoir avec soi, comme une veste de flottaison individuelle, un moyen de communication (comme un sifflet), une corde et une écope (ou une pompe).

Un kayakiste a récemment appris cette obligation à la dure : un agent de la Sûreté du Québec lui a remis une amende de 221 $ parce qu’il n’avait pas de sifflet à bord.

« Le principal objectif d’une formation, c’est d’inviter les gens dans un milieu qu’ils ne connaissent pas et de leur donner quelques repères », indique M. Hugonnier.

La FQCK et d’autres organismes offrent différents niveaux de formation spécifique pour le kayak de mer. Les gens qui suivent ces cours ont différentes motivations, mais une grande majorité (90 %, selon M. Hugonnier) craint de rester coincée dans le kayak s’il chavire.

La formation de niveau 1 enseigne ainsi une sortie en maîtrise du kayak en cas de dessalage. C’est plus facile qu’on pense.

« En fait, si le kayak est bien ajusté, c’est difficile de rester dedans, affirme Bernard Hugonnier. La preuve, c’est que dans un niveau plus avancé, on demande aux gens de virer à l’envers et de rester dans le kayak pour faire d’autres manœuvres. Mais deux fois sur trois, les gens ressortent sans le vouloir. »

Au niveau 1, les kayakistes apprennent également des techniques de récupération en cas de dessalage, qu’ils pourront perfectionner au niveau 2.

« Le niveau 2 vise l’autonomie de la personne, continue M. Hugonnier. On parle de l’organisation d’une sortie, de la lecture de cartes, de la météo. Les techniques sont une coche au-dessus du niveau 1. »

Les kayakistes n’ont pas besoin de maîtriser l’esquimautage, mais ils en apprendront tous les éléments, comme le fait de garder le contrôle et de se repérer une fois la tête en bas dans son kayak, ou encore le fameux coup de hanche qui leur permettra un jour de remonter à l’air libre sans sortir du kayak.

L’esquimautage est exigé pour le niveau 3, mais ce niveau porte surtout sur le côté maritime : la compréhension des marées, des courants, de l’interaction de ces deux phénomènes, etc.

Quiconque s’est retrouvé au large de Kamouraska à marée basse connaît l’importance de bien comprendre les tables de marées. Pour rentrer à quai, il faut marcher un bon kilomètre dans la boue en tirant son kayak.

« Avec les chaussures qui restent prises dans la boue, ça devient intense », s’amuse M. Hugonnier.

Évidemment, les formations permettent d’adopter des techniques de propulsion plus efficaces qui diminuent la fatigue et les risques de blessures. C’est toutefois tout l’aspect de la sécurité qui prime.

« La meilleure chose, c’est la prévention, fait valoir Bernard Hugonnier. C’est comme les cours de premiers soins. On fait de la prévention et, idéalement, on n’a pas à utiliser ce qu’on a appris. »

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