PME innovation

Quand la protection ne tient qu’à un fil…

L’INNOVATION

En combinant savamment des fibres aux propriétés spécifiques, FilSpec a mis au point un fil résistant à la chaleur.

Il servira à fabriquer des vêtements de travail qui protègent contre les flammes accidentelles.

Au contraire des tissus enduits d’un produit ignifuge, les caractéristiques du WorkFil sont intégrées au cœur du fil et ne disparaissent pas avec l’usure, l’abrasion ou le lavage.

QUI

Ses origines remontent à 1954, dans le giron de Dominion Textile dont elle occupe toujours l’ancienne usine de Sherbrooke, mais FilSpec n’est plus tout à fait la même entreprise.

Depuis 2004, la filature se spécialise dans les fils techniques de haute performance. Son usine et son siège social sherbrookois emploient 160 personnes. Quelque 150 autres employés travaillent dans l’usine de Caroline du Nord qu’elle a acquise en 2009.

« Notre modèle et notre stratégie, c’est l’innovation. C’est là qu’on dérange un peu, parce qu’on est le premier filateur qui a le culot de dire : on fait de l’innovation. C’est nous, le fer de lance de la recherche dans le fil technique. »

— Dominique Quintal, vice-président ventes et marketing

LE FIL DE L’HISTOIRE

Il a fallu plus de deux ans de recherche pour le mettre au point.

Le fil WorkFil combine, en justes proportions et dans un entrelacement étudié, des fibres d’aramide, de viscose et de modacrylique.

« C’est un mélange breveté », informe Dominique Quintal.

L’aramide est une fibre synthétique résistante aux flammes, mais qui présente les inconvénients d’un prix élevé et du rétrécissement à la chaleur.

En la tressant avec les deux autres fibres, FilSpec obtient des caractéristiques de confort et de résistance aux flammes à prix raisonnable.

Ces vertus sont inhérentes au fil, au contraire des tissus traités chimiquement contre la chaleur.

Trois secondes d’enfer

Le fil WorkFil n’est pas destiné aux vêtements de pompier, qui doivent résister aux flammes pendant 35 secondes, précise Dominique Quintal. Mais une combinaison de travail confectionnée avec du WorkFil peut supporter une chaleur intense pendant 3 secondes, comme le démontre éloquemment une vidéo tournée en laboratoire.

Après une épreuve courte, mais infernale, le vêtement ne présente aucune perforation, s’éteint de lui-même, et n’entraîne aucune brûlure au deuxième ou troisième degré dans les zones qu’il couvre.

Comme du denim

FilSpec peut ajouter du coton au trio de fibres pour produire un tissu semblable au denim, qui peut être teint au goût du client.

Ce mélange intéresse un important fabricant mexicain de denim, qui veut l’utiliser pour fabriquer des vêtements de travail qui conjuguent confort, liberté de design et protection contre les flammes accidentelles.

« Les gens veulent porter des vêtements de protection, mais leur apparence compte aussi, observe Dominique Quintal. Tu peux aller à l’épicerie ou à la garderie sans avoir l’air de revenir d’une zone de combat. »

L’AVENIR

FilSpec entrevoit un large marché à l’étranger pour le WorkFil, bien positionné en milieu de gamme.

« La protection 100 % aramide, c’est de la grosse protection, mais c’est hors de prix, commente Dominique Quintal. Avec ce concept, nous arrivons avec un niveau de protection qui est abordable pour beaucoup de travailleurs. »

L’entreprise de Sherbrooke achève l’implantation en Belgique de sa filiale FilSpec Europe, qui devrait se concrétiser au début 2019.

« Le marché de l’Amérique latine, du Mexique jusqu’au Pérou et au Chili, pour nous, c’est de la croissance pure, ajoute le vice-président. C’est vierge de tissus techniques là-bas. »

Le marché américain, où les fabricants de tissus ignifugés règnent en maîtres, se montre plus rétif.

Peu importe.

« Quand la porte ne s’ouvre pas, tu fais le tour. »

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