Vie privée

Conseils de pros

Vous voulez nettoyer votre réputation sur le web ou carrément passer sous le radar des moteurs de recherche ? Des entreprises comme E-reputation Management sont là pour ça.

Mais son président, Martin Decelles, prévient d’emblée : « Il n’y a pas de trucs, pas de magie. »

« C’est de longue haleine, il faut envisager un processus sur un an. Et il y a certains noms qu’on ne peut pas nettoyer. »

— Martin Decelles, président de E-reputation Management

Il faut prévoir investir « quelques milliers de dollars » si on souhaite confier un tel mandat à l’équipe de M. Decelles. Ses clients proviennent d’horizons extrêmement variés : ils ont parfois été associés à des malversations sans avoir été reconnus coupables, ont fait faillite et craignent que la nouvelle se répande, ont affaire à des internautes mécontents de leurs services qui les traînent dans la boue.

D’autres sont plus imprévus : « Un client m’a appelé parce que sa maison apparaissait comme une des neuf plus grosses au Québec. Des personnes en France mêlées à un scandale voulaient que je les aide. Un gros scandale. J’ai dit “wôw, je n’ai pas les capacités de le faire.” »

À la demande de La Presse, il s’est livré à une estimation pour redorer le blason d’une vedette québécoise récemment écorchée. Le site MOZ offre un outil, payant, qui établit de façon statistique la difficulté de l’opération. Son verdict : mission pratiquement impossible. « Je ne prendrais pas le mandat, car c’est comme compétitionner contre les Ford et GM de ce monde. »

INFLUENCER GOOGLE SANS SE FAIRE PINCER

La réputation sur l’internet, selon un vaste sondage mené par la revue britannique The Economist, est cruciale pour les entreprises : elle représenterait 75 % de leur valeur. Elle l’est tout autant pour les individus : 70 % des donneurs d’emplois aux États-Unis auraient rejeté des candidatures après une simple recherche sur l’internet, selon un rapport de Microsoft publié en 2009.

Sans livrer ses secrets, M. Decelles indique qu’on peut légitimement agir sur les résultats dans des moteurs de recherche comme Google. Essentiellement, si le nom du client malmené redevient associé à des impressions favorables, ce sont ces résultats qui sortiront en premier. Dans la foulée des décisions judiciaires en Europe, Google offre maintenant aux internautes nord-américains un processus de « déréférencement » s’ils s’estiment victimes de diffamation.

« Mais on ne peut pas simplement ajouter de fausses références, il faut que ce soit soutenu. Si on fait des choses trop malsaines, Google va nous attraper et nous punir. »

— Martin Decelles, président de E-reputation Management

Aux États-Unis, souligne-t-il, la manipulation de la « e-réputation » est une « énorme business, et certains commencent à l’utiliser au Canada ». Des campagnes, dont le coût se chiffre en dizaines de milliers de dollars, sont par exemple lancées sur les réseaux sociaux et appuyées par des sites internet pour modifier la réputation d’une personne. « Ce sont de vrais internautes, qui ont des comptes, sont souvent basés dans des pays du tiers-monde et dont le travail consiste à modifier l’opinion publique, dit M. Décelles. Ce sont presque des trolls… mais payés. »

LIMITER L’INFORMATION

Les grands médias, par contre, sont pratiquement imperméables à ces procédés. « La Presse ne retirera pas un article parce qu’on le lui demande. » J’avais un client soupe au lait qui a demandé, par son avocat, à ce qu’on rectifie un article. C’est une chose qu’on ne doit pas faire : il a plutôt eu droit à un autre article où on reparlait de toute l’affaire, tout en précisant qu’il n’était pas coupable. Son nom est remonté dans Google. »

À ceux qui n’ont pas les moyens de s’offrir ses services, qui espèrent par exemple redorer leur blason pour moins de 1000 $, il suggère de faire le tour eux-mêmes des réseaux sociaux, d’ajouter du contenu plus positif pour eux.

Pour José Fernandez, professeur à l’École polytechnique de Montréal, c’est d’abord en limitant le nombre d’informations qu’on divulgue sur l’internet qu’on peut se protéger. « Je suis le premier à le faire, je n’ai pas de compte LinkedIn, j’ai un Facebook dans lequel je ne mets rien, un compte Twitter que je n’utilise pas. Je suis très protecteur de ma vie privée. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.