Livre

Le sucre subit un « procès équitable »

Faut-il absoudre le sucre ? Le condamner ? Dans son livre La vérité sur le sucre, André Marette, chercheur au Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec et professeur de médecine à l’Université Laval, a voulu faire la synthèse la plus juste possible des faits scientifiques entourant le sucre. Entrevue.

Doit-on attribuer l’épidémie grandissante d’obésité et de diabète de type II au sucre ?

Je pense qu’il est indéniable que le sucre participe à la flambée d’obésité qu’on observe depuis 30, 40 ans. Toutefois, ce n’est pas le seul coupable. Il y a 15 ans, l’ennemi public, c’était les gras, les lipides. Donc, on a dit : « on arrête de manger des gras ». Qu’est-ce que l’industrie a fait ? Elle a augmenté le taux de sucre dans les aliments, parce que les papilles gustatives veulent que ça goûte bon. Le sucre est un facteur important, mais ce n’est pas le seul : on ne fait pas assez d’exercice physique, on mange trop de gras, on mange probablement trop de sel. D’ailleurs, depuis une dizaine d’années, on observe une petite baisse dans la consommation de sucre, mais l’obésité continue d’augmenter.

Est-ce que tous les sucres sont égaux ?

Non, ils ne le sont pas. En écrivant ce livre, mon but était d’expliquer aux gens ce qu’est le sucre, ce que sont LES sucres. Les gens ne savent pas que les fibres alimentaires, c’est une forme de sucre – des glucides très complexes qu’on ne digère pas (les bactéries de notre intestin le font). Il y a l’amidon, digestible ou non digestible, la cellulose, qu’on retrouve dans certains fruits et certaines céréales. Et, bien sûr, il y a les sucres simples, dont le sucrose – le sucre blanc, constitué de molécules de fructose et de glucose liées. Le plus dangereux, c’est le fructose, qui est capté beaucoup par le foie, entre autres. C’est lui qui va causer beaucoup, beaucoup de maladies. Et malheureusement, les sucres simples sont ceux qui goûtent le plus sucré.

Est-ce qu’on devrait éliminer le fructose de notre alimentation ?

En théorie, on n’a pas besoin de fructose dans notre alimentation pour vivre, comme c’est le cas, d’ailleurs, pour plusieurs nutriments qu’on ingère. Mais il faut se rappeler que, lorsqu’on fait de l’exercice physique, on a besoin de source d’énergie rapide : glucose, fructose, etc. Dans le sucre de la canne à sucre, il y a toujours du glucose et du fructose. On se passerait vraiment d’un plaisir à manger si on ne consommait pas de fructose. Je pense qu’il faut plutôt éduquer les gens à réduire les quantités de fructose qu’ils ingèrent, en commençant par les boissons sucrées. Si on se contentait de manger le sucre naturellement dans les aliments, on n’aurait aucun problème.

En quoi les sucres ajoutés sont-ils moins bons pour la santé que les sucres naturels, comme ceux contenus dans les fruits, par exemple ?

Lorsqu’on ingère le sucre qu’on extrait de la canne à sucre, le sucre des fruits ou encore le HFCS [le high fructose corn syrup, du sirop de maïs modifié chimiquement], on voit à peu près la même chose. Le problème, c’est que le sucre ajouté est partout dans notre alimentation. Grâce au HFCS, l’industrie peut d’ailleurs en mettre dans nos aliments à moindre coût. Ce n’est pas nécessairement que le sucre ajouté est plus dangereux : c’est qu’on en consomme trop parce qu’il se retrouve partout. C’est comme pour le sel et même certaines vitamines ; trop en consommer peut devenir dangereux.

Vous suggérez de commencer par éliminer les boissons sucrées de son alimentation, mais vous avez un discours plus nuancé sur les jus de fruit 100 % purs.

Évidemment, on conseille tout le temps aux parents et aux enfants de consommer des fruits frais. Pour différentes raisons, par exemple dans une boîte à lunch, on veut parfois mettre un jus de fruit. Si c’est un jus de fruit pur, il n’y a aucun problème. […] Dans les jus de fruit, il y a des vitamines, des minéraux et des polyphénols, des molécules anti-inflammatoires présentes aussi dans le sirop d’érable et le miel. […] Là où il faut faire attention, c’est les enfants qui consomment 10 verres de jus d’orange par jour. Un jus de fruit, même 100 % jus, contient quand même pas mal de sucre. Et c’est un sucre sous forme liquide, qui a moins d’effet sur la satiété.

Par ailleurs, vous n’êtes pas un grand amateur des faux sucres…

Vraiment pas ! Avant d’écrire le livre, je connaissais les faux sucres, mais je n’avais pas parcouru la littérature en détail. Est-ce que c’est vraiment mieux que les sucres ? On s’est aperçu que, dans la littérature, il n’y a rien de clair là-dessus. En fait, il n’y a aucune démonstration selon moi scientifiquement valable que de prendre des faux sucres au lieu du sucre va limiter le gain de poids ou même améliorer le syndrome métabolique ou l’intolérance au glucose qui mène au diabète.

Encore une fois, tout est dans la modération ?

Il faut maintenir la balance. Si on ne fait pas assez d’exercice physique pour les brûler, ses sucres, il faut moins en consommer.

La vérité sur le sucre

André Marette

VLB éditeur

160 pages

Événement

À la soupe !

L’Action terroriste socialement acceptable (ATSA) organise son événement Le temps d’une soupe pour une deuxième année dans le cadre du festival Escales improbables. Ça se passe du 13 au 18 septembre au parc des Faubourgs, à l'angle de la rue Ontario et de l’avenue De Lorimier, dans le quartier Centre-Sud. Le principe est simple : des duos d’inconnus sont formés au hasard par les organisateurs. Ils partagent une soupe – offerte gratuitement par le restaurant Au Petit Extra – et discutent pendant environ 25 minutes. Un « médiacteur » propose aux participants un menu de sujets sur le thème du « vivre ensemble ». Diversité culturelle, menace terroriste, embourgeoisement, perceptions du quartier, à vous de choisir ! « Le but de cette intervention est de provoquer des rencontres, détaille la cofondatrice d’ATSA Annie Roy. C’est de l’art relationnel, où l’on cherche à créer des communautés d’esprit. C’est le contraire de la peur de l’autre. » L’an dernier, 370 duos ont été formés place Émilie-Gamelin. — Jean Siag, La Presse

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