L’Impact
La philosophie de l’instinct
Collaboration spéciale
Prenons les choses avec philosophie – n’est-ce pas ce que demande Laurent Ciman ? D’une part, au grand plaisir des tribunes à nouveau remplies, Didier Drogba a enfin fait ses débuts dans l’uniforme montréalais. De l’autre, il semble qu’il faudra encore patienter pour obtenir les premiers commentaires du nouveau joueur désigné à l’issue d’un match, au grand désarroi d’une frange de la communauté médiatique montréalaise. Une chose à la fois, comme dirait l’autre…
Du coup, on ne trouve pas d’autre possibilité que de parler de ce qu’on a vu sur le terrain, bien que le sujet soit moins excitant que certaines intrigues se déroulant au-delà des lignes de touche. Bref, une saison de l’Impact contient assez de matière pour un dérivé de
, avis à Fabienne Larouche.Ce qu’on a vu sur la pelouse, donc, c’est une équipe qui semble toujours embourbée, et cela, depuis ses quatre derniers matchs à la maison. Une période durant laquelle l’Impact a dû se contenter d’une récolte frugale de deux points sur une possibilité de 12. On a beau s’être offert le luxe d’un deuxième joueur désigné, voilà qui semble bien loin des principes d’Épicure.
Alors, qu’est-ce qui cloche avec l’Impact ? Le onze montréalais semble avoir, sur papier, la plupart des éléments qu’il lui faut. On domine la possession de ballon. On crée des occasions. Il y a même eu du progrès sur les jeux arrêtés. Mais si le projet de Frank Klopas a bénéficié du brio de quelques individus depuis le début de l’année, le tout n’est malheureusement pas supérieur à la somme de ses parties.
Devant ce constat, et à la lumière des plus récents résultats, on entend de plus en plus souvent que l’Impact jouerait mieux avec un autre système de jeu (le 4-4-2) ou encore qu’un changement d’entraîneur est le remède qu’il lui faut.
Or, quand Ciman déclare que son équipe a joué « sans philosophie » contre Philadelphie, il faut comprendre que ce n’est pas la forme (le système 4-2-3-1) mais plutôt le contenu (l’animation offensive) qui est en cause.
L’Impact se transmet le ballon comme si c’était le témoin d’une course à relais. À toi de jouer, voir ce que tu peux créer et on va regarder si tu arrives à te débrouiller.
Des exemples ? Passe à Romero : tout s’arrête, on attend de voir s’il va baisser la tête, dribler et peut-être sortir un nouveau numéro. En vérité, il a l’air fatigué et un peu perdu sans Nacho. Passe à Venegas : on s’aperçoit finalement qu’il n’est pas si à l’aise dans un poste derrière l’attaquant et qu’il aura besoin de temps pour s’adapter. Or, du temps, ce n’est pas en jouant avec une touche de trop que le Tico va en gagner. Finalement, on se rabat sur la longue passe à Oduro. Pour le relais, on ne fait pas mieux, mais quand l’autre équipe joue très bas, même Usain Bolt ne trouverait guère de raison de célébrer.
Qu’en est-il de la responsabilité de l’entraîneur ? Frank Klopas n’a pas assez confiance en son milieu de terrain pour passer au 4-4-2. Au-delà de l’effet de surprise pour l’adversaire, le système à deux attaquants n’apporterait pas nécessairement plus de danger en avant, surtout si on ne fait que balancer le ballon et espérer.
C’est plutôt avec du travail sur des mouvements préétablis et plus de variabilité en attaque que Klopas doit relancer son équipe. Il serait illusoire pour le pilote de l’Impact de tenter d’inculquer de nouveaux principes de jeu à des joueurs désignés très proéminents dans le club montréalais. Car, en plus de marcher sur des œufs, Klopas marche d’abord à l’instinct. Un instinct un brin fataliste qui l’incite à se fier à la même recette, quitte à se fixer, qui a fonctionné plus tôt dans la saison. En cela, il n’est pas si différent de ceux qui l’ont précédé à la barre de l’équipe. Alors, pour le changement d’entraîneur...
Et Drogba, dans tout ça, va-t-on lui demander de prendre toute l’attaque sur ses épaules comme jadis à Marseille ? J’attends toujours la réponse de sa relationniste à ce sujet...