Sur le radar

La force de l’économie américaine est sous-estimée

Chaque dimanche, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d’investissement. Cette semaine, Bob Gauthier, chez Doherty & Associates à Ottawa.

Propos recueillis par Richard Dufour, La Presse

Quel a été l’événement le plus significatif des derniers jours en Bourse ?

Les progrès des négociations entre la Grèce et ses créanciers étaient assurément bienvenus, mais l’incertitude continuera néanmoins d’être présente dans un avenir rapproché. Plus importante pour les investisseurs canadiens cependant est la décision prise par la Banque du Canada, mercredi, d’abaisser son taux directeur à 0,5 %. La Banque du Canada est déterminée à stimuler la croissance des exportations avec un dollar canadien plus faible dans la foulée de l’impact causé par l’effondrement du prix du brut. Jusqu’ici, il a été difficile de compenser au pays l’impact des prix plus faibles des ressources dans l’ouest du pays, mais il est encore trop tôt pour que l’effet de la politique monétaire canadienne se fasse pleinement sentir.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement ?

Je suis des indicateurs spécifiques aux entreprises, par exemple, le rendement du capital investi. Mes collègues et moi bâtissons des portefeuilles dans lesquels des positions sont prises tout au long d’un cycle boursier (bottom up). Je ne tente jamais de prévoir ce que le marché fera en me fiant aux événements macros. Je recherche des entreprises fortes financièrement qui ont de belles perspectives à long terme et qui se transigent à une évaluation raisonnable. Le marché est préoccupé par la performance à court terme, ce qui peut créer des réactions exagérées à certaines informations. Je tente de tirer profit de cette situation. J’aime aussi beaucoup les entreprises qui ont des modèles d’affaires défensifs, une équipe de gestion expérimentée et dont la rentabilité croît à long terme. Les investisseurs impatients créent des occasions pour les investisseurs à long terme. C’est l’avantage concurrentiel que je possède.

Que feriez-vous avec plusieurs milliers de dollars à investir ?

Dans le contexte de bas taux d’intérêt actuel, je préfère des entreprises de qualité qui offrent un rendement de dividende supérieur et dont le dividende est appelé à croître. En ajoutant l’appréciation potentielle du cours boursier de ces titres, ça rend ce type de placement encore plus attrayant. Je pense notamment à des titres comme celui de la Banque TD, Manuvie, Unilever, CVS et Diageo.

Quel placement évitez-vous à tout prix ?

Assurément les obligations à long terme. Les investisseurs ne sont pas suffisamment récompensés présentement pour le risque potentiel associé à ce type de placement dans le contexte actuel de taux.

Qu’est-ce que les marchés sous-estiment le plus ?

Je remarque un biais très négatif en ce moment envers l’économie canadienne en raison notamment de la valeur élevée du prix des maisons, du niveau d’endettement des Canadiens et du prix déprécié des matières premières. Bien qu’il s’agisse de préoccupations légitimes, le consensus n’accorde pas suffisamment de crédit à la force de l’économie américaine et aux effets positifs qu’elle aura de façon directe sur l’économie mondiale, plus précisément sur l’économie canadienne. Combiné à un dollar canadien plus faible, ça aidera notre économie à compenser certains des effets négatifs ressentis même s’il y a un décalage à anticiper dans cet impact.

Bob Gauthier est vice-président et gestionnaire de portefeuille chez Doherty & Associates à Ottawa. L’actif sous gestion de Doherty, qui compte également un bureau à Montréal, s’élève à 1,4 milliard de dollars. Bob Gauthier est principalement responsable des portefeuilles américains et internationaux, en plus de prêter assistance en ce qui concerne le portefeuille canadien. 

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.