SALON DU LIVRE DE MONTRÉAL Rémy Simard

Le Pomélo de La Pastèque

La maison d’édition québécoise La Pastèque, toujours proactive, a lancé à la mi-2013 une nouvelle collection, baptisée Pomélo. Rien à voir avec le gros agrume, tout à faire avec une série d’ouvrages faussement pratiques sous forme de BD. C’est sous Pomélo qu’on trouve la BD faussement « encyclopédique » La liste des choses qui existent d’Iris et Cathon, le pseudo-guide pour arrêter de fumer Deux milligrammes de Benjamin Adam, ainsi que le délirant Bestiaire des fruits de Zviane, consacré à la dégustation de fruits exotiques.

Mes Dinky est donc le quatrième titre de la collection, mais le premier à avoir été écrit sur mesure pour Pomélo, sans passage préalable sur un blogue. C’est aussi le premier à être imprimé quatre couleurs. Et c’est peut-être celui qui compte le plus de « vrais » conseils, tout en étant rigolo. Rémy Simard songe d’ailleurs déjà à la rédaction d’un autre de ces « guides » plutôt ludiques.

SALON DU LIVRE DE MONTRÉAL RÉMY SIMARD

Le collectionneur

Mes Dinky

Rémy Simard

La Pastèque, 104 pages

En librairie à compter du 18 novembre

L’illustrateur-bédéiste Rémy Simard est l’un des invités d’honneur du Salon du livre de Montréal… auquel il a participé tous les ans depuis la publication de la BD Fraude électrique (Les aventures de Ray Gliss), en 1984-1985 ! Quelque 80 livres plus tard, il lance un album aussi personnel qu’utile : Mes Dinky, un « faux » vrai guide pratique, mi-BD, mi-illustrations, à l’intention des collectionneurs. De petites autos. Ou de grosses autos. Ou de toutes sortes d’affaires !

« Pour la première version de Mes Dinky, je m’étais dessiné en train de consulter un psy, dit Rémy Simard, hilare. Car je conçois très bien que les non-collectionneurs nous trouvent fous, nous, les collectionneurs. D’ailleurs, tu ne t’en vantes pas, d’être un collectionneur… Mais je te jure que je me contrôle ! »

Car Simard collectionne. Principalement les petites voitures, surtout celles produites par les entreprises Corgi et Dinky dans les années 60, pour qui il a eu un coup de cœur dès son enfance. Dans son atelier-bureau, elles sont partout, ces fameuses petites voitures. Sa collection « officielle » en compte 140 modèles. Boîtes comprises !

GRANDEURS ET MISÈRES DU COLLECTIONNEUR

On est donc direct dans le « vécu de bonhomme » avec Mes Dinky… « J’ai effectivement abandonné l’idée du psy, qui était fictif, explique l’auteur-dessinateur, et j’ai conçu une deuxième version, plus structurée, plus “pratique”, avec des chapitres, des thèmes, des conseils pour être collectionneur de quoi que ce soit, tout en m’inspirant de ce que j’ai vécu. »

Plus pratique, c’est vrai, et finalement plus autobiographique : jalonné de reproductions très précises de voitures et de catalogues, l’album suit un « Rémy » imaginaire (il se dessine chauve, alors qu’il a beaucoup de cheveux !), qui tombe en amour avec les petites voitures grâce à Batman, un Rémy qui lui aussi a une « blonde », deux enfants et un chat, un Rémy qui fait la rencontre d’autres collectionneurs et en dresse une nomenclature très touchante, qui parcourt l’Europe à la recherche de tel ou tel modèle, qui découvre la Maison des encans… Tout cela parsemé de gags et de clins d’œil.

« Je n’aime pas parler de moi, je n’aime pas sortir, je n’avais pas envie d’étaler ma vie dans un livre : imagine, mon idole, c’est Réjean Ducharme, alors… »

« Mais je sais ce que c’est, avoir une passion pour un objet, explique Rémy Simard. Ne pas tout dire à tes proches – en tout cas, pas le prix que t’as vraiment payé ! –, considérer les animaux et les enfants comme un fléau pour ta collection, visiter systématiquement tous les antiquaires au cas où, faire affaire avec un courtier… »

« C’est pour cela que cela m’importait, par exemple, d’expliquer quel a été l’élément déclencheur pour moi, c’est-à-dire ma passion pour Batman : c’est absolument fondamental, le déclic, dans la vie d’un collectionneur. »

SE LÂCHER LOUSSE

Rémy Simard a donc puisé dans sa vie personnelle pour relater cette étrange passion qu’on appelle la collection. Et il en a aussi profité pour se « lâcher lousse un peu » dans le dessin. « Je suis catalogué comme étant de type “ligne claire classique, qui dessine à l’ordinateur”. Cette fois, je me suis permis d’avoir des dessins qui n’étaient pas parfaits, dans la partie plus autobiographique. »

Ça donne notamment un des gags récurrents les plus rigolos du livre : le personnage du livreur, qui vient remettre à « Rémy » ce qu’il a acheté par la poste ou en ligne, est systématiquement représenté comme un père Noël. « Le livreur est super important dans la vie d’un collectionneur, explique le bédéiste, c’est l’intermédiaire en chair et en os entre toi et un objet que tu as beaucoup convoité… Et même si tu as payé ton “cadeau”, c’est tout de même un paquet qu’il t’apporte, tout emballé, comme un présent… »

OBJECTIF PASSION

Qui aurait dit, quand on le croisait étudiant en science politique à l’Université de Montréal à la fin des années 70, que Rémy Simard deviendrait – et rapidement, qui plus est – un illustrateur et bédéiste à temps plein, vivant bien de son crayon ? Bien sûr, il dessinait à l’époque une petite série BD dans le journal étudiant Le Continuum, mais quand même… « C’est vrai que ce n’était pas un objectif dans ce temps-là », reconnaît-il en riant.

Mais qu’importe l’objectif, pourvu qu’on ait la passion. De dessins en illustrations, de planches en BD, il est bel et bien devenu « dessinateur » et auteur, multipliant les publications, collaborations, nominations, etc. Il a aussi tâté de l’édition pendant plusieurs années…

Ensuite, la maison d’édition La Pastèque a publié l’intégrale de sa bande dessinée Boris (2012) et l’a invité, l’an dernier, à participer à l’exposition collective pour les 15 ans de La Pastèque au Musée des beaux-arts. Avant de lui proposer de dessiner ce « guide pratique » pour les collectionneurs…

Et avant que le Salon du livre de Montréal lui demande d’être l’un de ses invités d’honneur : « Ça me fait vraiment plaisir, dit Rémy Simard. Je n’aime pas beaucoup voir du monde… mais j’aime vraiment rencontrer les lecteurs ! »

Rémy Simard sera au stand de La Pastèque (246) samedi et dimanche, mais aussi à celui de la Bagnole (546) samedi pour son livre L’incroyable aventure de Matisse et des vaches lunaires, et à celui de Boréal (400) dimanche pour Le rayon gommant.

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