Exposition sur les barrières frontalières

Déconstruire les murs

Ils étaient 50 en 2011. Ils sont 74 aujourd’hui. Les barrières et les murs frontaliers poussent partout sur la planète, comme autant de mauvaises réponses à des conflits que l’on ne parvient pas à résoudre autrement.

Près de 30 ans après la chute du mur de Berlin, une dizaine de ces nouvelles constructions sont apparues en Europe même, faisant obstacle aux déplacements humains notamment entre la Bulgarie et la Turquie, ou encore entre la Russie et l’Ukraine, la Norvège et les États baltes.

Cette prolifération des murs frontaliers, c’est le point de départ du documentariste et artiste visuel Martin Bureau, dont l’exposition Les murs du désordre vient d’ouvrir à la Cinémathèque québécoise.

Martin Bureau a choisi de se pencher sur trois cas concrets de séparations territoriales : le mur entre Israël et la Palestine, celui qui court le long de la frontière entre les États-Unis et le Mexique, et le lacis de murs entre communautés catholiques et protestantes en Irlande du Nord.

Trois situations qui englobent une variété de situations justifiant, le plus souvent à tort, la construction d’un mur frontalier. Qu’il s’agisse de la peur du terrorisme, de la lutte contre la contrebande et le trafic humain, ou encore de la protection contre des conflits sectaires, toutes ces justifications sont des gestes de « théâtre politique » visant d’abord et avant tout à répondre à des impératifs de politique intérieure, affirme Élisabeth Vallet, chercheuse à la Chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM, qui s’intéresse à la problématique des murs et qui a collaboré au projet de Martin Bureau. « Un mur, c’est l’affirmation visuelle d’une incapacité sociale et politique », résume l’artiste, selon qui chacune de ces délimitations physiques est basée sur une série de mensonges.

Donner la parole

Son exposition est une œuvre multidisciplinaire et interactive consistant en une installation où de courtes présentations audiovisuelles projetées sur trois écrans racontent l’histoire de chacun de ces murs, sur une trame sonore reproduisant l’univers sensoriel entourant les murs. Un bruit d’hélicoptère, une vibration, les chiens qui aboient, autant de sons qui contribuent à un sentiment d’oppression et de chaos.

Chacun des courts films dure de deux à trois minutes et donne la parole aux différents acteurs, des deux côtés de chacune des barrières.

Tandis qu’une ouverture dans chacun de ces écrans permet de voir la vie qui se déroule de l’autre côté du mur.

L’artiste ne prétend pas à « l’objectivité globale ». 

« J’ai un point de vue critique sur les murs, ils créent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent. »

— Martin Bureau, qui signe l’exposition Les murs du désordre

L’exposition s’ouvre en pleine crise politique causée par le projet de mur que le président Donald Trump veut ériger à la frontière américano-mexicaine. Exemple parfait de justifications mensongères qui incitent à investir dans le béton et les barbelés. « Il y a plus de gens qui quittent les États-Unis qu’il n’y en a qui y arrivent », précise l’un des intervenants interviewés par Martin Bureau, ce qui contredit l’idée reçue et largement propagée par l’actuel président des États-Unis.

Parallèlement à l’exposition interactive, Martin Bureau a aussi réalisé une série de webdocumentaires sur le sujet, qui seront mis en ligne le 21 février.

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