Recomposition 101

Les éditions du CHU Sainte-Justine publient ces jours-ci une deuxième édition d’un des rares livres sur la recomposition familiale : La famille recomposée, des escales, mais quel voyage ! Étrangement, alors que 80 % des enfants de familles séparées vivront un jour une recomposition, il existe très peu d’ouvrages comme celui-ci. Tour d’horizon du phénomène, des défis qui l’accompagnent et quelques conseils de survie.

COMPLIQUÉ

Pour plusieurs, famille recomposée rime avec compliqué. Ce n’est pas faux, mais encore faut-il comprendre pourquoi. « C’est parce que dans les premières années, on a beaucoup de choses à négocier », fait valoir la coauteure Claudine Parent, professeure à l’École de service social de l’Université Laval. Un couple traditionnel a le temps de s’apprivoiser. Pas ici. « Ici, les enfants arrivent tout de suite. Il faut solidifier les liens conjugaux et, en même temps, travailler ensemble l’éducation des enfants. » D’où la complication.

DÉFIS PARTICULIERS

Comme dans toutes les familles, on doit ici négocier le partage des tâches, le quotidien, le qui fait quoi. En prime, dans une famille recomposée, le beau-parent doit construire une relation avec un enfant qui n’est pas le sien (« Et ça prend du temps, et de la patience ! »), trouver du temps pour son couple à travers les différentes gardes et définir son rôle et son investissement.

PAS OBLIGÉS DE S’AIMER

Étrangement, non, il n’est pas obligatoire pour le beau-parent et l’enfant de s’aimer. « Ce n’est pas nécessaire. Ça se peut qu’il n’y ait pas d’affinités », souligne l’auteure, pour la simple et bonne raison que cette relation n’est pas choisie, mais bien « imposée ». « L’amour n’est pas instantané, mais il faut absolument qu’il y ait du respect dans les deux sens », nuance-t-elle. Évidemment, si amour il y a, « c’est un petit plus ». À noter : parfois, cette relation ne s’épanouit qu’une fois l’enfant parti du nid. Une situation qui n’est pas unique aux familles recomposées, faut-il le rappeler.

CINQ ANS

Quand est-ce qu’une famille recomposée acquiert son rythme de croisière, et que tous ses membres se sentent enfin « véritablement bien » et « en harmonie » ? Une chercheuse américaine a analysé les étapes de développement de ces familles. Son verdict ? Cinq ans. « Des fois, ça peut prendre moins de temps, selon l’âge des enfants, la présence ou non de l’ex-conjoint », nuance Claudine Parent. À savoir : une fois ce chiffre magique dépassé, ces familles ne sont ni plus ni moins susceptibles d’exploser que la moyenne des familles biparentales intactes.

TRUCS DE SURVIE

Non, il n’existe pas de modèle ou de recette miracle. Malheureusement. N’empêche. Claudine Parent y va de quelques conseils. Pour le parent : préparer l’enfant, lui présenter le nouveau conjoint (« Pour le rassurer »). Au beau-parent : observer la famille pour comprendre son fonctionnement, discuter des rôles et responsabilités de chacun, s’intéresser à l’enfant (« Pour créer des souvenirs »), prendre son temps avant de jouer un rôle d’autorité, rencontrer l’autre parent. Aux deux : écouter les enfants (« Il faut être ouvert aux communications des jeunes pour savoir sur quel pied danser. Et être capable de les entendre ! »), être patient et surtout, surtout, avoir des attentes réalistes. « Si nos attentes sont basses, on ne peut qu’avoir de belles surprises ! »

LE LIVRE

Depuis 2002, date de la première édition, la recherche sur la question s’est beaucoup développée. Cette nouvelle publication, bonifiée d’une centaine de pages, révèle les dernières connaissances en matière de défis, d’adaptation et de discipline dans ces familles recomposées. Comme tout indique que le phénomène devrait continuer de prendre de l’ampleur dans les années à venir, plusieurs sujets restent à creuser. Parmi ceux-ci : le rôle des beaux-grands-parents et les liens entre les enfants et leurs beaux-parents vieillissants. À suivre.

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