Dopage sportif

Il y aura aussi des positifs à Vancouver, annonce Ayotte

Les nouveaux contrôles antidopage d’échantillons de Pékin et Londres ne cessent de produire des cas positifs. La réouverture des échantillons a permis de pincer à ce jour 98 autres athlètes. Directrice du laboratoire antidopage de Montréal, Christiane Ayotte explique le processus des « retests ». Elle prévient qu’il y aura aussi de nouveaux cas positifs le jour où les échantillons des Jeux de Vancouver seront rouverts.

Pourquoi autant de cas positifs ?

Les nouveaux contrôles ont surtout été faits en mai et en juillet. On parle de 98 positifs jusqu’à maintenant : 60 à Pékin et 38 à Londres. C’est quand même phénoménal, c’est presque un échantillon sur 10 retesté qui est positif. Il faut dire qu’ils ont ciblé les groupes plus à risque. C’est quand même épouvantable comme nombre. Comment expliquer cela ? Depuis Pékin, les moyens techniques et les connaissances ont augmenté de manière considérable. En gros, on a eu un gain de sensibilité au centuple. C’est-à-dire qu’on est capables de détecter des traces 100 fois plus petites.

Pourquoi retrouve-t-on surtout les deux mêmes substances dopantes ?

C’est surtout le Stanozolol et le Turinabol. Prenons le Turibanol, par exemple. En Allemagne de l’Est, ils avaient leur propre compagnie pharmaceutique d’État, qui s’appelait Jenapharm. Jenapharm fabriquait ce Turinabol qui était donné aux athlètes, particulièrement aux athlètes féminines. Quand le mur est tombé, on a tout su ça grâce aux documents de la Stasi. Ce produit a cessé d’exister dans les années 80. Donc, dans mon laboratoire, on n’avait aucun cas de Turinabol jusqu’en 2010. On était mal équipés pour détecter cette substance jusqu’à Pékin et même un peu jusqu’à Londres. Ça explique donc pourquoi les retests détectent maintenant le Turibanol.

Donc, à Vancouver, il pourrait aussi y avoir des cas ?

Oui. Quand ils vont revoir les échantillons de Vancouver que nous analysions en 2010, je peux vous dire qu’ils vont en attraper encore. Parce que nous, nous n’avions pas la capacité de détecter le Turinabol et le Stanozolol à long terme. Imaginez qu’à l’époque, on pouvait détecter un stéroïde seulement s’il avait été consommé trois jours ou moins avant la prise d’échantillon. Eh bien maintenant, on peut le détecter pendant deux mois. C’est une différence énorme. Si l’athlète l’a pris trois semaines avant sa compétition, en 2010, on ne l’attrapait pas. Mais au retest, on l’attraperait.

Les critiques envers l’Agence mondiale antidopage (AMA) vous attristent-elles ?

Je suis fâchée. On a vu cette semaine un vice-président du Comité international olympique (CIO), Gian-Franco Kasper, aller dire qu’il n’y avait aucune preuve de dopage d’État en Russie… Je trouve ça épouvantable de remettre en question ce qui a été documenté dans le rapport McLaren. Et son deuxième rapport (qui sera rendu public le 9 décembre, NDLR) sera encore pire. Le CIO veut punir l’AMA parce que l’AMA a appuyé la position de plusieurs agences antidopage de bannir la Russie des Jeux de Rio. Ça a mis le CIO dans l’embarras et maintenant ils veulent se venger. Je trouve ça tout à fait déplorable. D’ailleurs, au nom des laboratoires, j’ai écrit au CIO pour leur faire savoir que c’était tout à fait contre-productif, leur façon de faire.

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