maison hope & cope

Faire du yoga malgré un cancer

Elles n’enchaînent pas sans arrêt les salutations au soleil et elles ne poussent par leur corps vers la performance, avec des torsions, des équilibres ou des positions en force. Pourtant, c’est bel et bien du yoga que pratiquent des centaines de personnes atteintes d'un cancer à la maison Hope & Cope de Montréal, une organisation pionnière dans le domaine au Québec.

Certains sont en rémission, d’autres viennent tout juste d’apprendre que la maladie se déploie dans leur corps, et quelques-uns viennent même en classe après des traitements de chimiothérapie. Peu importe l’étape qu’ils traversent, les participants se rejoignent dans un immense local lumineux afin de penser, pour un instant, à autre chose que le cancer. « Les cours de yoga nous aident à éloigner notre esprit du cercle vicieux des pensées angoissantes et à construire une bulle de mieux-être », explique Régine Breyton, qui a suivi des cours environ cinq mois après la fin de son cancer, avec l’autorisation de son médecin.

Les professeurs chez Hope & Cope ont accès aux indications des médecins sur les possibilités et les limitations de chaque personne. En plus, bien sûr, de donner leurs cours en délicatesse. « Les gens qui ont eu de la chimio avant de venir au cours sont parfois épuisés », souligne l’enseignante Noémie Crépeau-Parizeau. 

« Il n’y a pas d’espace pour pousser leur corps. De toute façon, pousser, c’est aller vers la performance, vers l’extérieur. Et on veut surtout rétablir un lien vers l’intérieur, avec de petits mouvements, des étirements, des exercices de respiration, des bâillements, etc. »

— Noémie Crépeau-Parizeau

Une posture d’enseignement que seuls des professeurs très à l’écoute peuvent offrir, selon Marcelle Kecman, coordonnatrice à la maison Hope & Cope. « Notre équipe connaît très bien comment composer avec le cancer, dit-elle. Tout ce qu’on fait chez nous, ce n’est pas par coïncidence. Depuis longtemps, c’est prouvé que le yoga aide à survivre au cancer, en accompagnant les traitements. » Elle souligne que personne ne planifie avoir un cancer et que les cours de yoga aident les patients à reprendre un peu le contrôle de leur vie.

équilibre intérieur

De son côté, Noémie Crépeau-Parizeau parle d’une nouvelle posture intérieure face à la vie. « Le cancer génère et révèle tellement de tensions que les gens sont dépassés, affirme-t-elle. Ils n’ont plus d’outils concrets pour s’apaiser. Mais les cours les aident à développer une emprise sur eux-mêmes, à développer un rapport différent avec la souffrance et à induire des états de bien-être. »

Comment ? D’abord, elle explique aux participants que la détente est une expérience ressentie autant que la tension. Puis, elle leur montre des techniques de respiration et des exercices pour prendre conscience des états qui les habitent. « Nommer son état émotif, physique ou mental, c’est une chose, mais l’accueillir sans le fuir et apprendre à se détendre là-dedans, c’en est une autre, illustre-t-elle. Le but est de ne pas seulement accueillir ce qui se passe par la pensée, mais aussi par le senti, en établissant des repères sensoriels en soi. » Avec le temps, ces repères permettent aux participants de retrouver un chemin vers la détente, à travers des états de grands inconforts comme ceux causés par un cancer.

Par la suite, ils sont invités à développer leur concentration et à l’orienter vers les plus belles parties d’eux-mêmes, malgré les épreuves qu’ils traversent. « On a le choix de se concentrer sur la bienveillance en nous et de la cultiver au quotidien pour éveiller un état de calme, affirme Noémie Crépeau-Parizeau. Si, tous les jours, nous laissons notre attention dériver vers la résolution de problème, nous allons toujours nous concentrer là-dessus. » 

« Évidemment, l’idée n’est pas de ne plus penser au cancer ou à ses soucis, mais de créer un espace dans sa vie où l’on nourrit quelque chose qui génère du bien-être. »

— Noémie Crépeau-Parizeau

Les enseignants de yoga chez Hope & Cope ne prétendent pas guérir les malades du cancer, mais ils les guident vers un équilibre intérieur bienfaiteur. « C’est un complément thérapeutique aux traitements médicaux. Comme une oasis pendant ou après le cancer », révèle l’ancienne participante Régine Breyton.

Les cours sont accessibles gratuitement aux personnes atteintes d'un cancer ou en rémission depuis moins de deux ans. L’organisation est d’ailleurs menée dans un esprit communautaire et financée par la collectivité, sans subvention des gouvernements ou des hôpitaux, malgré la collaboration étroite avec plusieurs oncologues de l’Hôpital général juif. La maison offre également des cours de taï-chi, de danse aérobique et de Qi Gong, tous donnés par des professeurs bénévoles.

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