Critique

Carburant noir

Chanson
Cette chose qui cognait au creux de sa poitrine sans vouloir s’arrêter
Antoine Corriveau
Coyote Records
4 étoiles

C’est très foncé, c’est très beau. À prendre à petites doses, car ça gèle plus fort que le spleen. Les chansons défilent dans la pénombre, on pense à Angelo Badalamenti (Twin Peaks), à l’album de Portishead avec cordes, au travail de Georges Delerue (Platoon) et autres déploiements orchestraux issus de périodes antérieures à la nôtre. Et oui, ça saute aux oreilles lorsqu’on tombe sur les arrangements et la structure harmonique de Juste un peu, qui rappellent étrangement Le chat du café des artistes, très grand cru de Jean-Pierre Ferland. Or, nous sommes en 2016, de jeunes Kebs (Nicolas Grou, Marianne Houle, Rose Normandin) se plaisent (enfin !) à tisser de l’indie folk de chambre et du trip hop orchestral avec les meilleures chansons francophones d’Amérique au programme automnal : celles du doué Antoine Corriveau, un type aux humeurs noires, néanmoins (sur)vivant, poétiquement nourri aux rendez-vous volontairement loupés, aux atterrissages forcés, aux « hydravions qui s’écrasent sous l’eau », aux « désirs endormis », aux « points de départ ou de fuite », aux « trous à rats » et autres descentes en spirale. Baissez les stores, fermez lumières, reculez l’heure. Novembre ne cessera jamais. — Alain Brunet, La Presse

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