Cyclisme

Duchesne
dans le WorldTour

Le coureur québécois est embauché par l’équipe française FDJ

Avant les Grands Prix de Québec et de Montréal, l’avenir sportif d’Antoine Duchesne paraissait bien morose. Largué par son équipe Direct Energie, dont le patron s’était offusqué qu’il flirte ailleurs, le cycliste de Saguenay se retrouvait sans rien à l’issue d’une année difficile.

Des engagements ne se matérialisaient pas, la saison des transferts tirait à sa fin et la formation Cannondale menaçait de fermer et d’ainsi remettre une trentaine de coureurs sur le marché.

Devant les journalistes, Duchesne tentait de garder le moral. En privé, il se demandait s’il n’aurait pas à retourner sur les bancs d’école en janvier. « J’ai peur de me ramasser avec les miettes », s’inquiétait-il alors.

Deux semaines plus tard, revirement de situation : il a signé lundi un contrat d’un an avec FDJ, équipe française membre du WorldTour, le circuit le plus relevé de l’Union cycliste internationale.

« C’est une super équipe, une place où je pense pouvoir grandir. Le groupe a l’air le fun, c’est du beau changement. Je vais être capable de franchir un autre palier », a commenté Duchesne, hier, de retour au Québec après sa participation à la course sur route des Championnats du monde de Bergenl, en Norvège, dimanche.

Après les GP québécois, l’athlète de 26 ans dit avoir reçu des offres de contrat de deux autres équipes du WorldTour, ce qui aurait fait débloquer les pourparlers qui s’étiraient avec la FDJ.

« J’avais quand même confiance de me retrouver dans une bonne équipe, mais le fait que je n’avais plus de plan B avec Direct Energie permettait aux équipes de me soumettre des offres basses, a-t-il noté. Trois offres sont arrivées en même temps, ce qui m’a mis dans une meilleure position et permis de finir avec quelque chose de très respectable. »

Mission : épauler Démare

Avec la formation au trèfle à quatre feuilles, Duchesne aura pour principale fonction d’épauler le sprinter vedette Arnaud Démare, champion national, vainqueur d’étape au Tour de France et gagnant de Milan-San Remo en 2016.

« C’est vraiment quelqu’un que j’apprécie, a-t-il souligné. Sa réputation en tant que leader... c’est un grand. C’est un gars simple, humble, reconnaissant. Il ne fait pas juste dire merci à ses coéquipiers pour avoir l’air fin. Il est très proche de ses coureurs. Ton travail est bien récompensé. C’est une chose que je recherchais et que j’avais envie de retrouver. »

Démare s’est lui-même enquis de la disponibilité de Duchesne l’an dernier et encore une fois lors d’un appel téléphonique en mai. Les deux hommes se sont connus au Tour de l’Abitibi en 2008. L’hiver suivant, à l’aube de sa deuxième année junior, Duchesne est parti s’installer en banlieue de Lille, où il a retrouvé Démare au Team Wasquehal. Ils ont gardé un bon contact depuis. L’entraîneur Sébastien Joly, que Duchesne a rencontré à son arrivée chez Europcar, l’aurait aussi recommandé auprès du manager Marc Madiot.

De prime abord, Duchesne ne fera pas partie à proprement parler du train de sprint de Démare, dont l’effectif entier revient en 2018. Comme le Néerlandais Ramon Sinkeldam, un autre nouveau venu chez FDJ, le Québécois s’emploiera surtout à accompagner le champion français le plus loin possible dans les classiques printanières comme Milan-San Remo, le Tour des Flandres ou Paris-Roubaix, courses chères à Madiot. Dans les cas d’arrivées au sprint sur les épreuves par étapes, il aura pour tâche de rouler devant le peloton.

« Ça ne veut pas dire que je ne pourrai pas en gagner une de temps en temps, mais je suis vraiment bon pour faire cette job-là et j’aime ça, a indiqué Duchesne. Souvent, tu es oublié et tu as moins d’attention dans les médias, mais ce n’est vraiment pas ce que je recherche. »

À l’étroit chez Direct Energie

Contrairement à Direct Energie, qui détient une licence pro continentale (deuxième division), la FDJ a une place garantie dans les trois grands tours. Duchesne rêve d’une première participation au Tour d’Italie. Deuxième Québécois à avoir terminé le Tour de France en 2016, il croit en ses chances d’y revenir en 2018, même si les équipes passeront de neuf à huit partants. En plus de Démare, la FDJ compte sur Thibaut Pinot, troisième du Tour 2014 et quatrième du dernier Tour d’Italie.

« Je peux être utile à épauler un sprinter comme passer une journée dans le vent à protéger un grimpeur. »

— Antoine Duchesne

L’ex-double champion canadien chez les moins de 23 ans a roulé les quatre dernières saisons sous les couleurs de Direct Energie (anciennement Europcar), structure vendéenne pilotée par le manager Jean-René Bernaudeau. Ce dernier n’aurait pas aimé apprendre que son coureur québécois avait engagé des agents l’automne dernier. Avant le début du Tour, il lui a sèchement signifié qu’il ne le reprendrait pas en 2018.

Indirectement, Duchesne admet qu’il se sentait parfois à l’étroit chez Direct Energie, dont il était le seul membre étranger avec son compatriote Ryan Anderson, lui aussi sur son départ. « [Chez FDJ], à peu près la moitié de l’équipe est non française. Il va y avoir une plus grande ouverture d’esprit que ce que j’avais avant. Des fois, c’est dur quand tu es le seul étranger. Oui, je parle la langue, mais il reste que ce n’est pas la même chose. Tu es le seul qui vient d’une autre place. Dans une équipe beaucoup plus internationale, je pense être capable d’encore plus trouver ma place. »

FDJ dispose aussi d’un budget supérieur à celui de Direct Energie (10 millions d’euros par rapport à 6 millions, selon L’Équipe), ce qui devrait paraître dans tous les échelons de l’organisation, anticipe la recrue. Duchesne fera connaissance avec les dirigeants et ses nouveaux coéquipiers lors d’une rencontre technique dans quelques semaines, à Besançon.

« Je suis encore jeune, je pense que vous n’avez encore rien vu de ce dont je suis capable, a-t-il prévenu en fin d’entrevue. J’ai une grande confiance envers le futur. » Manifestement, la FDJ pense la même chose.

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