RÉPLIQUE

ÉDUCATION L’iPad a le dos large !

En réponse au texte de Julie du Page « Trop, c’est comme pas assez ! » publié dimanche dernier

Pour certains d’entre nous, l’iPad a fait sa rentrée dans nos classes dès septembre 2012. Depuis, plusieurs écoles ont emboîté le pas et chaque année, de nouvelles écoles québécoises se dotent de ces appareils pour les intégrer aux activités pédagogiques.

Aujourd’hui, ce sont plus de 120 000 iPad qui se retrouvent entre les mains des jeunes Québécois. Puisque nous utilisons des iPad dans nos écoles, nous croyons être en bonne position pour témoigner des réussites et des défis en lien avec ce déploiement.

Le but de ce texte n’est pas de faire une infopub pour Apple. Cependant, le choix semble s’être naturellement porté sur cet appareil pour les raisons suivantes : portabilité, durée de la pile, pléthore d’applications disponibles, convivialité, utilisation de l’appareil photo, présence d’une communauté de partage d’expériences, services et développement d’Apple Éducation, etc.

Pour superviser l’ensemble des services pédagogiques dans nos écoles respectives, nous pouvons témoigner quotidiennement de la richesse des activités pédagogiques menées par nos enseignants, lesquelles font appel, par exemple, aux réalités virtuelle et augmentée, à la prise de notes alternatives (sketchnoting), nouvelles approches pédagogiques (comme le « Visible Thinking », une approche développée à l’Université Harvard), facilitation de la collaboration entre les élèves, photo et vidéo sur écran vert, montage vidéo intégré, etc.

De plus, nous avons constaté que l’utilisation de l’iPad avec une application comme Studyo (d’ailleurs conçue au Québec) contribue grandement à aider nos jeunes à développer leurs fonctions exécutives, notamment à mieux s’organiser sur le plan de la gestion des devoirs, de leur étude et des travaux à remettre.

Cela n’est qu’un simple échantillon de ce qui se fait dans nos écoles, où la créativité et l’ingéniosité pédagogiques de nos enseignants sont augmentées par un outil pédagogique polyvalent.

Cette implantation n’a pas été prise à la légère. Elle est le résultat de consultations de nos enseignants, de nos parents et de nos élèves qui ont donné lieu à des formations pour tous ces intervenants. Nous avons consulté des experts de plusieurs domaines : ingénieurs, informaticiens, chercheurs, pédiatres, optométristes, neuropsychologues, pédagogues, didacticiens, etc. Nous avons lu des dizaines de rapports, recherches et diverses communications. Absolument rien n’a été laissé au hasard.

Le retour du balancier

Évidemment, bien que nos implantations se soient déroulées de différentes façons, l’entreprise n’a pas suivi une trajectoire rectiligne uniforme ! Oui, la situation des élèves qui perdent leur temps en classe existe. Oui, nous aussi, nous sommes préoccupés par le temps d’exposition aux écrans. Oui, les sextos, la cyberintimidation, le jeu compulsif et l’hameçonnage nous préoccupent aussi. Sans nier l’existence de ces problématiques, quatre constats doivent cependant être faits.

1. Il est faux de prétendre que c’est la majorité de nos élèves qui perdent leur temps en classe ;

2. Nous réalisons que ces problèmes existent aussi dans d’autres écoles qui n’intègrent pas l’iPad ;

3. L’iPad demeure un outil d’apprentissage au même titre que les romans, les crayons et le papier. Si c’était à refaire, nous prendrions la même décision. Une bonne majorité de nos élèves apprécient l’outil, et il en va de même pour leurs parents. Nos enseignants, qui vivent ce changement de façon intense puisque l’outil redéfinit leurs approches et les pousse à innover dans leur pédagogie, apprécient aussi l’outil. Il faut comprendre que l’iPad a amené les enseignants à se remettre en question, et ce sont ces réflexions qui mènent à des pédagogies plus actives et différenciées pour les élèves.

4. Nous ne sommes pas dupes, il n’y a pas d’application pour l’engagement des élèves dans leurs apprentissages, et ceci demeure au cœur de nos préoccupations.

De plus, dans certaines de nos écoles, depuis plus d’un an, Apple offre l’application En classe qui permet à l’enseignant de superviser les écrans de ses élèves en temps réel.

Enfin, n’oublions pas que diverses activités d’éducation à la citoyenneté numérique ont lieu dans nos écoles sous la houlette des enseignants et de divers intervenants. Puisque la grande majorité des élèves possède un outil numérique personnel (téléphone, tablette, ordinateur, etc.), il est d’autant plus important de leur montrer à utiliser cette technologie de façon sécuritaire et responsable. En plus d’être scolaires, les apprentissages avec la tablette sont une occasion d’ouverture face à l’utilisation des technologies et de civisme numérique.

L’iPad est un outil imparfait. Il trouve toute sa pertinence dans l’utilisation que l’enseignant ET l’élève en font conjointement et simultanément.

Peut-être lui avons-nous (lire un « nous » inclusif : parents, enseignants, directions, etc.) trop fait porter le fardeau de faire passer l’éducation au XXIe siècle ?

Bref, nous sommes conscients qu’il n’est pas la panacée, mais il n’est pas non plus le responsable de tous les maux de la société, de l’école ou de l’adolescence. Qu’à cela ne tienne, ces prétendues dérives sont largement exagérées.

Devrions-nous tout recommencer et retourner à ce que nous faisions avant l’avènement de l’iPad dans nos milieux ? Ou devrions-nous tout interdire ? Bloquer les médias sociaux, iMessage, l’internet ? L’appareil photo ? Souhaitons-nous contraindre l’élève ou le préparer, le responsabiliser et l’éduquer à utiliser ces outils connectés ? La peur et la contrainte n’ont jamais donné de bons résultats dans le monde de l’éducation.

Enfin, avez-vous remarqué que les astronautes qui viennent de quitter la Terre avaient un iPad entre leurs mains pendant leur périple vers la Station spatiale internationale ?

* Signataires

Annick Claveau, directrice des services éducatifs au collège Saint-Jean-Vianney ; Nathalie Lemelin, directrice du développement et de l’innovation pédagogiques au collège de Montréal ; et Marie-Josée Veilleux, directrice des services pédagogiques au collège Jean-Eudes

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