États-Unis

La peine de mort en net recul

La peine de mort ne cesse de perdre en popularité aux États-Unis, où le nombre de condamnations et d’exécutions est au plus bas depuis des décennies. La disparition pure et simple de cette pratique n’est cependant pas pour demain, suggère un nouveau rapport dévoilé hier.

Qu’indiquent les plus récentes statistiques ?

Le Death Penalty Information Center (DPIC), un groupe de recherche qui suit de près l’évolution des pratiques dans ce domaine à l’échelle des États-Unis, relève dans son plus récent rapport que 30 personnes ont été condamnées à mort en 2016. Ce total représente une baisse de 30 % par rapport à 2015 et un peu moins de 10 % du nombre record de 315 condamnations enregistré en 1996. Une vingtaine d’exécutions ont eu lieu cette année comparativement au sommet de 98 enregistré en 1999, soit une baisse de l’ordre de 80 %. Une demi-douzaine d’États, Texas et Géorgie en tête, ont réalisé l’ensemble des exécutions. Le pourcentage de la population appuyant la peine de mort continue parallèlement de chuter et serait même passé sous la barre des 50 % pour la première fois en 45 ans, selon une étude du Pew Research Center.

Qu’est-ce qui explique ces tendances ?

Le directeur du DPIC, Robert Dunham, indique que plusieurs facteurs alimentent la baisse de popularité de la peine de mort et rendent son utilisation plus rare. Le fait que 156 personnes condamnées à mort aient finalement été blanchies depuis 40 ans a convaincu nombre de personnes, note l’analyste, qu’il existe un risque important de « faire exécuter des innocents ». La baisse du nombre de meurtres a aussi joué statistiquement et rendu les jurys plus réticents au recours à des sanctions aussi sévères. Le caractère « systématiquement arbitraire » de la peine de mort alimente aussi son impopularité, relève M. Dunham. Les probabilités qu’une personne soit condamnée à la peine capitale varient, explique-t-il, en fonction de la couleur de leur peau, mais aussi de l’endroit où le crime est survenu et de la conviction du procureur local. « Son application ne semble pas reposer sur des principes invariables », note-t-il.

Les exécutions bâclées ont-elles aussi un impact ?

Plusieurs cas d’exécutions bâclées ayant été largement médiatisés au cours des dernières années ont marqué les esprits. En raison d’un boycottage imposé par l’Union européenne, l’accès aux produits traditionnellement utilisés pour les exécutions par injection létale est de plus en plus restreint, ce qui a amené plusieurs États à expérimenter de nouveaux cocktails médicamenteux avec des résultats parfois désastreux. Il y a 10 jours à peine, un autre cas problématique est survenu en Alabama, où un homme de 45 ans condamné pour meurtre est mort après avoir subi des convulsions pendant plusieurs minutes. Une situation similaire avait amené le gouvernement de l’Oklahoma à lancer une enquête sur le travail des autorités carcérales en 2015. Aucune exécution n’a eu lieu dans cet État en 2016.

La peine de mort va-t-elle disparaître purement et simplement ?

Bien que le recours à la peine de mort aux États-Unis soit de plus en plus rare, il serait prématuré de prévoir sa disparition en bonne et due forme, prévient Robert Dunham. Il n’est pas impossible qu’un jour la Cour suprême décide de la déclarer contraire à la Constitution en se basant, par exemple, sur son caractère « arbitraire », relève le directeur du DPIC. L’opposition croissante de la population peut favoriser une intervention en ce sens, mais il ne semble pas qu’une majorité des juges du plus haut tribunal du pays veuillent se saisir du fond de la question pour l’instant, indique l’analyste. L’arrivée au pouvoir de Donald Trump – qui a réclamé durant la campagne présidentielle l’application systématique de la peine de mort pour les personnes ayant tué des policiers – est une autre inconnue. Le président désigné devrait notamment proposer un nouveau juge aux tendances conservatrices à la Cour suprême qui pourrait avoir une incidence sur les orientations du tribunal relativement à la peine de mort, croit M. Dunham. « C’est trop tôt pour savoir ce qu’il va faire », conclut-il.

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