Mon Clin d’œil

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Témoignage

L’école « des ingérables » ne doit pas mourir ! 

Monsieur le ministre de l’Éducation, aidez-nous à sauver « mon » école. C’est une école extraordinaire qui m’a aidée à éviter de justesse de décrocher à l’adolescence, avec tout ce qui s’en serait suivi de mésadaptation sociale.

Mais dans un an, M. le ministre, cette merveilleuse école, le Centre d’intégration scolaire de Montréal (CIS) comme on l’appelle, risque sérieusement de fermer ses portes. Comme vous le savez déjà, le CIS sera alors définitivement chassé de l’édifice de la Commission scolaire de Montréal qu’il occupe, pour répondre au boom démographique auquel fait face la CSDM. 

Le problème, c’est que le CIS n’a pas les sous nécessaires pour se replacer ailleurs sur le territoire de Montréal. Pourquoi ? Parce que cette « école de la dernière chance », comme certains la qualifient, qui est entièrement financée par les deniers publics – soit les sommes que lui versent les sept commissions scolaires qui font appel à ses services en lui transférant des élèves de 8 à 18 ans, jugés « ingérables » –, est considérée par vous, M. Proulx, et vos fonctionnaires comme une école privée. « École privée », dites-vous parce qu’elle n’appartient à aucune commission scolaire spécifique ! 

Et c’est à cause de cela que votre cabinet nous a informés qu’elle n’est admissible à aucune subvention gouvernementale pour son déménagement ni pour son réaménagement dans un autre édifice, qu’il lui faudrait évidemment transformer en école. 

Bref, cette sorte d’abstraction administrative d’école privée qui n’en est pas une risque d’empêcher des élèves comme moi, sur la voie du décrochage scolaire et social, de bénéficier des ressources nécessaires pour pouvoir croire à nouveau dans un système qui les a si souvent rejetés. 

Encore une fois, on semble « nous » mettre de côté, nous les « ingérables » ! Est-ce là votre vision du soutien à la persévérance scolaire, M. le ministre ? J’ai du mal à le croire. 

M. Proulx, j’ai personnellement fait partie de ces jeunes à haut risque de décrochage qui fréquentent le CIS. Mon parcours scolaire avait en fait très mal commencé. Avant même de terminer mon secondaire 2, j’avais fréquenté 13 écoles. Étiquetée « trouble de comportement », etc., je n’arrivais pas à évoluer dans un système scolaire que j’estimais peu flexible, routinier et qui ne croyait pas en moi. Même si j’étais douée, j’accumulais les échecs et je ne souhaitais rien d’autre que de quitter l’école pour de bon. 

Une dernière chance fructueuse

En fait, c’est l’école que je fréquentais alors qui a pris les devants et m’a mise à la porte. J’avais 15 ans. Heureusement, il y avait une ressource pour des élèves comme moi : le Centre d’intégration scolaire. Là, une équipe d’éducateurs et d’enseignants spécialisés m’a accueillie et, sans complaisance mais avec beaucoup de dévouement et d’ouverture, m’a redonné confiance, et permis de croire au système d’éducation québécois. 

Et devinez quoi ? Pour la première fois depuis longtemps, j’ai cru en mes capacités, j’étais de nouveau motivée ! Aujourd’hui, moi, « la cause perdue », je termine mon baccalauréat en communication, je suis devenue une adulte responsable et je siège même au conseil d’administration du CIS. Un parcours dont je suis fière ! 

C’est pourquoi moi, Stéphanie, et tous les élèves qui cosignent cette lettre aujourd’hui, vous supplions, M. le ministre, de réviser vos positions et de soutenir enfin concrètement l’une des rares institutions publiques qui se spécialisent dans l’intégration scolaire d’élèves trop souvent rejetés par le système régulier. 

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