Les gouvernements du Québec et du Canada ont franchi, hier, un pas déterminant en vue du prolongement de la ligne bleue du métro jusqu’à Anjou en annonçant des investissements de 362 millions de dollars d’ici 2020 pour achever la planification détaillée de ce projet, attendu depuis presque 40 ans.
Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a assuré que les investissements annoncés marquent une étape « irréversible » vers la construction de ce projet, qui prévoit cinq nouvelles stations dont l’inauguration est maintenant prévue pour 2026. Les travaux de construction devraient débuter en 2021.
Tout en insistant sur le fait qu’« on ne connaîtra les coûts finaux du projet qu’après la fin du processus d’appel d’offres », M. Couillard a confirmé que la valeur du projet est estimée à 3,9 milliards pour un prolongement totalisant 5,8 kilomètres.
Au coût moyen de 672 millions par kilomètre, le nouveau tronçon de la ligne bleue coûtera ainsi quatre fois plus cher à construire que le prolongement du métro de Laval et prendra place parmi les tronçons de métro les plus chers du monde, selon des données compilées dans des études universitaires et dans des sites spécialisés (voir texte de l’onglet suivant).
À cette étape du projet, le gouvernement fédéral ne contribuera que 16 millions aux études préparatoires, soit une somme représentant la moitié des coûts de production d’un dossier d’affaires qui détaillera le coût final du projet ainsi que la l’emplacement des stations, les technologies utilisées et autres éléments déterminants du projet.
En plus de contribuer lui aussi 16 millions à ce dossier d’affaires, le gouvernement du Québec investira une somme totale de 330 millions pour l’achat des terrains et les expropriations requises, la production des plans et devis, une analyse de la valeur, des études détaillées ainsi qu’une « revue indépendante en continu des coûts et échéanciers ».
Le projet sera ensuite soumis pour financement au programme d’infrastructures du gouvernement fédéral à la fin de 2020. La seconde phase de ce programme de 11 ans, qui prévoit des investissements de plus de 5 milliards dans les projets de transports collectifs au Québec, doit commencer en 2019. Le premier ministre Couillard et son homologue fédéral Justin Trudeau, présent hier lors d’un évènement de presse très couru, n’ont pas précisé dans quelle proportion les deux gouvernements financeront le projet de près de 4 milliards.
Cinq stations, deux terminus
Pour sa part, le ministre des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports, André Fortin, a insisté hier pour dire que le projet du prolongement de la ligne bleue, « ça commence maintenant », même si les travaux de construction ne débuteront vraiment que dans environ trois ans.
Il a notamment indiqué que des avis d’expropriation ont été envoyés dès la semaine dernière aux propriétaires de terrains et d’immeubles requis pour l’aménagement de cette ligne qui se prolongera, au-delà de la station Saint-Michel actuelle, dans l’axe de la rue Jean-Talon.
Selon le ministre, quatre des cinq stations auront front sur la rue Jean-Talon à l’angle des boulevards Pie-IX, Viau, Lacordaire et Langelier. La station terminale sera implantée un peu plus au sud, à l’intersection de la rue Bélanger et du boulevard des Galeries-d’Anjou (voir la carte).
Un tunnel piétonnier reliera la station de métro sise à l’angle du boulevard Pie-IX au futur Service rapide par bus (SRB) Pie-IX, un vaste projet de bus express de plus de 300 millions de dollars promis pour 2022 sur cette grande artère nord-sud de l’est de Montréal.
M. Fortin a indiqué que le prolongement de la ligne bleue du métro comprendra deux terminus d’autobus, aux stations d’Anjou et du boulevard Pie-IX. Un vaste stationnement incitatif souterrain sera aussi construit sous le centre commercial Les Galeries d’Anjou, près de la station terminale de la ligne bleue.
Trente ans sans nouvelle station
L’inauguration des nouvelles stations de la ligne bleue, en 2026, marquera une première en presque 40 ans. En effet, la dernière station de métro ayant vu le jour dans l’île de Montréal (la station L’Acadie) a aujourd’hui 30 ans, presque jour pour jour. Elle finalisait la construction du tronçon déjà existant de la ligne bleue qui va de la station Snowdon, au croisement de la ligne orange, jusqu’à la station Saint-Michel.
Les 10 stations originales de la ligne bleue ont été ouvertes au public entre 1986 et 1988.
Depuis, le seul ajout au réseau du métro fut le prolongement vers Laval, qui compte trois stations inaugurées en 2007 après des travaux d’un peu plus de 800 millions.
Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, député de la circonscription fédérale de Papineau, où sont situées 7 de ces 10 stations originales, a lui-même souligné à quel point le prolongement de cette ligne jusqu’à Anjou est attendu par une population qui est historiquement « sous-desservie » en infrastructures de transports en commun.
« Je suis particulièrement heureux de cette annonce, parce que ce projet de prolongement de la ligne bleue jusqu’à Anjou figure parmi les enjeux les plus importants pour les Montréalais qui habitent l’est de l’île de Montréal. »
— Le premier ministre du Canada Justin Trudeau
« C’est quelque chose dont j’entends parler souvent depuis le début de mon aventure en politique, il y a presque 10 ans, en tant que député de Papineau », a poursuivi le premier ministre.
Vers une ligne rose ?
Le projet devrait contribuer à convertir 5300 automobilistes aux transports collectifs, et ce, à chaque heure de pointe du matin, a affirmé Philippe Couillard. Ce transfert modal permettrait de réduire de presque 25 tonnes la production de gaz à effet de serre, responsables des changements climatiques, chaque matin.
Le prolongement de la ligne bleue devrait aussi aider au redéveloppement de l’Est en créant 3700 emplois dans l’axe du métro, en plus d’attirer 11 700 nouvelles familles dans l’est de la métropole.
La mairesse de Montréal, Valérie Plante, ne veut toutefois pas en rester là et a insisté, hier, pour remettre à l’avant le projet-phare de sa campagne victorieuse à la mairie : la ligne rose.
« La problématique de l’engorgement du réseau du métro, notamment sur la ligne orange, est bien réel, et nous devons dès maintenant songer aux prochaines étapes du redéveloppement du métro afin de nous assurer de régler cette situation. C’est pourquoi notre administration continuera de développer le projet de la ligne rose qui permettra de relier l’arrondissement de Montréal-Nord à celui de Lachine, en passant par le centre-ville », a déclaré la mairesse.
« En offrant aux populations de l’est de Montréal et aux usagers de la ligne bleue un accès au centre-ville qui évitera la ligne orange, nous contribuerons à réduire l’engorgement de cette ligne névralgique qui fonctionne présentement à pleine capacité. »
La ligne rose est encore, présentement, à l’état de simple concept, mais la mairesse a promis pour bientôt la création d’un bureau de projet.