Opinion : Bénévolat dans la construction

Visons des ajustements, pas un chamboulement

À la FTQ-Construction, nous sommes favorables au bénévolat. Dans les dernières années, nous avons participé à plusieurs projets qui rejoignaient nos valeurs sociales.

Le bénévolat a sa place dans l’industrie de la construction

Une mère et ses cinq enfants qui avaient perdu leur maison dans un incendie ont eu l’aide de membres bénévoles de la FTQ-Construction pour la reconstruire. La maison de soins palliatifs Victor-Gadbois, sur la Rive-Sud de Montréal, a pu construire une nouvelle aile à l'établissement grâce à la FTQ-Construction. Il y a quelques années, la FTQ-Construction avait également offert des bénévoles pour faire des corvées à la suite de la tragédie à Lac-Mégantic.

Ces exemples illustrent les domaines où le travail bénévole fait par des travailleurs de la construction est le bienvenu.

D’autres travaux faits par des gens qui n’ont pas de carte de compétence pourraient aussi être permis. Pensons à la peinture d’un petit commerce local qui s’apprête à ouvrir ses portes.

Le nouveau règlement pour permettre le bénévolat dans l’industrie de la construction ne va pas du tout dans la même direction.

L’art de se dégager de ses responsabilités

En permettant les travaux bénévoles dans les hôpitaux, les centres de la petite enfance (CPE), les écoles et les organismes sans but lucratif qui remplissent une mission sociale, le gouvernement se désengage et augmente la pression sur les citoyens.

Les taxes et les impôts des familles ne diminueront pas, mais on pourra désormais leur demander de remplacer les fenêtres de l’hôpital, de l’école et du CPE du quartier. Après, on se surprendra d’apprendre que le gouvernement ne veut pas augmenter les investissements dans l’entretien de ces établissements.

Qui pourra blâmer une commission scolaire de ne pas prévoir de budget pour repeindre une école si elle n’a pas besoin de le faire pour que des travaux se réalisent  ? Les parents insatisfaits se feront répondre qu’ils ont juste à prendre les choses en main s’ils ne sont pas contents de l’administration de la commission scolaire.

L’art d’ouvrir grand la porte au travail au noir

En élargissant le champ d’application du travail bénévole, c’est le travail au noir qu’on risque d’encourager. La confusion que ce règlement créera pourra être utilisée par des profiteurs pour payer au noir des travailleurs. Ainsi, un entrepreneur pourrait soumissionner un projet de construction sans s’inquiéter de respecter les mêmes règles que son concurrent.

Du côté gouvernemental, on ne semble pas s’inquiéter de cette possibilité. Pourtant, le travail au noir dans la construction représente déjà un manque à gagner de plus de 1,5 milliard de dollars par année pour le gouvernement. Nos CPE, nos écoles et nos hôpitaux en auraient bien besoin.

L’art d’être incohérent

En 2014, le Parti libéral voulait être le champion de la création d’emplois. On nous promettait la création de 250 000 emplois. Toute l’action gouvernementale devait servir à réaliser cette promesse.

Aujourd’hui, on constate un virage à 180 degrés. Alors que la construction représente un sixième de l’économie québécoise, on veut remplacer des emplois existants par des bénévoles. Le gouvernement croit-il qu’il aidera l’économie québécoise en agissant de la sorte  ?

Le gouvernement n’a pas évalué l’impact de cette réforme sur l’industrie de la construction.

Combien d’emplois dans la construction seront affectés par cette réforme  ? C’est un mystère.

Le gouvernement souhaite faire plaisir aux familles qui veulent améliorer leur communauté. C’est un objectif louable. Mais pour ce faire, faut-il chambouler toute l’industrie de la construction ?

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.