100 idées pour améliorer le Québec Priorité à la santé

Le citoyen aux commandes de son parcours de santé

Lorsqu’on regarde notre système de santé, il n’est pas difficile d’y trouver des services qui n’ont pas été rendus à la hauteur de nos attentes ou des aberrations dans l’organisation des soins.

Cependant, quand vient le temps de trouver des remèdes, au-delà des solutions simplistes, force est de constater que la complexité du réseau incite à l’humilité : la conception centralisée d’un système de santé performant est une tâche complexe où l’allocation des ressources et la satisfaction des attentes de tous sont virtuellement impossibles.

Bien que le patient soit sincèrement une préoccupation constante des acteurs du système, il demeure que la centralisation des décisions et l’articulation du haut vers le bas fait fi de la volonté du patient, du citoyen ou du payeur de taxes d’allouer ses ressources selon ses critères ou ses besoins particuliers, de se faire soigner où il l’entend ou de consentir une part plus ou moins importante de son budget aux soins de santé de sa famille.

Pourtant, les Québécois souhaitent s’engager dans leur santé et non pas simplement subir le système lorsqu’ils sont malades. C’est du moins ce que nos recherches ont clairement démontré1.

Renverser la dynamique

Il ressort de la consultation que nous avons menée au Pôle santé HEC Montréal en 2016 que tant les citoyens que les acteurs du réseau souhaitent renverser la dynamique et remettre les citoyens et les acteurs locaux aux commandes de leurs choix de santé. 

Pour ce faire, le citoyen doit pouvoir exercer une décision éclairée et avoir des choix dans sa consommation et le financement de ses soins et services de santé. Nous devons aussi décentraliser des lieux de décision, de coordination et de prestation des services.

Dans un système ouvert, les établissements les plus performants seraient récompensés par un plus grand achalandage, une marge de manœuvre dégagée par les économies d’échelle conséquentes et de meilleures conditions d’exercice pour l’ensemble du personnel.

À l’opposé, les établissements dont les services laissent à désirer seraient délaissés et leur survie serait remise en question. Si l’argent suivait le patient, les établissements de santé auraient un véritable intérêt à servir les besoins des utilisateurs.

Actuellement, les établissements sont financés sur une base historique et leur appétit à recevoir plus de patients est inexistant, car ils vont simplement devoir servir plus de gens avec le même budget. Leur soif à innover ou à améliorer les services est aussi freinée par un manque de financement et l’obligation d’entrer dans leur budget annuel.

Notre consultation nous a permis d’évaluer l’appréciation des Québécois envers leur système de santé, mais aussi de recueillir leurs idées.

Nous avons ensuite soumis les résultats de cette consultation populaire à la lecture des différents acteurs du système de santé et de services sociaux à travers des discussions en groupe. Tour à tour, médecins, gestionnaires du réseau, chercheurs, fournisseurs de services, syndicats, etc., ont apporté une pierre à l’édifice à travers leurs interventions. 

Ainsi, devant l’insatisfaction récurrente des Québécois eu égard à leur système et à la performance mitigée de celui-ci comparativement aux autres juridictions, les discussions ont progressivement fait émerger plusieurs pistes d’action.

Soulignant les enjeux de financement, les règles inhibant l’innovation, la centralisation excessive, le corporatisme sclérosant des ordres professionnels et des fédérations et le manque d’information disponible aux citoyens pour éclairer la performance du système, nos répondants ont validé le constat sévère des Québécois, mais ont aussi tourné leurs yeux vers des pistes d’amélioration.

Six tendances ont plus ou moins fait consensus : 

· Une gouvernance clinique fondée sur les données probantes ;

· Un financement des établissements qui soutient la performance, l’innovation et l’amélioration continue ;

· Une plus grande utilisation des technologies de l’information ;

· Un plus grand soutien aux programmes de prévention et de promotion de la santé ;

· Une livraison plurielle des services de santé sous certaines conditions ;

· Un rôle accru des professionnels, des infirmières et des pharmaciens.

Ces mesures charrient implicitement une décentralisation de la gouvernance. Cependant, le rôle de l’État comme gardien de l’accès aux services demeure incontournable.

Il ne pourra jamais être imparti sans risque. Les fonctions d’assurance de la qualité et d’évaluation de la performance devraient aussi être largement chapeautées par le Ministère ou un organisme indépendant impartial.

Cependant, lorsque vient le temps d’offrir des prestations de services, les modalités peuvent être plus souples et offrir des perspectives intéressantes d’émulation, de coopération ou de concurrence qui pourront conduire à de meilleures performances, mais surtout à de meilleurs services aux patients et aux utilisateurs.

1 Des idées en santé pour le Québec

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