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Opinion Éducation

Il est temps de passer de la parole aux actes

Le débat sur le financement des écoles privées du Québec a refait surface au cours des dernières semaines. L’enjeu revient périodiquement dans l’actualité par l’entremise d’études, de lettres ouvertes ou de propositions politiques. Il s’agit d’un débat légitime et complexe, avec des impacts potentiels sur les choix des parents, l’utilisation des fonds publics et la vision de l’État en matière d’éducation.

On aurait tort, toutefois, de transformer le débat sur le financement de l’école privée en paravent qui cache l’éléphant dans la pièce : le système d’éducation public du Québec souffre de plusieurs problèmes, qui vont au-delà des enjeux de financement. Malgré des progrès importants depuis 60 ans, les taux de décrochage scolaire du Québec sont parmi les plus élevés au Canada. 

Dans le réseau public francophone, un garçon sur deux n’obtient pas son diplôme d’études secondaire en cinq ans. 

Dans le réseau public du Québec, le taux de diplomation est de 71 %, alors qu’il est de 92 % pour les francophones du réseau public de l’Ontario – un gigantesque écart de 21 points de pourcentage.

Comme nous l’écrivions il y a plus d’un an dans ces pages, avec une dizaine d’autres signataires, un coup de barre s’impose.

Ce virage ne sera pas facile à réaliser, mais nous sommes convaincus qu’il est possible. Pour y arriver, il faudra énoncer une vision claire, basée sur des faits, et incarnée par des actions fortes. Il faudra résister à la tentation de renouveler les consensus confortables qui entretiennent le statu quo. Notre ambition collective ne devrait pas se satisfaire d’un rattrapage inachevé avec l’Ontario.

Le 21 juin dernier, le ministre Sébastien Proulx rendait publique sa nouvelle politique de l’éducation, fruit d’une longue consultation avec les acteurs du milieu. La politique cible les bons enjeux et identifie des pistes d’action prometteuses. Mais les moyens se font toujours attendre. 

Avec la consultation en cours sur la mise en place d’un institut national d’excellence en éducation (qui découle de sa politique), le ministre a l’occasion de poser des gestes ambitieux pour rompre avec l’immobilisme ambiant.

La mise en place d’un institut national d’excellence en éducation répond à un besoin maintes fois exprimé par les directions d’école, les enseignants et les autres membres du personnel, soit d’avoir accès aux meilleures pratiques basées sur les résultats probants de la recherche. Il est important que cet institut soit indépendant et qu’il ait pour mission première d’accroître l’excellence du réseau scolaire public. Pour éviter de créer une instance inutile ou inefficace, cet institut devrait toutefois : 

• comporter une grande diversité de membres indépendants, qui ne proviennent pas uniquement du milieu de l’éducation, pour éviter de transformer l’institut en épicentre d’une guerre de clochers entre facultés d’éducation et groupes d’intérêt ;

• mettre en place un programme de formation continue basée sur la recherche rigoureuse et les pratiques avérées, et un mécanisme de partage des connaissances qui permette aux enseignants et aux directions d’écoles d’innover et de s’inspirer d’approches éprouvées ;

• fournir des outils d’évaluation pour les enseignants et les directions d’école ; et

• avoir la possibilité de formuler, sur la base de recherches rigoureuses, des recommandations de politiques publiques susceptibles de favoriser l’excellence en éducation et la réduction du décrochage scolaire.

La mise en place d’un institut d’excellence en éducation au Québec permettra au ministre de démontrer le courage de ses convictions, et sa volonté d’amorcer le virage dont notre système scolaire public a tant besoin. Le temps est venu de passer de la parole aux actes.

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