100 idées pour améliorer le Québec Un coup de pouce à l’économie

Accepter le changement pour moderniser l’économie

Au Québec, d’une campagne à l’autre, les engagements électoraux des partis politiques sur le thème de l’économie n’évoluent que très peu. La surenchère des promesses coûteuses pour soutenir les emplois est au cœur de la stratégie. Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre et de changements technologiques accélérés, cette formule n’a plus sa place. Elle serait même coûteuse et dommageable. Le temps est venu d’oser faire les choses différemment pour donner confiance aux citoyens.

Rompre avec la tradition

Voici comment les partis politiques élaborent traditionnellement leurs programmes électoraux. D’abord, ils procèdent à une série de consultations et de sondages internes. À partir des données recueillies, ils peuvent mieux cerner les priorités des électeurs des différentes régions et formuler une trentaine de promesses taillées sur mesure pour les séduire, principalement dans les circonscriptions « prenables » ou « baromètres ».

De manière générale, l’emploi et la santé se classent en tête des priorités des Québécois, loin devant l’éducation et l’environnement. Les enjeux de fond et le coût des engagements semblent être des préoccupations secondaires.

Un changement du paradigme économique

D’après les prévisions, entre 2015 et 2024, un million de travailleurs québécois devraient prendre leur retraite. Le principal frein à la croissance économique ne sera pas le manque d’emplois, mais bien le manque de travailleurs employables.

En 2017, le taux de chômage est tombé à 6 %, un creux quasi historique au Québec. Le nombre de postes vacants a augmenté de 30 % en un an, pour arriver à près de 95 000.

Selon les différentes enquêtes auprès des employeurs, le besoin de main-d’œuvre est le principal frein à leur production.

Parallèlement, l’automatisation et la robotisation viendront bouleverser les pratiques. On estime qu’environ 1,4 million de travailleurs québécois seront touchés. Les métiers nécessitant un travail cognitif non routinier seront plus à l’abri des robots et des logiciels intelligents.

Le vieillissement de la population et la numérisation de l’économie accentueront la pression sur notre marché de l’emploi. Dans la préparation de leurs programmes électoraux, les politiciens doivent tenir compte de cette réalité. La multiplication des promesses coûteuses pour protéger des emplois voués à disparaître, notamment à cause des changements technologiques, ne se justifie tout simplement plus en situation de pénurie de main-d’œuvre. Elle contribuerait surtout à accroître le cynisme de la population envers les politiciens.

De création d’emplois à création de compétences

Se fermer les yeux et refuser de se préparer à affronter ces défis aurait d’importants coûts sociaux et économiques. À l’inverse, une stratégie de modernisation des façons de faire et du cadre réglementaire et législatif de l’État serait une occasion pour le Québec de se démarquer et de devenir un modèle à suivre. Être à l’avant-garde de la parade permettrait non seulement d’être plus productif et plus compétitif, mais aussi de mieux partager les effets de la croissance.

Les solutions sont connues, mais semblent bien difficiles à mettre en application.

Il faut mieux intégrer les immigrants sur le marché du travail, maintenir en poste plus longtemps les travailleurs de 55 ans et plus et bonifier et améliorer la pertinence, la flexibilité et l’accessibilité de la formation.

Les leviers de l’immigration et des travailleurs d’expérience sont en train d’être actionnés. D’importants efforts sont consentis à cet égard, mais il faut en faire davantage, car des gains majeurs sont encore possibles.

L’éducation et la formation au cœur du développement

Du côté de l’éducation et de la formation, beaucoup de travail reste à faire pour valoriser l’éducation, mieux outiller les travailleurs et assurer un meilleur arrimage entre les besoins réels et la formation offerte.

En éducation, un premier pas serait d’accroître la transparence en rendant accessible rapidement l’ensemble des données colligées par les écoles, les commissions scolaires et le ministère de l’Éducation. Cela permettrait de procéder à l’évaluation systématique et rigoureuse des programmes pour mieux orienter les politiques publiques.

Au niveau de l’arrimage entre la formation et les besoins, les mécanismes en place ne semblent pas assez performants pour éviter ou même atténuer les pénuries de main-d’œuvre sectorielles. À titre d’exemple, la numérisation de plus en plus rapide de l’économie a entraîné une hausse fulgurante de la demande de professionnels en technologies de l’information. Ce phénomène va s’accentuer. Sommes-nous prêts à répondre à ce besoin ? Non, pas pour l’instant. Pour la demande de professionnels des soins de santé, le raisonnement est le même, la réponse aussi.

Les données sont manquantes, les mécanismes d’adéquation ne sont pas assez performants, et l’offre de formation continue n’est pas assez flexible et accessible.

Ce sont les défis économiques que les politiciens doivent attaquer de front durant les prochaines élections en limitant le nombre de promesses populistes, en proposant une vision claire et compatible avec les défis économiques. Prendre cette voie, c’est avoir confiance dans le potentiel du Québec et dans le bon jugement des citoyens.

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