Du succès en bas aussi

Benoît Groulx et Julien BriseBois accomplissent un tour de force avec le Crunch de Syracuse

Laval — Le Lightning de Tampa Bay occupe le premier rang du classement général de la LNH, et sa filiale connaît également sa part de succès dans la Ligue américaine.

À la tête du Crunch de Syracuse, on retrouve Julien BriseBois, directeur général, et Benoît Groulx, entraîneur-chef. Dans la catégorie des gens en train de se bâtir un beau curriculum vitæ, vous pouvez ajouter ces deux noms.

Pas que le duo n’avait rien fait de bon jusqu’ici. L’an passé, Groulx et BriseBois ont aidé le Crunch à atteindre la finale de la Ligue américaine. La Coupe Calder leur a échappé en troisième période du septième match, perdu 4-3.

Pour BriseBois, adjoint au directeur général chez le Lightning, c’était une deuxième présence en finale de la LAH, après 2013. Quant à Groulx, il soulignait de façon spectaculaire son retour au hockey professionnel, après une carrière junior marquée par trois championnats de la LHJMQ et une médaille d’or comme entraîneur-chef du Canada au Mondial des moins de 20 ans.

Mais cette saison, Groulx et BriseBois sont en train d’accomplir un autre tour de force à Syracuse. Leur club présente un dossier de 25-14-4, bon pour le 3e rang de la division Nord, derrière deux puissances de la ligue, Toronto et Rochester. Les quatre premières équipes de la division accèdent aux séries éliminatoires, et le Crunch détenait une avance de 13 points sur la 5e place, occupée par le Rocket de Laval. Une participation aux séries semble probable.

Un nouveau cycle

En quoi est-ce un tour de force ?

L’édition 2016-2017 du Crunch était menée par des vétérans. En séries, les cinq meilleurs compteurs de l’équipe affichaient une moyenne d’âge de 27 ans.

Cette saison, quatre de ces cinq joueurs ne sont plus à Syracuse. Deux prêtent main-forte au grand club (Yanni Gourde et Cory Conacher) et deux sont partis (Matt Taormina à Laval, Tye McGinn à Tucson). De plus, deux défenseurs dont la contribution ne se mesurait pas en points (Jake Dotchin et Slater Koekkoek) ont amorcé la saison à Tampa et n’en sont jamais revenus.

Dans les conditions, Groulx a révisé ses attentes.

« Quand la saison a commencé, nos attentes étaient qu’on allait se battre pour participer aux séries, a admis l’entraîneur-chef, rencontré avant le match d’hier à la Place Bell. Dans cette ligue-là, tu ne sais jamais quel club tu vas avoir d’une semaine à l’autre. On savait qu’on avait un jeune club avec du potentiel. On espérait qu’avec notre finale l’an passé, l’appétit vienne en mangeant. On a eu un début de saison difficile, mais on s’en est remis.

« Certaines équipes font confiance à plus de vétérans, mais c’est une ligue de jeunes. C’est très cyclique. Nous, on a Anthony Cirelli, Mathieu Joseph, Dennis Yan, Alexander Volkov... On a six ou sept attaquants de première année. Quand tu as ces jeunes-là, tu leur fais une place. Quand tu n’as pas de jeunes qui sortent du junior, de l’université, tu organises ton club différemment. »

Le résultat, c’est que les cinq meilleurs compteurs de l’équipe cette saison ont une moyenne d’âge de... 22,6 ans ! Si on élargit le propos aux huit premiers compteurs, cette moyenne passe à 21,6 ans.

Et attention : on ne parle pas d’une équipe qui a coulé au classement pour empiler les hauts choix au repêchage. Au cours des cinq dernières années, le Lightning a repêché une seule fois dans le top 10 : c’était en 2013, l’année de Jonathan Drouin. Du reste, son choix le plus haut a été un 14e choix, l’an dernier.

Les règlements de la LAH permettent à une équipe d’aligner un maximum de cinq « vétérans », soit des joueurs comptant plus de 320 matchs d’expérience au hockey professionnel. Le Crunch ne compte que deux de ces vétérans : Erik Condra et Jamie McBain.

« On a trois places ouvertes [pour des vétérans], et l’organisation n’a jamais pensé à les combler. On savait qu’on aurait plusieurs jeunes cette année. Le but, c’était de les faire jouer »

— Benoît Groulx, entraîneur-chef du Crunch de Syracuse

Faire jouer les jeunes, ça signifie évidemment avoir une certaine tolérance à l’erreur. Groulx assure qu’il ne retranchera jamais un joueur en guise de punition. Mais il s’attend néanmoins à un certain niveau de qualité.

« Un revirement à la ligne bleue, que ce soit dans la LNH, la Ligue américaine, le junior ou le midget AAA, tu n’en veux pas. Notre job, c’est de garder les joueurs imputables. Ça fait partie du développement d’un joueur de savoir que la gestion de la rondelle, c’est important, et que les revirements ne sont pas acceptables. C’est du coaching », martèle-t-il.

« On est réalistes. On sait que le hockey est un jeu d’erreurs, rappelle le Québécois Mathieu Joseph, une des recrues du Crunch. Ben met la barre très haut. Il veut qu’on soit parfaits. On va peut-être arriver en bas de la barre, mais notre niveau sera meilleur que si la barre était basse et qu’on l’atteignait. »

La suite ?

Si son équipe continue à connaître du succès, Groulx va bien finir par faire partie des discussions quand un entraîneur perdra son poste dans la LNH. Encore faut-il qu’il y ait des postes à pourvoir, cependant... Aucun entraîneur n’a encore été congédié cette saison !

BriseBois doit quant à lui avoir les oreilles qui bourdonnent tellement son nom revient souvent sur les réseaux sociaux dès qu’il est question d’équipes qui devraient changer de directeur général. Le jeune quadragénaire, généralement disponible pour les médias, se fait d’ailleurs plus discret depuis quelques mois.

Le Lightning ET sa filiale qui connaissent du succès, des joueurs qui sont formés pour la LNH, un entraîneur et un dirigeant en développement... Difficile de trouver un environnement aussi opposé à celui du Canadien.

Le Rocket s’incline

Le Crunch de Syracuse l’a emporté 3-2 sur le Rocket, hier, à Laval. Les hommes de Sylvain Lefebvre ont donc été incapables d’aligner une deuxième victoire de suite. Ils n’ont pas remporté deux matchs d’affilée depuis leurs trois victoires du 27 au 30 décembre. Dennis Yan, Anthony Cirelli et Mitchell Stephens, trois recrues, ont inscrit les trois filets des vainqueurs, tandis que le gardien Connor Ingram, lui aussi un joueur de première année, a signé la victoire. Nikita Scherbak et Daniel Audette ont touché la cible dans la défaite. Scherbak a été, et de loin, le meilleur attaquant des siens, contrôlant plus souvent qu’à son tour le jeu en territoire adverse. Le Rocket reprend l’action demain et samedi, en accueillant le Moose du Manitoba pour deux matchs en 24 heures au métro Montmorency.

— Guillaume Lefrançois, La Presse

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