Vie de proprio

Profiter de l’effet de levier

Que l’on possède un condo, un petit plex ou de nombreux logements, la vie de propriétaire immobilier est pleine d’occasions et de préoccupations.

Comment devient-on riche en immobilier ? En utilisant de l’argent emprunté ! Voici comment fonctionne l’effet de levier, un outil à la portée des petits et grands investisseurs.

Il y a sept ans, Simon Ladouceur a acheté un premier triplex dans la région de Québec. Trois ans et quelques rénovations plus tard, l’immeuble avait gagné suffisamment de valeur pour le refinancer et dégager ainsi une mise de fonds pour un second achat, un quadruplex.

Comme tout investisseur immobilier bien informé, Simon Ladouceur a utilisé de façon judicieuse l’effet de levier, qui consiste à faire fructifier ses avoirs en utilisant un maximum d’argent emprunté. Que l’on possède une seule propriété en location ou tout un parc immobilier, on profite de l’effet de levier dès qu’on a une hypothèque.

Maximiser le rendement

L’idée de base consiste à toujours calculer le rendement sur la mise de fonds et non sur l’ensemble de la valeur de l’immeuble. Prenons un édifice acheté à 500 000 $ avec une mise de fonds de 100 000 $, que l’on revend ou refinance trois ans plus tard à une valeur de 625 000 $.

L’immeuble a gagné 125 000 $ de valeur, soit une augmentation de 25 %. Cependant, l’investisseur n’a payé que 100 000 $ pour s’enrichir de 125 000 $ en trois ans. Or, sa mise de fonds vaut aujourd’hui 225 000 $, ce qui représente un gain de 125 %. C’est ça, la magie de l’effet de levier !

Pour les investisseurs immobiliers qui conservent leurs immeubles, l’effet de levier s’observe aussi au jour le jour, en soustrayant les dépenses des revenus et en appliquant la différence à la mise de fonds initiale.

Voyons d’abord un exemple très simplifié. Un investisseur qui paie comptant un immeuble de 500 000 $ constate que les revenus moins les dépenses lui laissent 10 000 $ de profit à la fin de l’année. Il a obtenu un rendement de 2 % sur son apport en argent comptant. Un autre investisseur achète un immeuble identique, mais avec une mise de fonds de 100 000 $. S’il obtient un profit de 10 000 $ par année, le rendement sur sa mise de fonds est de 10 %.

Étude de cas

Simon Ladouceur n’est pas seulement investisseur immobilier. Il est économiste à l’embauche de Ray Harvey & Associés, une agence immobilière spécialisée en immeubles locatifs et commerciaux à Québec. Nous lui avons demandé d’évaluer deux scénarios plus près de la réalité.

Notre tableau illustre deux scénarios d’achat d’un immeuble de 500 000 $. Dans la colonne de droite, l’acheteur ne contracte pas d’hypothèque. Sa mise de fonds correspond au prix de vente. À la fin de l’année, il lui reste plus d’argent (surplus de trésorerie) que celui qui emprunte, mais le rendement sur sa mise de fonds est de seulement 5,9 %

Dans la colonne de gauche, l’acquéreur avance une mise de fonds de 100 000 $ (20 % du prix de vente) et contracte une hypothèque résidentielle à un taux fixe de 3,74 % sur cinq ans et amortissement sur 25 ans. Puisqu’il doit payer des intérêts sur son emprunt, son surplus de trésorerie est plus faible. Cependant, en empruntant, il bénéficie de l’effet de levier, de sorte que le rendement sur sa mise de fond s’élève à 15,7 %.

« En comparant ces rendements, on pourrait penser qu’il est plus avantageux pour un investisseur de débourser le coût total de ses acquisitions. Toutefois, il ne faut pas oublier de prendre en compte les remboursements en capital effectués par l’acquéreur qui utilise l’effet de levier du financement hypothécaire. »

— Simon Ladouceur, économiste chez Ray Harvey & Associés

Chaque paiement d’hypothèque contient une part d’intérêt et une part de remboursement en capital. Payé à même les revenus de location, ce remboursement (aussi appelé capitalisation) est une forme d’enrichissement pour le propriétaire. On doit l’ajouter aux surplus de trésorerie.

Dans notre exemple, en prenant la moyenne des cinq premières années de l’hypothèque, la capitalisation annuelle s’élève à 10 676 $, ce qui correspond à 10,7 % de la mise de fonds initiale.

On peut donc additionner ce rendement (10,7 %) à celui issu du surplus de trésorerie (5,0 %), pour un rendement total de 15,7 %.

« En ce qui a trait aux rendements, il vaut mieux acheter trois immeubles avec des hypothèques que d’en acheter un seul avec du comptant », affirme Simon Ladouceur.

La plupart des investisseurs débutent avec un seul achat, qui prend rapidement de la valeur en raison de rénovations ou de la progression du marché immobilier. Dès que ce gain de valeur est suffisamment élevé, ils refinancent l’immeuble pour en extraire l’argent nécessaire pour constituer une mise de fonds pour une autre acquisition. « Les investisseurs qui réussissent à faire croître rapidement leur parc immobilier utilisent beaucoup cette stratégie », dit Simon Ladouceur.

Un couteau à deux tranchants

L’effet de levier permet de profiter des taux d’intérêt généralement bas pour faire de bons rendements sur notre propre argent (la mise de fonds). Cependant, quand les taux d’intérêt augmentent ou les logements demeurent vacants, on peut se retrouver en très mauvaise posture.

« L’effet de levier amplifie les bons et les mauvais rendements. Quand ça va mal, on se retrouve avec des rendements négatifs. »

— Philippe d’Astous, professeur adjoint au département de finance à HEC Montréal

On peut se retrouver avec des logements vacants et devoir utiliser d’autres revenus pour combler les dépenses, dont le paiement hypothécaire. Et si la croissance du marché immobilier est nulle ou négative, on se retrouve à revendre à perte et à encaisser un rendement négatif sur notre mise de fonds initiale.

Lorsqu’on a une hypothèque, les versements au prêteur sont les mêmes chaque mois, rappelle Philippe d’Astous. « Si tous les logements sont loués et que les revenus augmentent, les surplus vous reviennent et vous n’en donnez pas plus à la banque. Mais s’il y a des logements vacants et des pertes de revenus, la banque va aussi continuer à exiger les mêmes versements hypothécaires. »

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