Éditorial : Menaces climatiques

S’adapter à l’extrême

Les incendies de forêt qui ravagent Fort McMurray ne constituent pas le meilleur exemple des nouvelles menaces climatiques pour le Québec.

À cause du réchauffement planétaire, les événements météorologiques extrêmes deviendront plus fréquents et plus violents. Le risque varie toutefois de « façon majeure » selon les régions et les saisons, rapporte le Bureau d’assurance du Canada.(1)

Pour Fort McMurray, il est impossible de faire un lien de cause à effet entre le climat et les incendies : le réchauffement n’a pas créé ce risque, et ce n’est pas là-bas qu’il l’augmente le plus (le sud-ouest de l’Ontario est plus à risque). Mais il est vrai que les sécheresses aggravées par le réchauffement – combinées à la vieillesse de la forêt – rendent cette région plus vulnérable, comme l’a démontré la tragédie de Slave Lake en 2011.

Au Québec, les menaces sont moins spectaculaires qu’un incendie de forêt, et c’est justement ce qui les rend insidieuses.

Il y en a deux à surveiller.

La première relève de la santé publique. Il s’agit des complications liées au pollen, à la maladie de Lyme, au virus du Nil et aux malaises causés par les journées très chaudes (plus de 30 degrés). Par exemple, elles risquent de devenir trois fois plus fréquentes d’ici 2050 dans la ville de Québec. Ces coûts annuels oscilleraient entre 609 millions et 1,07 milliard, selon une estimation du groupe Ouranos.(2)

La seconde porte sur l’eau, plus précisément l’érosion et les inondations. Les inondations, causées entre autres par les pluies diluviennes, sont déjà responsables de près de la moitié des réclamations aux assureurs. Et avec le dérèglement du climat, la probabilité de ces précipitations abondantes augmentera de 40 %.

Que faire ? Pour la santé publique, il s’agit de programmes de prévention, et aussi de repenser l’urbanisme, par exemple pour éviter les îlots de chaleur. Pour les inondations, il faut entre autres protéger les résidences (clapets antiretour dans les sous-sols), favoriser le drainage (végétaliser les stationnements) ou rénover les infrastructures urbaines. Montréal a posé un bon geste cette semaine en créant un Bureau de résilience climatique.

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Quant aux inondations causées par les crues de rivières, la science n’a pas démontré qu’elles augmenteront au Québec. Mais elles demeurent utiles pour comprendre comment s’adapter aux risques posés par le climat.

Contrairement aux autres pays du G8, ces risques ne sont pas couverts par nos assureurs. C’est l’État qui dédommage, une situation qui a déjà incité des municipalités comme Laval à ignorer les tracés de zones inondables pour engranger plus de taxes municipales. La leçon : si on offre un rabais à l’irresponsabilité, on l’encourage. Voilà par exemple ce qui contribue à la dépendance à l’essence trop peu chère, une des causes du dérèglement climatique. Et voilà aussi ce qui dissuade les mesures de prévention ou d’adaptation.

Des scientifiques mesurent déjà les effets du réchauffement, et des assureurs en chiffrent les conséquences. On devrait peut-être finir par les écouter.

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