réseau express métropolitain

La Caisse de dépôt a présenté hier la version définitive de son projet de train électrique. Compte rendu.

Réseau express métropolitain

300 millions de plus, une station de moins

La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) a présenté hier la mouture finale de son projet de train électrique métropolitain de 67 km, qui coûtera 300 millions de plus que prévu et qui comptera une station de moins que dans sa version précédente.

Le contrat principal de construction et d’ingénierie du Réseau express métropolitain (REM) a été attribué au Groupe NouvLR, consortium formé principalement d’entreprises québécoises comme SNC-Lavalin, Pomerleau, EBC et le Groupe Aecon Québec, associées à la filiale canadienne de Dragados, multinationale espagnole du secteur des travaux publics.

Le matériel roulant du futur REM et les systèmes de signalisation et d’exploitation de ce réseau entièrement automatisé seront par ailleurs fournis par le Groupe des partenaires pour la mobilité des Montréalais (PMM), formé d’Alstom Transport Canada et d’une filiale de SNC-Lavalin.

Selon la CDPQ, les deux tiers de ces contrats (65 %), qui totalisent 6,3 milliards, se traduiront par des retombées directes de plus de 4 milliards dans l’économie du Québec et créeront en tout 34 000 emplois pendant la période de construction, qui s’étalera sur environ quatre ans.

Après sa mise en service, le REM devrait créer environ 1000 emplois permanents liés à l’exploitation et à la maintenance de ce réseau de 26 stations qui reliera les banlieues nord et sud de Montréal au centre-ville de la métropole, ainsi qu’à l’Ouest-de-l’Île de Montréal et à l’aéroport international Trudeau, à Dorval.

La mise en service du REM, promise depuis le début pour la fin de 2020, sera décalée d’environ six mois, à l’été de 2021. Une première antenne du réseau sera alors ouverte aux utilisateurs, et le reste du réseau sera progressivement mis en exploitation à mesure que les travaux progresseront.

La filiale de la Caisse de dépôt qui est responsable de ce projet, CDPQ Infra, a indiqué qu’il faudrait une période d’environ deux mois afin d’« arrimer » les deux contrats attribués hier et déterminer avec précision le calendrier de mise en service des quatre antennes du REM.

« Nouvelle ère des grands projets »

L’attribution des deux contrats pour la construction du réseau et la fourniture de son matériel roulant, annoncée hier, marque le lancement officiel des travaux de réalisation du REM qui, selon le premier ministre Philippe Couillard, « donne le signal d’une nouvelle ère de grands projets au Québec ».

Avec son budget de 6,3 milliards, a-t-il souligné, il s’agira de l’un des plus importants projets publics entrepris au Québec depuis les grands chantiers de la baie James, dans les années 70.

« Ce ne sont pas des barrages qui seront les prochains grands projets pour les années à venir au Québec. Ce sont des projets associés à la mobilité. »

— Philippe Couillard, premier ministre

M. Couillard a évoqué d’autres grands projets d’infrastructures de transports collectifs en attente ou à l’étude, comme le prolongement de la ligne bleue du métro, dans l’est de Montréal, et le « grand projet structurant » en cours de planification dans la Vieille Capitale.

La mouture finale du REM présentée hier coûtera 300 millions de plus par rapport à la version précédente mise à jour l’automne dernier, qui était alors estimée à 6 milliards. Cela représente une augmentation des coûts d’environ 5 %.

Ce budget final est le résultat de plusieurs semaines d’intenses négociations entre la Caisse et les deux soumissionnaires pour le contrat principal d’ingénierie et de construction. Les offres originales des deux consortiums, déposées en novembre dernier, « n’étaient pas acceptables », a dit hier le président de CDPQ Infra, Macky Tall.

Les dirigeants de la Caisse et de sa filiale ont refusé de dévoiler le montant des offres originales et le détail des négociations et compromis ayant conduit à l’attribution du contrat au Groupe NouvLR, invoquant le secret commercial.

Certains changements apportés au tracé du REM, dont l’élimination d’un tunnel sous le bassin Peel, à l’entrée du centre-ville de Montréal, ont manifestement contribué à réduire la facture globale du projet (voir onglet suivant).

CDPQ Infra a aussi abandonné la construction d’une des 27 gares du projet qui devait être construite en bordure de l’autoroute 13, dans le nord de Montréal.

Des travaux dès avril

Les travaux de construction du nouveau réseau de train électrique devraient débuter dès avril prochain. Ils dureront « environ quatre ans », a indiqué le président de CDPQ Infra, Macky Tall. Lorsqu’il sera en service complet, le REM devrait assurer quotidiennement plus de 140 000 déplacements.

Des études réalisées par CDPQ Infra prédisent qu’à l’horizon 2031, l’achalandage du nouveau réseau devrait dépasser 170 000 déplacements par jour. C’est presque le triple de la totalité du réseau actuel des trains de banlieue de la région métropolitaine.

Pour le président de la CDPQ, Michael Sabia, le REM aura « un impact puissant sur le Grand Montréal » en améliorant la mobilité des Montréalais et des banlieusards, mais aussi en devenant une vitrine du savoir-faire technologique du Québec.

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, qui se présente comme la « mairesse de la mobilité », s’est dite quant à elle « très satisfaite du lancement du projet », quelques semaines seulement après l’annonce de l’acquisition de 300 autobus hybrides supplémentaires pour assurer l’amélioration du réseau de surface de la Société de transport de Montréal.

Mme Plante a réaffirmé sa conviction « qu’en améliorant la mobilité à Montréal, nous améliorons la qualité de vie des Montréalais, mais aussi l’attractivité de notre ville ».

Le ministre des Transports du Canada, Marc Garneau, a pour sa part décrit le REM comme un « projet colossal à échelle humaine ».

« C’est toujours impressionnant de parler de projets dans les milliards de dollars, a-t-il dit hier, mais ce dont j’ai le plus hâte avec le REM, c’est que les Québécois prennent place dans ses voitures et qu’ils puissent passer moins de temps dans le trafic pour avoir plus de temps de qualité avec leurs proches et leurs familles. »

Réseau express métropolitain

Trois changements majeurs au projet

Les trains de Via Rail pourront rouler dans le tunnel du mont Royal

Le train à grande fréquence (TGF) de Via Rail pourra emprunter le tunnel du mont Royal pour rejoindre la gare Centrale au centre-ville de Montréal, ont annoncé hier les dirigeants de CDPQ Infra, filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec responsable du Réseau express métropolitain.

Malgré les modifications importantes apportées au tracé du futur train électrique de la Caisse, il s’agit vraisemblablement du revirement de situation le plus spectaculaire de la part de CDPQ Infra, qui affirmait encore l’automne dernier que la cohabitation de ses trains avec ceux de Via était impossible, et même interdite, dans ce tunnel centenaire creusé sous la montagne.

Le tunnel du mont Royal, inauguré en 1917, fait plus de 5 kilomètres de longueur. Il est présentement utilisé par les trains de banlieue de Deux-Montagnes et de Mascouche, entre Mont-Royal et le centre-ville de Montréal.

Avec l’implantation du REM, d’ici 2021, il deviendra la colonne vertébrale du réseau de trains légers de CDPQ Infra. Les trains en provenance de Deux-Montagnes, en banlieue nord, de même que ceux qui arrivent de Sainte-Anne-de-Bellevue et de l’aéroport Trudeau, dans l’ouest de l’île de Montréal, emprunteront tous ce tunnel pour se rendre au centre-ville.

En raison de ce trafic intense et des intervalles de passage réduits à deux minutes et demie en périodes de pointe, CDPQ Infra assure depuis la présentation de son projet, il y a deux ans, que le tunnel du mont Royal devra être réservé exclusivement au REM pour des questions de sécurité et de compatibilité technique.

Or, le président de cette filiale de la Caisse, Macky Tall, a affirmé pour la première fois hier que CDPQ Infra était « ouverte à faire cohabiter le REM et le TGF dans le tunnel ». M. Tall a indiqué que « des développements technologiques [devraient] être faits » afin de rendre la cohabitation possible, mais « que toutes les parties sont confiantes que cela va se faire ».

« Dans les critères de notre appel d’offres, a-t-il souligné, nous avons tenu compte de certains éléments de design qui vont faire en sorte que cela soit possible. »

« Par exemple, les rails seront construits de façon à pouvoir accueillir des trains plus lourds que ceux du REM, comme ceux du TGF. »

— Macky Tall, président de CDPQ Infra

L’exclusivité de passage aux voitures du REM dans ce tunnel représentait une épine dans le pied pour Via Rail. Le TGF, un projet de 4 milliards qui vise à augmenter de façon notable le nombre de trains de passagers dans le corridor Québec-Windsor, circulera sur la rive nord du fleuve, entre Québec et Montréal, et entrera dans l’île de Montréal par le nord. À partir de là, le tunnel sous le mont Royal représente le chemin le plus rapide vers le centre-ville. S’il devait faire le tour de la montagne, le TGF ajouterait entre 20 et 25 minutes à son parcours, ce qui réduirait considérablement la pertinence même du projet.

Des interfaces technologiques devront être développées pour permettre aux convois du TGF de « parler » avec le système d’exploitation qui contrôlera le passage des voitures du REM dans le tunnel du mont Royal. CDPQ Infra affirme qu’il n’est toutefois pas possible, à ce stade-ci, d’établir à quel moment les trains de Via Rail pourront emprunter le tunnel du mont Royal, ni dans quelles conditions il leur sera permis d’y rouler.

Pas de tunnel sous le bassin Peel

CDPQ Infra a modifié de façon importante le tracé du Réseau express métropolitain (REM) à l’entrée du centre-ville de Montréal afin de réduire les coûts de son projet. Au lieu de plonger en tunnel sous les voies ferrées du CN et le bassin Peel, pour rejoindre le viaduc ferroviaire de la gare Centrale, le REM sera aménagé en hauteur, sur des structures de béton, et suivra une emprise actuelle du CN afin de contourner les voies de triage du Sud-Ouest et de traverser le canal de Lachine à un endroit où existe déjà un pont ferroviaire.

Ce changement majeur de tracé évitera la construction d’un tunnel de 1 kilomètre ou plus, sous les anciens ateliers du CN, et l’aménagement d’une gare souterraine prévue sous le bassin Peel afin de desservir les secteurs de Griffintown et du sud-ouest de Montréal. Une gare sera aménagée en surface, sur le nouveau tracé, à un endroit qui reste à déterminer, en collaboration avec la Ville de Montréal.

Ce changement aura plusieurs avantages, selon CDPQ Infra. Il permettra d’éliminer tout risque d’interaction entre le REM et deux collecteurs souterrains majeurs de la Ville de Montréal. Il évitera la fermeture d’une partie de la rue Ottawa dans la Cité du multimédia et la démolition d’un immeuble commercial, en plus d’optimiser l’utilisation d’infrastructures ferroviaires existantes.

Élimination de la gare de l’autoroute 13

La seconde modification majeure du tracé du REM entraînera l’élimination pure et simple d’une gare qui était prévue en bordure de l’autoroute 13 dans l’arrondissement de Saint-Laurent. Dans la version précédente du projet, l’antenne du REM en direction de l’ouest de l’île de Montréal devait se connecter à l’antenne principale de Deux-Montagnes juste devant le parc-nature du Bois-de-Saraguay et traverser tout un secteur industriel pour rejoindre un corridor ferroviaire existant à l’ouest de l’autoroute 13.

CDPQ Infra a révisé son tracé en déplaçant l’interconnexion à la hauteur d’une antenne secondaire du CN, appelée le Doney Spur, qui prend naissance juste à l’ouest de l’autoroute 13. Le REM passera sous l’autoroute, au lieu de la franchir en hauteur. Ce tracé, affirme la filiale de la Caisse de dépôt, évitera tout risque d’empiètement sur deux parcs-nature de la Ville de Montréal, de même que la construction d’un imposant viaduc ferroviaire au-dessus de l’autoroute 13, dont la conception se serait avérée « très complexe ».

La disparition de la gare « Autoroute 13 » n’aura quant à elle qu’une incidence assez faible sur l’achalandage du REM. Selon les études de CDPQ Infra, la gare aurait accommodé environ 500 usagers par jour, soir et matin, et aurait été difficile d’accès, en plus d’être située dans un secteur enclavé et peu attractif.

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