Sport professionnel

Le rose ne suffit plus

Il y a quelques années à peine, dans les boutiques des équipes de sport professionnel, on trouvait quelques vêtements féminins dans une petite section, là-bas, au fond du magasin. Mais voilà que les partisanes sont de plus en plus nombreuses à porter les couleurs de leur équipe. À Montréal, elles veulent du bleu, du blanc, du rouge. Du rose ? Avec modération, s’il vous plaît. 

« L’intérêt est énorme », lance, enthousiaste, Jim Haskins, vice-président des produits licenciés pour la Ligue nationale de hockey, lorsqu’on le questionne sur le développement du secteur féminin. Et cet intérêt, il se manifeste à la caisse : cette saison, les ventes de vêtements et d’accessoires destinés aux femmes ont bondi de 38 % dans la LNH. 

Sans surprise, Montréal figure parmi les meilleurs marchés.

« Le public montréalais a un souci de la mode très développé. Pour lui, nous pouvons être plus audacieux avec nos produits, avoir plus de plaisir à varier les tissus, les motifs, les coupes, et on peut commercialiser toutes sortes d’accessoires. »

— Jim Haskins, vice-président des produits licenciés pour la Ligue nationale de hockey

Même constat chez l’Impact de Montréal, surtout depuis l’entrée de l’équipe dans la Major League Soccer, il y a trois ans. « Auparavant, notre offre pour les femmes était plus petite, nos vêtements étaient plus taillés pour les hommes. En arrivant en MLS, on s’est adaptés au marché des femmes, et la réponse a été très positive, très rapidement », raconte Hugues Léger, vice-président au marketing pour l’Impact. 

Dans la plupart des marchés d’Amérique du Nord, les grands fabricants de vêtements sportifs ont testé le marché féminin au cours de la dernière décennie, d’abord timidement, pour voir jusqu’où ça les mènerait. « Il y a 10 ans, parce que l’offre n’était pas très intéressante, la demande n’était pas importante non plus, convient M. Haskins. Au fil des années, plusieurs entreprises ont commencé à tester des produits destinés aux femmes. Le succès de certains de ces tests a été si important que ces entreprises ont investi de plus en plus pour développer ce marché. La croissance est exponentielle ! »

L’EFFET ALYSSA 

Sportive inconditionnelle, l’actrice et productrice Alyssa Milano en a eu marre, en 2006, de ne pas pouvoir porter les couleurs de ses équipes favorites (les Dodgers et les Kings de Los Angeles, au baseball et au hockey) avec élégance. « J’assistais à une partie des Dodgers et j’ai eu envie d’acheter un chandail pour me réchauffer. Dans la boutique officielle, je n’ai rien trouvé de tendance à acheter. Pourtant, il y avait plusieurs femmes dans la boutique, et ailleurs dans le stade. Très peu d’entre elles pouvaient porter des vêtements avec le logo de l’équipe de façon stylée », raconte-t-elle sur son blogue.

Qu’à cela ne tienne, elle a lancé sa propre ligne de vêtements. D’abord dans la Ligue majeure de baseball, où son succès fut instantané. Puis, elle a conclu des ententes avec la NFL, la NBA et la NHL. « C’est une très grande fan des Kings de Los Angeles, fait remarquer Jim Haskins. Elle nous a beaucoup aidés en recherche et en développement. Ses conseils et sa connaissance du marché étaient tellement près de la réalité qu’elle nous a aidés à développer des produits et des campagnes de marketing de façon beaucoup plus large. »

En clair, Alyssa Milano a tenu les ligues professionnelles loin du « pink it and shrink it » (« faites-le en rose et rapetissez-le »).

UN MARCHÉ TRÈS VASTE 

La Ligue nationale de hockey l’admet : le marché féminin est grand. Et très complexe. Dans les amphithéâtres, le public féminin est plus âgé, alors qu’à l’extérieur, il tend à être plus jeune… et très sensible à tous les détails de la mode. « Règle générale, nous avons découvert, en faisant des études de marché, que les hommes achètent des produits plus spécifiques. Les femmes aiment acheter des produits en collection. Elles aiment que les produits s’agencent les uns aux autres, ou avec ce qu’elles possèdent déjà », fait remarquer Jim Haskins. 

La LNH a donc diversifié ses approches. Des produits pour un public plus classique dans les boutiques des arénas, mais un peu plus de variété et de folie en ligne. 

À l’automne, notamment, les boutiques Forever 21 dans les principaux marchés de hockey au Canada vendront aussi une collection spécialement conçue pour leur jeune public, très près de la mode. Il y a quelques mois, la ligue a tâté le terrain dans ces boutiques et le « succès fut énorme ».

« Les femmes sont tout simplement de grandes fans, et elles veulent le montrer, résume M. Haskins. Il fallait juste mieux comprendre ce marché ! »

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