SOUS LA LOUPE PME NÉOMEDIA
D’agence web à groupe médiatique
La Presse
C’est par accident que Claude Poulin et Serge Labbé se sont lancés dans le monde des médias. Ils sont aujourd’hui à la tête d’un des principaux groupes d’information régionale au Québec.
En 2001, les deux entrepreneurs ont fondé à Saint-Georges, en Beauce, l’agence iClic, qui conçoit des sites web pour des PME. Or, il existe relativement peu de médias web dans la région, de sorte qu’il était difficile pour l’entreprise de publiciser les sites qu’elle créait pour ses clients.
À l’été 2006, MM. Poulin et Labbé ont donc décidé de mettre sur pied EnBeauce.com, qui était dans un premier temps un calendrier d’événements de la région auquel se sont ensuite greffés des communiqués d’entreprises locales. Le succès a été instantané.
Rapidement, on a décidé d’ajouter des articles journalistiques. Mais comme ces textes étaient repris d’autres médias, EnBeauce.com a aussitôt reçu des mises en demeure l’intimant de cesser cette pratique. « Le lendemain, j’ai téléphoné au cégep et j’ai demandé qu’on m’envoie le meilleur étudiant en arts et lettres pour nous écrire des articles », raconte Claude Poulin, 39 ans. Deux mois plus tard, le site embauchait ses premiers journalistes en bonne et due forme.
Aujourd’hui, EnBeauce.com est l’un des sites d’information les plus populaires de la région. Cette réussite a donné le goût à MM. Poulin et Labbé d’aller plus loin. L’an dernier, ils ont déposé une offre d’achat pour les 33 journaux dont Transcontinental a dû se départir après avoir mis la main sur les hebdomadaires de Québecor. Ils ont finalement réussi à acquérir neuf publications en Montérégie, dans les Laurentides, dans Lanaudière, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, en Mauricie et à Laval.
L’entreprise créée pour l’acquisition, NéoMédia, a mis fin aux versions imprimées des journaux, misant tout sur les sites web. On éliminait ainsi les coûts d’impression et de distribution, mais on réduisait également les revenus publicitaires. Une cinquantaine de salariés ont perdu leur emploi. Il a aussi fallu embaucher des vendeurs plus à l’aise dans l’univers numérique.
« Ce qui nous inquiétait le plus, c’était : est-ce que la Beauce est une bibitte à part ? Beaucoup de gens m’ont dit “ça marche en Beauce parce que vous venez de là”… Finalement, je m’aperçois que c’est le même phénomène partout au Québec. Il y a des régions qui vont bientôt dépasser la Beauce. »
Le site du Journal de Joliette, par exemple, est aujourd’hui consulté par près de 15 000 personnes par jour alors qu’il y a six mois, le compte était d’à peine quelques centaines. Par comparaison, EnBeauce.com reçoit environ 18 000 visiteurs par jour.
Comment est-on parvenu à enregistrer une telle croissance en six mois ? En publiant au moins 10 articles par jour sur chaque site et en utilisant intensivement les médias sociaux.
« On a maintenant suffisamment de trafic pour que nos sites soient viables à moyen et long terme. »
— Claude Poulin, président de NéoMédia
Une fois les sites des anciens hebdos intégrés, NéoMédia n’a pas tardé à prendre de nouveau de l’expansion. En janvier, l’entreprise a créé un nouveau site : GoRimouski.com. Et le mois prochain, elle s’associera à un entrepreneur web de Vaudreuil-Dorion, Karim Benchekroun, pour lancer la formule dans cette région. En fait, M. Benchekroun, qui a connu M. Poulin à l’École d’entrepreneurship de Beauce, deviendra sous peu actionnaire de NéoMédia.
Et ce n’est qu’un début. NéoMédia a l’ambition d’exploiter 150 sites web d’ici trois ou quatre ans. « Quand notre réseau sera bien rodé, les ouvertures devraient débouler », affirme Claude Poulin.