Entre golf et vidéo

Le tournoi de golf caritatif de Jonathan Drouin, au profit de la Fondation du CHUM, se déroulait hier. La vedette du Canadien en a profité pour parler de son été, alors que le jeune attaquant a choisi de ne rien laisser au hasard et a accumulé les séances vidéo et les jours d’entraînement.

« Je dois en donner plus »

Jonathan Drouin revient sur sa dernière saison et sur ce qu'il espère changer en vue de la prochaine

Quelques chiffres tout d’abord, pour mettre la table.

3 : C’est le nombre de points par lequel le Canadien de Montréal a raté les séries l’an dernier. À 96 points, il soufflait dans le cou des Blue Jackets de Columbus, finalement qualifiés en dernier avec 98.

17 : C’est le nombre de matchs que le Canadien a perdus par un seul but l’année dernière.

1 : C’est le nombre de buts obtenus par Jonathan Drouin dans les 26 derniers matchs de la saison.

Conclusion : le Canadien était à quelques buts, par-ci, par-là, d’accéder aux séries. Et celui qui aurait pu marquer ces buts, Jonathan Drouin, ne l’a pas fait au moment où ça comptait le plus. Mais tout ça, c’est du passé. Drouin a pris acte de ses manquements, et a choisi de tout faire pour ne pas les revivre. Chiffres à l’appui, si le Canadien veut participer aux séries, il aura besoin du brio de celui qui a tous les outils pour devenir son meilleur attaquant.

Claude Julien, en tout cas, est prêt à laisser la chance au coureur. Il sait que ce ne sont pas tous les joueurs d’impact, ou ceux qui aspirent à le devenir, qui atteignent leur apogée à 20 ans.

« Il a toujours eu de bonnes intentions. Il veut s’améliorer, être un joueur d’impact. Il est très jeune – seulement 24 ans, on l’oublie parfois. On met toujours beaucoup d’espoirs en lui et on aime la direction qu’il prend. Il s’est pris en main et il veut être un bon joueur de hockey. Ce sont des signes encourageants pour le futur. »

— Claude Julien, au sujet de Jonathan Drouin

« Se prendre en main. » L’expression est forte, mais elle résume assez bien un été où Drouin a choisi de ne rien laisser au hasard. On a eu l’occasion de lui en parler hier, lors de son tournoi de golf caritatif au profit de la Fondation du CHUM. Une implication, soit dit en passant, fort louable et qui montre bien son attachement à la collectivité. L'événement a permis de recueillir plus de 400 000 $.

L’histoire a beaucoup circulé. Drouin s’est assis avec l’entraîneur adjoint du Canadien Dominique Ducharme cet été pour des séances vidéo. C’est Drouin qui a lancé la démarche avec Ducharme, un homme de confiance, celui-là même qui avait fait de lui une machine à marquer des buts au niveau junior. Drouin voulait comprendre ce qu’il faisait bien, mais surtout ce qu’il devait faire mieux.

Ce qu’il devra améliorer : quitter la périphérie, moins jouer de prudence et aller dans les endroits où ça brasse. Il a aussi travaillé quelque peu sur sa morphologie, pour retrouver sa vitesse d’antan. Exit aussi la longue crinière, pour ce que ça vaut.

« Je complique aussi parfois les choses, a ajouté Drouin. Ça a toujours été un problème depuis que je suis dans la LNH. Parfois, je dois faire le jeu plus simple, qui n’est pas le plus beau, qui ne paraît pas bien à la télévision, mais qui fonctionne. C’est ce qu’on a regardé, pour que je sois plus efficace dans ce que je fais. »

Constance

Drouin a bien essayé de réduire la signification de ces séances vidéo. Il a rappelé que tout le monde le faisait, « même Sidney Crosby ». Pourtant, on comprend que son initiative a fait mouche, d’abord auprès de Claude Julien.

« C’est un gars qui prend en charge sa carrière et sa situation. C’est un bon signe. C’est un jeune joueur qui veut s’améliorer. S’il réussit, il va améliorer aussi notre équipe. Il a le talent pour être un joueur d’impact. »

Il y a cette petite chose aussi, appelée la constance. Drouin l’a mentionnée, Claude Julien et Dominique Ducharme aussi, évidemment.

C’est là que sa dernière saison est partie en vrille. Il se dirigeait pourtant vers la meilleure saison de sa carrière, et de loin, avant de se heurter au mur. Drouin s’est permis une certaine introspection. Peut-être s’est-il mis trop de poids sur les épaules ? Peut-être a-t-il ainsi laissé les cinq ou six premiers mauvais matchs se transformer en 26 mauvais matchs ?

« Je me suis mis beaucoup de pression quand les choses ne fonctionnaient plus. Ça a fait boule de neige. Je dois aller à l’aréna avec l’esprit libre et la bonne attitude. » — Jonathan Drouin

« La confiance fait beaucoup, a reconnu Ducharme, aux premières loges pour cette traversée du désert. Ça devient une roue. Tu as une ou deux mauvaises performances et tu commences à te questionner un peu plus. Tu n’as pas beaucoup de temps pour t’ajuster, les matchs arrivent vite. Tu tombes dans un tourbillon. On le voyait essayer, chercher des solutions, mais il n’a jamais abandonné. »

Drouin explique, en effet, que même quand son rôle a diminué, il restait assidu au gymnase. Juste au cas où Claude Julien recommence à l’utiliser 17, 18 minutes par match. Dans tous les cas, le scénario le plus logique veut que l’entraîneur recommence à l’utiliser beaucoup la saison prochaine, dans tous les contextes.

Julien a besoin de Drouin pour accéder aux séries, mais Drouin sait aussi qu’il devra vite devenir la meilleure version de lui-même.

« Je dois en donner plus. Si je n’avais pas connu ces 30 matchs l’an dernier, peut-être qu’on accédait aux séries. Je dois me regarder dans le miroir et regarder ce que je peux changer pour qu’on accède aux séries. »

Reste à voir si l’été portera conseil.

Place à Kotkaniemi et aux autres espoirs

Les meilleurs espoirs du Canadien seront mieux épaulés, cette année, au tournoi des recrues.

L’an dernier, Jesperi Kotkaniemi semblait bien seul contre la formidable formation de recrues des Sénateurs d’Ottawa. Ceux-ci comptaient sur un nombre important d’espoirs avec au moins un an d’expérience dans la Ligue américaine, certains avaient même joué dans la LNH, et Brady Tkachuk en avait profité pour éclipser le Finlandais dans un match à sens unique.

Kotkaniemi avait entamé ce match au centre avec Allan McShane, fraîchement sorti des rangs juniors, et Alexandre Alain, dont c’était la première expérience au niveau professionnel.

Tkachuk avait eu le luxe de jouer avec Colin White, le premier centre des Sénateurs un an plus tard, et Filip Chlapik, 34 points en 51 matchs l’an dernier à sa deuxième saison dans la Ligue américaine.

Le joueur le plus aguerri, T.J. Melanson, avait passé l’hiver dans l’ECHL. On observait avec curiosité les deux défenseurs tchèques Michal Moravčík et David Sklenička, sans grandes attentes toutefois.

Jake Evans représentait sans doute l’espoir le plus en vue avec Kotkaniemi et Josh Brook. Il n’a pas terminé la rencontre, victime d’une violente mise en échec qui a nécessité l’arrivée des ambulanciers.

Claude Julien, l’entraîneur-chef du Canadien de Montréal, m’a confié hier matin, après avoir donné son point de presse, à l’occasion du tournoi de golf de Jonathan Drouin, très bien se souvenir de ce match.

« Si on s’était fié au camp des recrues, [Jesperi] Kotkaniemi n’aurait jamais fait l’équipe. »

— Claude Julien

« Tu regardes Ryan Poehling, le match où il a marqué quatre buts, et prends ses statistiques [plus modestes] au collégial. Je ne dis pas que Poehling va marquer des buts comme il en a marqué, mais souvent, des joueurs en démontrent encore plus quand ils sont entourés de meilleurs joueurs. Kotkaniemi devait s’adapter au hockey nord-américain et quand il est arrivé au gros camp, des joueurs l’ont pris sous leur aile et ses qualités sont ressorties. »

Sénateurs et Jets au programme

Le portrait est différent cette année, lors du tournoi présenté à Belleville du 6 au 9 septembre et mettant aux prises les espoirs du Canadien, des Sénateurs et des Jets de Winnipeg.

Contrairement à Kotkaniemi l’an dernier, Poehling sera appuyé par un autre jeune centre de premier plan, Nick Suzuki.

Les attaquants Alexandre Alain, Jake Evans, Michael Pezzetta et Hayden Verbeek, sans être des espoirs de premier plan, ont une année d’expérience dans la Ligue américaine derrière la cravate. Cam Hillis, Cole Fonstad et Allan McShane, des choix de la cuvée 2018, ont un an de plus. Fonstad et McShane ont participé au camp préparatoire de l’équipe canadienne junior. Hillis vient d’être nommé capitaine du Storm de Guelph.

En défense, le jeune Cale Fleury a connu une saison fort satisfaisante avec le Rocket de Laval. Lui aussi faisait le saut des rangs juniors l’an dernier. Josh Brook a été l’un des meilleurs défenseurs au pays, a participé au Championnat mondial junior et a terminé la saison à Laval. Otto Leskinen, 22 ans, embauché à titre de joueur autonome cet été, a été dominant l’hiver dernier à Kalpa, à sa troisième saison complète dans la Ligue d’élite de Finlande.

Claude Julien sera à Belleville pour le tournoi. Outre Poehling et Suzuki, dont les noms sont connus, lesquels a-t-il hâte de voir à l’œuvre ?

« Le gardien de but [Cayden Primeau], répond-il spontanément. [Josh] Brook a connu une bonne année, [Cale] Fleury a connu une bonne année. Leskinen, je ne l’ai pas vu beaucoup. Ça me donne une chance de le connaître plus. Ce sont des joueurs qui m’intriguent. Non seulement ils vont avoir une chance au camp, mais aussi, dans le pire scénario, on a besoin de profondeur. Quand je regarde nos recrues, et plusieurs n’y sont pas, j’aime la direction qu’on emprunte. »

L’entraîneur préfère voir les jeunes dans un contexte de match. « Le camp de développement, c’est une chose, mais tu as une meilleure idée quand tu les vois dans des tournois comme ça. J’ai souvent vu des joueurs épatants dans les entraînements, mais timides en match. Au contraire, certains ressortent lors des matchs alors que tu ne les avais pas remarqués à l’entraînement. »

La formation des Sénateurs sera à nouveau très puissante cette année, avec Erik Brannstrom (obtenu des Golden Knights contre Mark Stone) en défense, Logan Brown, Alex Formenton, Drake Batherson et Max Veronneau, qui ont tous joué des matchs dans la LNH l’an dernier, Josh Norris, un choix de premier tour obtenu des Sharks de San Jose contre Erik Karlsson, sans compter les deux espoirs des Blue Jackets de Columbus offerts pour Matt Duchene, Vitaly Abramov et Jonathan Davidsson. Les deux ont joué chez les pros l’an dernier.

Il y a, évidemment, des absents de taille chez le Canadien. Le premier choix de 2019, Cole Caufield, passera la saison avec les Badgers du Wisconsin et les règlements de la NCAA ne l’autorisent pas à participer à des camps d’entraînement professionnels. Deux des meilleurs espoirs du côté gauche de la défense, Jordan Harris et Jayden Struble, sont dans la même situation. Ils joueront ensemble à Northeastern. À moins d’une surprise, Harris devrait décrocher un poste avec l’équipe américaine en prévision du Championnat mondial junior.

De nombreux espoirs du CH sont retenus avec leurs équipes respectives en Europe. Le gaucher Alexander Romanov, défenseur par excellence au plus récent Championat mondial junior, entame sa deuxième saison avec le CSKA Moscou. Un autre défenseur gaucher, Mattias Norlinder, est avec Modo, dans la Ligue d’élite de Suède.

L’ailier droit Jesse Ylönen, choix de deuxième tour en 2018, peut-être l’espoir le plus sous-estimé de l’organisation, est en Finlande. Ylönen mène son équipe, Lahden, en matchs préparatoires avec sept points. Jacob Olofsson et Joni Ikonen sont aussi demeurés en Europe. Ils pourraient tous faire le saut en Amérique du Nord l’an prochain, à Montréal ou à Laval.

Ils ont dit

« Offrir du hockey excitant »

« On veut offrir à nos partisans du hockey excitant. On veut jouer avec intensité et faire un pas en avant. Rater les séries nous a fait mal. Les joueurs veulent revenir et faire les ajustements nécessaires pour faire partie de la deuxième saison. »

— Claude Julien

« On verra. Aujourd’hui, je suis ici pour le tournoi de Jonathan Drouin. C’est le 9 septembre qu’on tient notre tournoi. Ce sera plus clair [à ce moment-là] parce qu’il y a encore des choses qui se passent, on discute de différentes choses. Je ne veux pas faire un commentaire ici qui va être différent de ce qui va arriver quand la saison va commencer. »

— Claude Julien, au sujet des nouvelles acquisitions

« C’est un camp d’entraînement. L’an dernier, personne ne croyait que Jesperi Kotkaniemi allait commencer avec nous, mais il a causé la surprise. C’est vrai pour tout le monde. Poehling a laissé une belle impression, mais il doit démontrer que ce n’était pas de la chance. C’est la même chose pour Suzuki. Plusieurs joueurs doivent rendre nos décisions difficiles. »

— Claude Julien, sur la possibilité que Nick Suzuki ou Ryan Poehling se joignent au grand club

« Si tu excelles au bon moment, tout peut arriver. Quand tu arrives en séries, tout est possible. C’était le plus difficile pour moi, comme entraîneur. Je sentais qu’on jouait notre meilleur hockey à la fin de la saison. Si on avait pu entrer en séries, on aurait pu se donner une chance. »

— Claude Julien, sur le parcours des Blues en séries

« On a une belle chimie, on se comprend, on sait jouer ensemble. C’est un joueur intelligent, et tout le monde voudrait jouer avec lui, mais on se comprend bien. Ça a fonctionné un moment, on espère que ça pourrait fonctionner pour plus longtemps. »

— Jonathan Drouin, sur la possibilité de jouer de nouveau avec Max Domi

Propos recueillis par Jean-François Tremblay, La Presse

Le point sur le dossier Markov

L’influent agent de joueurs Allan Walsh était aussi de retour dans son Laval natal pour assister au tournoi caritatif de Jonathan Drouin. Il y était bien sûr pour appuyer son client dans son initiative, mais la conversation a rapidement dévié sur son plus récent client, un certain Andrei Markov.

Walsh a raconté avoir reçu il y a quelques jours un appel d’un numéro inconnu. Contrairement à son habitude, il a répondu. C’était Markov au bout du fil qui lui faisait savoir qu’il cherchait un agent pour revenir dans la LNH.

« On a eu plusieurs longues discussions durant la journée. Je voulais apprendre à le connaître, comprendre son état d’esprit. Mon travail est de faire ce que le client veut. Je dois donc poser les questions nécessaires. Quand j’ai été à l’aise avec la situation, il m’a confirmé qu’il voulait que je devienne son agent. »

Le défenseur de 40 ans est redevenu un sujet de discussion il y a quelques semaines après qu’il eut fait part à le Montreal Gazette de sa volonté de retourner dans la LNH pour terminer sa carrière. Il se disait alors prêt à explorer toutes les possibilités, mais gardait bien vivant le rêve de jouer de nouveau avec le Canadien de Montréal.

« Je ne veux pas parler des discussions qui peuvent avoir eu lieu avec Montréal. Andrei [Markov] a précisé que son cœur était à Montréal et qu’il aimerait terminer sa carrière ici. Il voudrait jouer ce 1000e match dans l’uniforme du Canadien, mais on verra. Il est motivé à 100 % à jouer dans la LNH cette saison. »

— L'agent Allan Walsh

« Je suis sûr qu’il jouera quelque part. […] Il est disposé à jouer pour n’importe quelle équipe dans la LNH. Ça doit évidemment être une décision logique pour lui et pour l’équipe. Les deux doivent s’entendre sur son rôle, sur les besoins de l’équipe. Mais il y a 31 équipes et il est disposé à parler à chacune d’entre elles. »

Walsh juge même que son client aura assez d’offres sur la table pour ne pas avoir à se soumettre à une invitation à un camp d’entraînement.

Un rôle ?

Walsh a mentionné avoir reçu l’appel de « cinq ou six équipes » dès l’annonce que Markov devenait son client. Il a évidemment dû dissiper quelques doutes sur la forme physique du défenseur russe. Il a donc envoyé des vidéos d’entraînement, et certaines équipes se sont même rendues jusqu’en Floride (où Markov s’entraîne) pour l’observer.

Claude Julien s’est bien gardé de dévoiler son opinion sur le sujet. Il a répondu que ça ne relevait pas de lui et qu’il ne connaissait pas les intentions de Walsh.

Markov a fait sa marque dans la LNH par son exceptionnelle vision du jeu et sa capacité à lire ce qui se passait sur la glace. Il est aussi devenu un incontournable de l’avantage numérique, justement la grande faiblesse du Canadien l’année dernière. Il a rendu très bons des défenseurs modestes, et il a poussé à l’excellence d’autres déjà très bons.

En 990 matchs, tous avec le Canadien, il a inscrit 119 buts et 453 aides. Il arrive au deuxième rang de l’histoire de l’équipe pour les points inscrits par un défenseur, derrière le légendaire Larry Robinson et à égalité avec le tout aussi légendaire Guy Lapointe.

Mais voilà, Markov a glissé hors des regards de la LNH il y a deux ans en signant un contrat avec l’Ak Bars Kazan, après avoir été incapable de s’entendre avec Marc Bergevin. Une négociation, d’ailleurs, dont l’échec a toujours baigné dans un certain mystère. Avec Kazan, Markov a gagné la Coupe Gagarine en 2018. Il a toutefois montré des signes de ralentissement l’année dernière du côté des statistiques (2 buts et 12 aides en 49 matchs), dans une équipe qui avait perdu du lustre.

À force de discuter avec Walsh, on comprend donc que Markov cherche aussi dans ce retour dans la LNH une deuxième chance de bien terminer son illustre carrière.

« [Quand il a quitté la LNH], ce n’était pas la fin dont il avait rêvé, au bout d’une carrière respectable où il avait accompli beaucoup comme joueur et comme membre de la collectivité. À l’évidence, il n’est pas heureux de la manière dont ça s’est terminé la première fois. Il aimerait avoir un plus grand contrôle sur la fin, et avoir une belle conclusion, selon ses termes. »

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