Opinion

Pour une politique québécoise de l’architecture

Lettre ouverte à la ministre de la Culture et des Communications, Marie Montpetit

Dans une entrevue publiée dans La Presse du 26 octobre, vous avez indiqué votre intention de déposer avant la fin de 2017 la nouvelle politique québécoise de la culture, dont le chantier a été entrepris sous le règne de votre prédécesseur.

Nous désirons profiter du fait que ce texte est encore en gestation pour rappeler l’importance d’y inclure un engagement fort à l’égard de la création d’une politique québécoise de l’architecture et de la mise sur pied d’un groupe de travail chargé d’en élaborer le plan d’action.

Votre ministère reconnaît déjà l’importance de la qualité architecturale. « Une architecture harmonieuse et fonctionnelle constitue […] un gage de qualité. À cet égard, citons comme exemples certaines bibliothèques publiques qui, en raison de leur qualité architecturale, sont rapidement devenues des endroits fréquentés et appréciés », lit-on dans le projet de politique culturelle déposé en juin dernier.

Toutefois, la qualité architecturale n’a pas à se limiter aux projets culturels. Cette préoccupation doit être étendue à tous les ministères, municipalités et organismes publics.

Des donneurs d’ouvrage mieux outillés et une réglementation harmonisée, notamment, permettraient de relever le niveau de qualité des grandes réalisations comme des plus modestes. Ultimement, l’exemple gouvernemental doit tirer l’ensemble du cadre bâti québécois vers le haut.

Ce souhait est partagé par un nombre croissant de Québécois. Depuis 2016, pas moins de 50 villes et arrondissements représentant une population de 4,5 millions de personnes ont officiellement appuyé la démarche de l’Ordre des architectes du Québec (OAQ) visant l’adoption d’une politique québécoise de l’architecture. Au printemps 2017, l’OAQ a pu valider cette volonté sur le terrain, lors d’une tournée de conversations publiques ayant attiré plus de 500 participants dans 13 villes.

Cette tournée a été suivie d’un forum où ont convergé 270 personnes au Palais des congrès de Montréal, le 28 septembre. Lors de cet événement, l’OAQ a présenté un projet de déclaration, signée jusqu’à présent, par plus de 1700 personnes.

Les principes de cette Déclaration pour une politique québécoise de l’architecture sont les suivants : l’architecture est partout ; elle nous concerne tous ; sa qualité est d’intérêt public ; et cette qualité est le fruit d’une démarche créative qui, pour réussir, doit être comprise par l’ensemble des acteurs concernés.

Nous demandons donc au gouvernement du Québec d’adopter une politique de l’architecture, assortie d’un plan d’action, visant notamment à : 

• sensibiliser les Québécois, en particulier les jeunes, à l’importance de la qualité architecturale ;

• placer les citoyens au centre de la réflexion sur les projets d’architecture et de développement urbain ;

• positionner notre patrimoine comme un pilier culturel du développement durable ;

• générer des retombées économiques grâce à des réalisations remarquables, à toutes les échelles et dans toutes les régions ;

• soutenir les municipalités qui souhaitent améliorer la qualité architecturale sur leur territoire.

Déjà, une vingtaine de pays et régions d’Europe font de l’architecture un levier culturel, économique et social grâce à des politiques semblables. N’est-il pas temps, pour le Québec, de devenir la première province canadienne et l’un des rares États en Amérique du Nord à se positionner de la sorte ?

* Cosignataires, qui appuient cette lettre en leur nom personnel : Denys Arcand, réalisateur, scénariste et acteur ; Nathalie Bondil, directrice générale et conservatrice en chef, Musée des beaux-arts de Montréal ; Jean-Luc Brassard, champion olympique de ski acrobatique et animateur ; Isabelle Duchesneau, directrice générale, Monastère des Augustines ; Christiane Germain, présidente du conseil d’administration, Musée national des beaux-arts du Québec et coprésidente, Groupe Germain Hôtels ; Steven Guilbeault, cofondateur et directeur principal, Équiterre ; Catherine Harel Bourdon, présidente, Commission scolaire de Montréal ; Michel Labrecque, conservateur, Jardin botanique de Montréal ; Alan Shepard, recteur et vice-chancelier, Université Concordia ; et Alexandre Taillefer, associé principal, XPND Capital.

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