Cyclisme  Antoine Duchesne

Tous les chemins mènent à l’Europe

Il n’a ni la pointe de vitesse d’un grand sprinter ni le coup de pédale d’un grimpeur. Comme il le dit lui-même : « Je ne suis pas un champion. Je ne suis pas une vedette. Je ne suis pas un gars qui lève les bras vraiment souvent. »

Peut-être, mais Antoine Duchesne reste un excellent cycliste. Ce matin, le jeune homme de 23 ans sera sur la ligne de départ du 98e Tour des Flandres, l’une des cinq grandes classiques qui font la légende du vélo.

Il ne risque pas de lever les bras au bout des 259 kilomètres de course. Mais si tout se déroule comme prévu, il aura joué un rôle actif dans le positionnement de ses deux leaders chez Europcar, Vincent Jérôme et Alexandre Pichot, dans l’approche des 17 côtes jalonnant le parcours, où ça ne passe parfois qu’à deux de largeur.

« C’est assez incroyable, comment ça frotte. Je me l’étais déjà fait dire, mais je n’y croyais pas vraiment », admet Duchesne, joint plus tôt cette semaine en Belgique, où il disputait les Trois jours de La Panne, l’une des épreuves préparatoires au Tour des Flandres. « Ce sont des courses extrêmement agressives. Le monde n’a aucune peur de se mettre par terre pour passer. Il ne faut pas laisser un pouce d’espace. »

Ennuyé la semaine dernière par des allergies et des nuits agitées – « peut-être un stress inconscient » –, l’athlète de Chicoutimi a su tirer son épingle du jeu pour cette première expérience dans les classiques flandriennes au sein d’une équipe du World Tour. Tout en prêtant main-forte à son coéquipier Vincent Jérôme (6e), il a été le deuxième Europcar au classement général à La Panne (35e), malgré une chute et une crevaison inopportunes.

Il sait que le Tour des Flandres, son enjeu et ses 50 kilomètres supplémentaires représentent un autre genre de défi. « J’ai hâte », anticipait celui qui a participé trois fois à la version U23. « Déjà, il y a un peu moins de stress après avoir fait les cinq dernières courses. J’ai pris un peu de confiance dans le peloton. Je suis moins impressionné par les autres. Je prends un peu plus ma place. »

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Pur produit de la scène cycliste saguenéenne – quatre ans chez Acidose Lactique, deux chez EVA-DeVinci –, Duchesne se croyait arrivé en sortant des rangs juniors. Sous les couleurs de Cycles Régis, il a vite déchanté. « Je m’imaginais un peu être champion et que tout allait bien aller, se souvient-il. Avec des gars comme Jean-François Laroche et Pierre-Olivier Boily, ça m’a un peu remis sur terre. Ça m’a montré autre chose dans le vélo et dans la vie. »

Cette première saison senior a été compliquée par des problèmes d’anémie récurrents et une fracture à un poignet. Il s’est remis en selle lors des deux saisons suivantes sous les couleurs de Garneau, remportant en 2012 un premier titre de champion canadien U23.

Recruté comme stagiaire chez SpiderTech, il s’est retrouvé le bec à l’eau quand l’équipe canadienne est disparue subitement à l’automne. Heureusement, une porte s’est ouverte chez Bontrager, formation de développement américaine dirigée par Axel Merckx, le fils de l’autre.

En plus d’un autre titre national U23 – comme quoi il a déjà « levé les bras » –, il s’est illustré lors de courses par étapes en 2013. À la dernière étape du Tour de Californie, il a été le dernier d’un trio d’échappée à être rejoint à 10 km de la ligne. Au Tour de Beauce, remporté par son coéquipier Nathan Brown, il a fini deuxième de la difficile étape de Québec. Puis, à la quatrième étape du Tour de l’Alberta, où il portait les couleurs de l’équipe nationale, il a fait partie de l’échappée gagnante, réglée par Cadel Evans, ancien gagnant du Tour de France.

Chaque fois, Duchesne a exprimé son tempérament offensif. « Antoine, c’est un all-arounder, bon un peu partout », note Axel Merckx, son ancien directeur sportif. « Il aime bien être dans les échappées. Il aime les courses d’attaque, vallonnées, là où il peut se mettre en évidence et se donner au maximum. Surtout, c’est un travailleur. Il aime apprendre. »

Dans un CV, ces qualités intangibles ne pèsent cependant pas lourd. Surtout quand on est loin du peloton européen. Au Grand Prix de Québec, en septembre, Duchesne s’inquiétait de son avenir. Son aventure avec Bontrager, formation réservée aux moins de 23 ans, se terminait. Cinq équipes européennes fermaient leurs portes, dont deux du World Tour.

Europcar, qui venait d’apprendre la retraite surprise de David Veilleux, lui avait témoigné de l’intérêt, sans rien promettre. L’automne a été long. « Le soir, je me couchais et je me disais : si ça ne marche pas, qu’est-ce que je fais ? raconte Duchesne. Si, demain, je n’ai pas le message, j’arrête-tu ? »

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La bonne nouvelle est arrivée à la fin novembre, peu après la confirmation de l’entrée d’Europcar dans le World Tour. Louis Garneau, équipementier de l’équipe française, et Serge Arsenault, promoteurs des GP de Québec et Montréal, ont joué un rôle décisif. « Quand tu es plus un équipier, un baroudeur comme moi, il faut parfois avoir l’aide des autres », souligne Duchesne, qui sera aussi de Paris-Roubaix, dimanche prochain.

Maintenant qu’il a les pieds en Europe, il veut y rester longtemps. Pierre Hutsebaut, son entraîneur depuis quatre ans, l’en croit apte : « C’est un coureur solide. Il a sa place dans une équipe du World Tour parce qu’il est capable de travailler fort pour les leaders d’une équipe. »

Athlète longiligne (1 m 87), Duchesne a un « moteur très comparable » à celui de Veilleux, évalue Hutsebaut. « David était peut-être un peu plus tacticien », pense celui qui fut également son entraîneur. Son conseil le plus important ? « Fais-toi apprécier de ton équipe. » Ça semble bien parti.

Cyclisme

Un deuxième Tour des Flandres pour Hugo Houle

Après sept heures et quart et près de 300 kilomètres sous la pluie froide à Milan-San Remo, le 23 mars, pas étonnant qu’Hugo Houle soit tombé malade la semaine suivante. Déjà affaibli lors du GP E3 Harelbeke, le coureur de Sainte-Perpétue a préféré abandonner et ne pas prendre le départ de Gent-Wevelgem, dimanche dernier. « Je me connais, lorsque je prends un rhume, je mets une semaine pour récupérer », a expliqué le coureur d’AG2R-La Mondiale, de retour d’une reconnaissance des secteurs pavés clés du Tour des Flandres, vendredi. « Le docteur de l’équipe m’a aussitôt prescrit des antibiotiques. J’ai pris la semaine tranquille, afin de reprendre des forces au maximum pour être à 100 % pour le Tour des Flandres. Je pense que je serai en bonne condition malgré ce petit virus. Du moins, j’ai une meilleure connaissance du parcours que l’année dernière. » Houle soutiendra ses coéquipiers Damien Gaudin et Sébastien Turgot, anciens d’Europcar embauchés chez AG2R spécialement pour les flandriennes.

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