Boxe
La nouvelle vie de Stéphane Ouellet
La Presse
Alma
Le propriétaire en question s’appelle Stéphane Ouellet. Cette maison, c’est le témoin de sa nouvelle vie, celle d’après la boxe, d’après la drogue, d’après les dérapages et les excès. « J’ai déjà fait 6000 piastres par semaine avec la boxe, mais il ne me restait rien en poche. C’est la première fois de ma vie que j’ai une maison à moi. Je suis fier de ça », lance l’homme de 42 ans.
Ouellet a été l’un des boxeurs les plus populaires au Québec. Ses trois combats contre Dave Hilton, livrés entre 1998 et 2000, ont fasciné la province. Hilton, l’anglo dur à cuire, le
même pas de bonne famille; Ouellet, le Saguenéen au talent fou, qu’il gaspillait dans la drogue et les excès.Les feux de la rampe se sont éteints le 17 décembre 2004 pour Stéphane Ouellet. Ce soir-là, en plein Centre Bell, l’espoir Joachim Alcine lui a infligé une raclée. Elle marquait la fin de sa carrière. C’était aussi la fin de sa « première vie ».
« Ma deuxième vie a commencé le jour où je me suis relevé du plancher après ce combat. J’étais à l’heure des choix. J’avais 33 ans. Je me suis dit que j’avais débâti la première partie de ma vie. J’étais allé trop loin. J’ai vu ça comme une deuxième chance. »
Il a d’abord travaillé dans la construction. Mais c’est le camionnage qui l’a happé. « C’est un métier de solitaire, j’adore ça », dit-il. Il a passé avec succès son diplôme d’études professionnelles. Puis le Groupe Alfred Boivin, une importante entreprise de Chicoutimi, l’a embauché. Il travaille là depuis un an maintenant. Il jure qu’il ne touche plus à la drogue. « Un verre de vin de temps en temps, c’est tout », note Ouellet.
Chez lui, il nous présente sa « blonde », qu’il fréquente depuis huit ans maintenant. Claudia Tremblay est infirmière. Il y a aussi son chien Teddy, avec qui il court 12 km tous les deux jours. « La course m’a sauvé. Un médecin m’avait prescrit des antidépresseurs après ma défaite contre Alcine. J’ai refusé. À la place, j’ai commencé à courir et je n’ai plus jamais arrêté. »
Il affirme qu’il ne regrette rien. Longtemps, sa défaite contre Alcine l’a obsédé. L’année dernière encore, il parlait d’un retour. « Je voulais laver l’affront », dit-il. Mais il a finalement réalisé qu’un dernier combat n’était peut-être pas nécessaire. « J’ai fait la paix avec la façon dont s’est terminée ma carrière. Je me rends compte que c’est un poids que je dois porter. Ça me rappelle ce que j’ai gaspillé. »
Stéphane Ouellet a tourné la page. Mais avant de finir l’entrevue, il ose cette demande au journaliste. « J’ai un service à te demander dans ton article. J’ai une petite fille à Montréal, ça fait neuf ans que je l’ai pas vue. J’aimerais lui dire bonjour. Elle s’appelle Marie-Soleil. »
Ancienne vie. Nouvelle vie. Ouellet sait bien que les choses ne sont jamais si simples.