POINT DE VUE ALEXANDRE TAILLEFER, ASSOCIÉ PRINCIPAL CHEZ XPND CAPITAL

Je suis montréaliste 

Vive Montréal libre, dirait peut-être aujourd’hui un certain général.

Le 7 avril dernier, le Québec a parlé. Fini la souveraineté, on met ça en arrière… et on regarde en avant. Il est temps de passer à l’étape la plus importante de notre autonomie, celle qui nous permettra de maintenir le modèle québécois, certainement l’un des plus justes et des plus égalitaires sur cette planète.

La seule façon d’y arriver sera de créer ensemble de la richesse que l’on pourra redistribuer. Et selon toutes les tendances mondiales et toutes les études économiques, urbanistiques et sociales, cette richesse se crée d’abord et surtout dans les métropoles. Au Québec, elle se créera à Montréal.

Car c’est une tendance lourde : les villes caractérisent de plus en plus les pays. Les échanges internationaux se font entre les métropoles, la densification des villes permet une plus grande productivité, une plus grande innovation.

C’est une question de masse critique – une notion de physique nucléaire selon laquelle il faut concentrer une certaine masse de matière pour que la réaction en chaîne se produise.

DONNER DE L’AIR À MONTRÉAL

Plus que jamais, les villes sont la solution à la création de richesse. Pour que Montréal joue ce rôle à son plein potentiel, il faudra une réforme importante de nombreux volets qui empêchent notre métropole d’agir rapidement et efficacement. On devra permettre à Montréal de générer de nouveaux revenus, de s’approprier des champs d’expertise essentiels à son développement, ne plus la traiter comme l’une des 16 régions administratives du Québec, mais bien comme son centre économique et culturel. Montréal n’est pas un des 16 wagons du train québécois : il en est la locomotive.

Entendons-nous bien. Il n’est pas question ici de la théorie du ruissellement – trickle down en anglais –, selon laquelle les dépenses des ultrariches finissent par créer de l’activité économique au bas de la pyramide sociale. Nous ne disons pas non plus qu’« un peu de la richesse et de la gloire de Montréal rejaillira sur Amos et Rimouski ».

Le principe est plutôt le suivant : une métropole est un poumon. Si on lui laisse
de l’air, tout le corps s’en trouve dynamisé.

La campagne qui vient de se terminer a abordé cette question. Nous avons senti une ouverture de tous les candidats au poste de premier ministre. Et nous savons que le maire Denis Coderre veut cette autonomie, qu’il est l’homme de la situation.

Certes, ces réformes auront aussi un impact – certainement positif – sur le fonctionnement des autres villes et des municipalités régionales. Je suis d’ailleurs un partisan d’une plus grande autonomie du municipal, pour le rendre plus proche du citoyen. Mais il est urgent d’agir. Tout retard dans la mise en place de lois et de règlements favorisant une plus grande autonomie pour Montréal, parce qu’ils devraient être adaptés également aux situations particulières de chacune des autres régions, se fera au détriment de la collectivité québécoise.

NOUS SOMMES TOUS MONTRÉALISTES

Dans l’étude qui a été produite récemment par la Banque de Montréal et le Boston Consulting Group concernant la situation de Montréal et ses avenues de développement, 10 propositions concrètes ont été lancées pour réussir Montréal. Nous avons tous la responsabilité d’en prendre connaissance et de pousser à la roue.

Il est maintenant temps que tous les Québécois, ceux des régions, ceux des banlieues et ceux de la capitale nationale, deviennent aussi des Montréalistes. Comme les gens d’Albany et de Brooklyn comprennent qu’ils sont des New-Yorkais. Il faut que nous réalisions tous que le succès de Montréal ne se fera jamais au détriment du reste du Québec, bien au contraire.

Car il ne s’agit pas de dérouter vers Montréal les ressources fiscales ou gouvernementales destinées aux autres régions. Nous parlons plutôt de liberté de manœuvre, de rapidité de décision, d’esprit d’initiative moins entravé.

Le temps presse, notre population vieillit, notre croissance économique stagne, nos déficits s’amplifient. Je lève mon poing et je crie haut et fort : « Je suis un Montréaliste ! »

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