Canada

Trinquer à Toronto

La première ville économique du pays ne brasse pas seulement des affaires, mais aussi de la bière. Et, ces dernières années, le savoir-faire des microbrasseurs torontois est à l’image du houblon dans le moût : en pleine ébullition. 

GET WELL 

Haut lieu hipster du Toronto branché, Get well propose deux ou trois bières brassées sur place – en alternance, mais avec un penchant et un talent pour les cask, non filtrées – . Les serveurs y versent aussi une courte quoique satisfaisante sélection de fûts alimentés par les microbrasseries voisines. 

Il aura fallu patienter une vingtaine de minutes (un samedi) avant d’entrer dans ce grand bar rétro-kitsch de la festive avenue Dundas, dans le tout aussi festif quartier Beaconsfield. 

Lumières de Noël au plafond, bornes d’arcades archaïques contre les murs, rock indie dans le tapis : Get Well se distingue à plusieurs chefs. La faune est jeune, bruyante et hétéroclite. D’ailleurs, des effluves de cannabis émanaient des toilettes du sous-sol lors de notre passage. Âmes timorées, s’abstenir… 

Pour la bière et son prix relativement bas (6 $ la pinte), nous referions la file.

INDIE ALEHOUSE 

Cette microbrasserie a les défauts et les qualités de sa jeunesse. Une signature encore à trouver, mais un courage récompensé dans l’alchimie des ingrédients. Autant la noire au porto nous insupporte, si peu subtile qu’on croirait un porto à la noire, autant celle au bourbon, harmonieuse, fait partie de nos «inoubliables». Idem pour la sublime saison Takes Two to Mango. Et nous naviguons ainsi, de bonnes en mauvaises surprises, à travers des appellations colorées : Cockpuncher Imperial, Broken Hipster, 99 luft balloons, etc. 

Sise dans le quartier excentré The Junction, dans l’ouest de la ville, Indie Ale House propose aussi quelques plats simples et savoureux. Burgers, mac’n’cheese, pizza et tralala.

P.-S. De grâce, ne faites pas l’addition de nos consommations. Pour tout essayer sans vaciller, la formule dégustation permet de commander un petit verre, qui vous coûtera 2 $ ou 3 $.

BELLWOODS BREWERY

Le Bellwoods est sans doute la microbrasserie la plus en vue dans la voie maltée torontoise. Avec sa menue carte de plats et son impressionnant menu de bières, ce sympathique endroit attire une clientèle variée, prête à patienter en file pour trinquer à une des tables à pique-nique de la jolie terrasse, avenue Ossington. 

Nous optons pour la mezzanine, où s’offre en plongée la vue sur les grandes cuves et les barils dans lesquelles fermentent des bières de toutes traditions – belges, allemandes, anglaises, etc. – , sans oublier un cidre délectable. 

Aussi à noter : les brasseurs, aventureux, ont collaboré avec leurs homologues québécois du Trou du diable pour offrir la Frambizzle, une agréable saison à la framboise. Un endroit parfait pour les groupes d’amis qui n’ont pas peur d’étirer la soirée.

GRANITE BREWERY

Sœur cadette de la microbrasserie néo-écossaise du même nom, Granite Brewery s’inscrit dans la grande tradition des pubs anglais, fermentation haute – le suffixe ale inonde le menu – à l’honneur. 

Depuis 1991, cette institution de la Ville reine rallie les habitués solitaires et les curieux de passage. Des banquets sont aussi offerts sur la charmante terrasse arrière. 

L’intérieur, avec sa majestueuse bibliothèque déployée sur un mur entier, ses nombreuses toiles et son mobilier de bois massif, est aussi fort chaleureux. 

Notre serveur, à la moustache aussi vénérable que les connaissances brassicoles, nous suggère la Best Bitter Special, une excellente cask qui tangue entre malt caramel et houblon, et une bière de blé, la Summer Ale, joliment dorée, goûteuse et légère. Côté bouffe, ne dites pas non aux colossaux nachos, noyés sous une montagne de garniture. 

Seul l’emplacement laisse à désirer, alors que l’interminable rue Eglinton s’y déguise en une espèce de boulevard Taschereau.

BAR VOLO

Le Bar Volo, depuis 1985, a pris le pari de la diversité. Et le voilà abondamment récompensé par un achalandage constant et fidèle. L’alphabet n’est pas suffisant pour contenir l’offre de fûts qui s’étalent de A à Z sur le grand tableau du menu, si bien que les quatre ou cinq bières brassées sur place débordent du côté des chiffres. 

Sur la jolie terrasse jouxtant la très centrale avenue Yonge, nos lèvres trempent dans la 4, une American Pale Ale (elle aussi en cask !) savoureuse. Il faut en outre se déplacer au comptoir pour commander, puisque les serveurs sont aussi rares que les bières industrielles dans ce temple du houblon. Lire : inexistants. Et si le Québec est dignement représenté – les excellentes microbrasseries Dieu du ciel !, Hopfenstark et le Trou du diable se partagent une douzaine de déclinaisons – , il vaut mieux boire local. Deux fois plus cher, le saint liquide fleurdelisé ne sera pas, hélas, deux fois meilleur.

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