La question du proprio

Que doit-on savoir sur la clôture mitoyenne ?

Lorsqu’on décide d’installer une clôture pour délimiter sa propriété, la collaboration avec son voisinage est essentielle. La bonne entente facilite grandement la mise en branle d’un projet qui fait bien souvent l’affaire de tout le monde. 

Malheureusement, il arrive que cette simple idée d’avoir une clôture se transforme en une longue bataille entre voisins qui, dans le pire des cas, se termine devant un juge.

PIQUETAGE OU BORNAGE ?

Avant d’entreprendre des travaux qui touchent la ligne mitoyenne de deux terrains, il faut d’abord déterminer avec précision où celle-ci se situe. Il y a deux façons de déterminer une ligne de propriété : le piquetage et le bornage. « Le piquetage est une opinion qui concerne les limites de la propriété. En se référant aux titres de propriété, au cadastre, aux marques d’occupation et à l’organisation matérielle des lieux, on vient placer des repères physiques sur le terrain. C’est souvent suffisant pour le client », explique l’arpenteur-géomètre Benoit Péloquin.

Pour sa part, le bornage est le résultat d’un processus beaucoup plus complexe et cher, à l’issue duquel un arpenteur-géomètre établit de façon irrévocable les limites de propriété. Qu’elles soient déterminées par le moyen du piquetage ou celui du bornage, ces limites sont marquées à l’aide de repères métalliques dotés d’une tête de plastique orange.

Ces tiges servant de guides ne sont pas fixes et on s’y réfère avec précaution. « On n’utilise pas un repère physique sans le plan qui l’accompagne. Il a peut-être été enlevé pour permettre la réalisation de certains travaux, puis replacé à peu près à la même place sans être exactement au bon endroit. C’est pourquoi on ne doit pas tenir les limites qu’ils annoncent pour acquises », précise l’arpenteur-géomètre.

DEUX VOISINS, DEUX AMIS

La convivialité des rapports entre voisins n’est pas une raison pour prendre un projet de construction de clôture à la légère. Les estimations à l’œil des limites d’un terrain peuvent coûter cher aux propriétaires.

Pour éviter les mauvaises surprises, il vaut mieux demander l’avis d’un arpenteur-géomètre pour tout projet qui jouxte la ligne de terrain ou s’applique directement à celle-ci. Les voisins devraient aussi signer un contrat qui confirme leur accord quant à la mitoyenneté.

« Il faut une entente écrite et signée par les deux voisins, en deux exemplaires originaux, et qui prévoit le plus de détails possible. On y indique d’avance le choix de l’arpenteur, le choix des matériaux, le coût, les modalités de paiement, la main-d’œuvre et les détails de la construction : hauteur, couleur, longueur, etc. », suggère Me Laura Ann Weir.

On ajoute également au dossier les devis, le certificat de piquetage ou le procès-verbal de bornage et les soumissions.

LA CONSTRUCTION

Avant d’installer une clôture mitoyenne, les deux parties doivent s’entendre. « Si je paie moi-même les frais et que je désire par la suite en réclamer la moitié à mon voisin, je dois m’être entendu avec lui avant le début des travaux ou obtenir un ordre du tribunal en ce sens. Le voisin doit pouvoir contrôler le coût de l’aménagement », explique Me Weir.

On ne peut donc pas imposer à son voisin une clôture inutilement haute ou faite en matériaux étonnamment chers, puis lui refiler la moitié de la facture.

Si l’accord est impossible et empêche le début des travaux, il faut alors faire parvenir une mise en demeure au voisin.

« Pour éviter les tribunaux, on peut se tourner vers des modes différents de résolution de conflit, comme la médiation. Cependant, si le litige perdure, c’est un juge qui tranchera. » — Me Laura Ann Weir

En croyant éviter les problèmes, certains décident de construire la clôture entièrement sur leur terrain, à quelques centimètres de la ligne de propriété. C’est une mauvaise idée, selon Benoit Péloquin. « Une clôture, ça s’installe sur la ligne. Autrement, on laisse le voisin occuper une portion de notre terrain. Les marques d’occupation ont un effet juridique et il peut être extrêmement difficile de récupérer cette portion de terrain abandonnée au voisin. »

GUERRE DE CLÔTURE

Il arrive que des gens soient incapables de concevoir ensemble un projet de clôture. Au lieu de se tourner vers les tribunaux, ils décident à tort de se faire justice eux-mêmes. « Il existe en jurisprudence des histoires d’horreur de voisins qui se détestent au point de construire des clôtures de 3 m de hauteur en métal avec des barbelés », relate Me Weir. M. Péloquin confirme : « J’ai déjà vu des gens mettre deux clôtures côte à côte parce qu’ils n’arrivaient pas à s’entendre. »

Inutile d’en arriver là. La plupart du temps, une bonne discussion, un peu d’ouverture et quelques validations techniques avec un spécialiste suffisent à mettre la table pour un beau projet de clôture mitoyenne.

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