Malbouffe

Une alimentation parfaite

Médaillée d’or en plongeon aux Jeux olympiques de Los Angeles, Sylvie Bernier est restée proche des athlètes. Elle a été chef de mission de la délégation canadienne aux Jeux de Pékin et chef de mission adjointe aux Jeux de Londres et de Turin. L’énergique femme de 50 ans est aujourd’hui ambassadrice des saines habitudes de vie de Québec en forme.

Q. Quand des athlètes font la promotion d’aliments peu sains, ça vous interpelle ?

R. C’est sûr que ça m’interpelle. C’est évidemment délicat pour moi, je ne suis pas en position de porter un jugement de valeur. Je peux comprendre qu’à un moment donné, il peut y avoir des difficultés financières dans une carrière d’athlète. Mais aujourd’hui, avec tout ce qu’on sait sur les boissons sucrées, les boissons énergisantes et la malbouffe, c’est sûr que je vois une incohérence totale quand un athlète s’y associe. Un jeune qui consomme une boisson sucrée par jour a 60 % plus de chance de souffrir d’obésité dans sa vie [selon une étude parue dans Lancet]. C’est énorme.

Q. Les sportifs consomment-ils eux-mêmes de la malbouffe ?

R. Un athlète de haut niveau s’alimente parfaitement. J’en suis très consciente, comme je suis encore très près du mouvement olympique. C’est vraiment des aliments d’exception pour eux. Mais les stratégies marketing de ces entreprises visent à aller chercher une clientèle d’adolescents, et les athlètes sont des modèles exceptionnels, des héros pour nos jeunes. L’industrie du tabac utilisait exactement les mêmes stratégies il y a 30 ans.

Q. Les athlètes amateurs ont-ils besoin de l’argent des commandites ?

R. Ça dépend. Il y en a pour qui 15 000 $, 20 000 $, 30 000 $ ou 40 000 $ de plus, ça fait une grosse différence. Il y en a d’autres pour qui ce n’est pas nécessaire. Eux doivent vraiment réfléchir, se demander s’ils veulent associer leur nom à une entreprise de malbouffe, pour la vie. Même si le contrat dure un, deux ou trois ans, les gens s’en souviennent longtemps. J’en veux beaucoup plus à l’industrie de s’associer au sport qu’aux athlètes. Quand on a la carotte devant soi, il faut être vraiment fait fort pour dire non.

Q. Pensez-vous que les choses vont changer ?

R. Peut-être que je suis naïve, mais je crois sincèrement qu’on est de plus en plus sensibilisés aux effets néfastes de la malbouffe, à l’augmentation de l’obésité, au lien direct qui a été démontré avec les boissons sucrées. Avant, tu allais t’entraîner à la piscine et il y avait des fumeurs dans les gradins ! Aujourd’hui, on ne peut pas s’imaginer ça, parce qu’il y a vraiment incompatibilité. Si bien que dans 20 ans, peut-être qu’on ne verra plus de boissons sucrées et de malbouffe dans les arénas, les cafétérias, les centres sportifs. Je suis convaincue qu’on va en arriver aux mêmes conclusions qu’avec le tabac et qu’on n’aura pas le choix de légiférer.

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