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L’assurance télématique gagne du terrain

Au cours de la dernière année, trois compagnies d’assurance automobile présentes au Québec ont intégré la télématique – technologie qui permet de suivre à la trace les conducteurs – à leur offre de produit. Ce qui était l’exception dans l’industrie pourrait bien, sous peu, devenir la norme.

Dans le secteur de l’assurance automobile, la télématique se traduit par l’installation d’un dispositif à l’intérieur d’un véhicule. Ce dernier permet de recueillir et d’envoyer des informations à la compagnie d’assurance. Dès lors, celles-ci peut établir le profil du conducteur et proposer un rabais établi en fonction des résultats obtenus.

« Le recours à la télématique est une tendance dans l’industrie déjà bien implantée aux États-Unis et en Europe, qui prend son envol ici », constate Suzanne Michaud, vice-présidente Support et Gouvernance à l’Industrielle Alliance. S’inspirant de ce qui se fait déjà aux États-Unis et en Europe, l’assureur a lancé en 2012 Mobiliz, le premier programme québécois et canadien du genre.

Au cours de la seule dernière année, trois assureurs présents au Québec ont fait de même : Desjardins Assurances avec le programme Ajusto, Intact Assurance avec Ma conduite et Belairdirect avec Automérite.

Tous offrent des rabais pouvant représenter jusqu’à 25 % de la prime, établis en fonction de critères similaires : kilométrage annuel, nombre d’accélérations forcées et de freinages brusques, et moments d’utilisation dans la journée.

Les assureurs ne s’en cachent pas. L’objectif est de transformer les comportements des conducteurs.

« En améliorant la conduite des gens,
on réduit le nombre d’accidents et, du coup, de réclamations. Ça nous permet d’offrir des primes plus compétitives et d’attirer davantage de clients. »

— Denis Côté, vice-président Commercialisation chez
Desjardins Assurances

Pour ce faire, les programmes de Desjardins Assurances et d’Industrielle Alliance invitent les clients à consulter leur dossier diffusé en ligne afin d’améliorer leur conduite en vue d'augmenter leurs rabais. Pour sa part, Intact Assurance utilise plutôt la télématique pour une période de quelques mois, le temps d’établir le profil du conducteur et de lui octroyer un rabais.

Le cabinet-conseil américain Towers Watson a mesuré les bénéfices de ces programmes aux États-Unis, où ce type de programme existe depuis 1998. Résultat : les réclamation des assureurs ont diminué de 30 % en moyenne et la réclamation des jeunes conducteurs ont en moyenne chuté de 30 % à 40 %.

Après un an d’existence, Ajusto a déjà converti 50 000 clients. La moitié d’entre eux bénéficient d’un rabais dépassant 10 % et le rabais moyen gravite autour de 12 %.

Les jeunes sont particulièrement réceptifs à ces initiatives, constate Suzanne Michaud : « Ils sont presque nés avec, dans la bouche, un cellulaire doté d’un GPS. Ils sont habitués d’être suivis à la trace. »

L’OMBRE DE BIG BROTHER

Ces données pourraient-elles être utilisées à d’autres fins qu’à établir des rabais ? Conscient du frein que cette perception orwellienne représente, Desjardins Assurances stipule dans ses contrats que les données recueillies « ne seront jamais utilisées pour annuler votre police d’assurance ou refuser de la renouveler ni pour augmenter votre prime ». L’institution s’engage à ne jamais vendre ces données à des tiers et à ne pas les utiliser « à votre détriment dans le cas d’une réclamation d’assurance ».

« Le contrat tel que rédigé protège bien l’assuré et constitue étonnamment un programme qui semble de prime abord avantager réellement le consommateur, ce qui est rare dans le domaine de l’assurance », indique Jérémie Martin, avocat indépendant qui travaille dans le secteur de l’assurance.

UN MARCHÉ EN PLEINE CROISSANCE

D’ici 2020, 25 % des revenus de l’assurance automobile devraient être générés par les produits télématiques, totalisant plus de 30 milliards. À l’heure actuelle, l’Europe est le principal marché d’assurance télématique. En 2011, déjà plus de 1 million de clients s’étaient dotés d’une telle technologie. D’ici 2020, les produits d’assurance automobile s’appuyant sur la télématique devraient, en Europe, totaliser l’équivalent de 66,7 milliards de dollars américains.

LES PRIMES D’ASSURANCE UNISEXES

Depuis plus d’un an, les assureurs européens ne peuvent plus considérer le sexe d’un conducteur pour établir les tarifs de ses primes d’assurance. « La prise en compte du sexe de l’assuré en tant que facteur de risque dans les contrats d’assurance constitue une discrimination », statuait la Cour de justice de l’Union européenne lors d’un jugement. Qu’en est-il au Québec ? Dans la province, les différences restent marquantes quant à la prime des conducteurs féminins et masculins en fonction de leur l’âge.

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